L’industrie des engrais : des marchés volatils, sur fond de menace réglementaire
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Un record de hausse des prix en 2008, une chute de 50 % du chiffre d’affaires en 2009, une amorce de reprise en 2010… La stabilité n’est plus de mise sur un marché de plus en plus dépendant de l’évolution des marchés des matières premières agricoles. Une constante toutefois : les risques liés à un durcissement de la réglementation européenne, comme indiqué le 15 octobre, lors d’une rencontre de l’Unifa avec la presse. L’attention se focalise actuellement sur les quotas de CO2.
Le chiffre d’affaires 2009 de l’industrie des engrais et amendements s’établit ainsi à 1,9 milliard d’euros, soit un recul de 50 % sur 2008 (année record à la hausse, il est vrai), qui se répartit pour moitié entre l’effet prix et l’effet volume. Traduction de cette contraction du marché, constante sur les P et K depuis des décennies, ou effet plus conjoncturel des politiques d’entreprises ? En tout cas ce sont trois sites qui ont été fermés ou sont en cours de fermeture cette année : celui de Yara à Issoudun (36), de l’Ammoniac agricole près de Pardies (64) et de l’atelier de mélange K+S Kali près d’Alençon (14).
Catherine Deger
L’addition risque d’être sensiblement plus sévère, selon Joël Morlet, président de l’Unifa, si la DG Climat au sein de la commission européenne reste sur la ligne dure en matière de réduction d’émissions de CO2. Il va même jusqu’à brandir le spectre « d’un risque de disparition de la production d’engrais azotés en France, voire dans l’Union européenne ».
« Nous avons le soutien de l’ensemble des ministères français », a-t-il annoncé. Mais des pays comme le Royaume-Uni ou l’Allemagne ne sont pas sur les mêmes positions. L’enjeu est de taille, pour l’ensemble de la filière, puisque le surcoût estimé d’une réduction des émissions de 90 %, au lieu des 75 % sur lesquels s’est déjà engagée l’industrie, serait de 25 à 40 euros par tonne d’ammonitrate produite.
Campagne en cours, un sentiment de pénurie non fondé
La campagne qui s’engage s’annonce sous d’assez bons auspices. La demande est repartie à la hausse de la part des agriculteurs, comme des distributeurs. Avec, en corolaire, une tension sur les livraisons d’azotés. Structurelle ou conjoncturelle ? Plutôt conjoncturelle, estime l’Unifa. Les importations sont à peu près du même niveau, a expliqué Joël Morlet, et les volumes non produits du fait des arrêts pour grande maintenance de plusieurs sites sont à même d’être compensés. Le fait que « plus personne ne veut faire de stock » contribue de fait à une tension sur la chaine logistique, avec, tout au bout, une tendance à un peu plus de stockage à la ferme. Reste que pour Joël Morlet, « il y a plus un sentiment de pénurie », qu’un manque réel de produit. Quant aux prix, faut-il considérer la hausse comme durable ? Leur évolution est jugée en phase avec une morte-saison classique pour l’industrie. Et le fait que les engrais ne représentent qu’un petit 10 % du prix des céréales laisse supposer qu’ils ne devraient pas baisser sensiblement.
Les chiffres clés de l’industrie des engrais :
4 000 emplois temps plein
49 sites de productions en France
L’approvisionnement du marché français en % en 2009/2010 (entre parenthèses, 2008/2009) : France, 44 % (45 %) ; UE à 15, 24 % (23 %) ; UE des 12 nouveaux États membres, 13 % (17 %) ; production pays tiers, 19 % (15 %).
120 installations de stockage soumises à autorisation, dont une vingtaine dans l’industrie. Une dizaine pourrait fermer du fait de la réglementation stockage engrais du printemps 2010.