Référence agro

La lentille peine à rester dans les champs français

Le

En France, les surfaces cultivées de lentilles ont diminué de 10 000 hectares au cours des trois dernières années. En cause, la baisse des rendements depuis 2019, à l’origine d’une production diminuée de 70 % environ cette année, par rapport à la normale. Explications de Franck Rocher, président de l’Association nationale interprofessionnelle des légumes secs (Anils) et producteur de lentilles du Puy AOP, en Haute-Loire.

Terres Inovia a présenté, le 1er février 2024, les résultats de W-SoLent, son programme d’accompagne - © D.R.
Terres Inovia a présenté, le 1er février 2024, les résultats de W-SoLent, son programme d’accompagne - © D.R.

« N’oubliez pas la lentille française, même si vous ne la trouvez pas en rayon cette année ! » L’invitation est signée Franck Rocher, président de l’Association nationale interprofessionnelle des légumes secs (Anils) et producteur de lentilles du Puy AOP, en Haute Loire. La légumineuse a été largement touchée par les aléas climatiques de 2021. Pourtant fleuris au début de l’été, les plants ont souffert du froid estival, et ont finalement rendu des gousses peu remplies. « La production a été équivalente à 30 % de celle d’une année normale, environ », affirme Franck Rocher. Pour la filière, la situation est préoccupante : une diminution massive du nombre de producteurs de lentilles est prévue pour l’année prochaine.

Une culture imprévisible

Bien que particulièrement marquées cette année, de telles diminutions de récoltes ne sont pas exceptionnelles. « La lentille est une culture très imprévisible. Il est possible que les rendements varient d’un facteur 30 d’une année sur l’autre », explique Franck Rocher. A titre d’exemple, les canicules de l’année dernière avaient causé une diminution de 40 % de la production, tandis que l’année 2019 avait, quant à elle, amené des récoltes historiquement hautes, posant des problèmes sur les moyens de stockage disponibles.

10 000 ha de lentilles en moins en trois ans

D’après Franck Rocher, l’objectif à long terme est la souveraineté nationale en lentilles. Difficile d’y arriver si le nombre de producteurs ne se redresse pas. Bien qu’il s’agisse d’une culture nécessitant peu d’intrants, facilement intégrée dans un assolement, et qui libère dans le sol de l’azote pour la culture suivante, les surfaces diminuent. « Il y a trois ans, avec la croissance de la production, le pays comptait 40 000 ha, et aujourd’hui on est retombés à 30 000 ha, soit moins de la moitié de ce qu’il faudrait pour atteindre la suffisance », explique le président de l’Anils.

Des aides publiques pourraient stimuler l’attractivité de la filière

Selon lui, le problème du manque d’agriculteurs est aussi politique : « Si la lentille devient intéressante tous les ans, les agriculteurs n’hésiteront plus ! », affirme-t-il. La filière essaie donc depuis quelques années, de peser dans les négociations, afin demander des aides financières, notamment dans le cadre du Plan Protéines. La prochaine Pac devrait contenir, pour la première fois, une aide à destination des protéines végétales pour l’alimentation humaine, mais Franck Rocher reste prudent : « On a beaucoup travaillé pour l’obtenir, mais on ne sait pas si elle sera suffisante. »

Avec plus de moyens, la filière aimerait, en plus de travailler sur la régularité des rendements, envisager des techniques alternatives de préparation des sols, qui soient plus durables que les pratiques conventionnelles.