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L’Unifa pose les enjeux de la planète…

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Le Palais des Congrès de Reims bruisse de conversations sur la volatilité des cours des engrais en général, et le décrochage des ammonitrates en particulier, ces 5 et 6 février 2009, lors des 3e journées de la fertilisation, organisées par l’Unifa (Union des industries de la fertilisation). En tout cas pendant les pauses… Car la vision prospective, et pas spécialement optimiste, développée par les intervenants sur le thème « Nourrir tout le monde sans affamer la terre », a en partie permis de dépasser les débats plus immédiats.

Pascal Prot, président de Champagne Céréales, a rassemblé lors de son intervention, les préoccupations du court et du moyen terme. Il a tenu, en premier lieu, à rappeler tous les acquis de l’agriculture, qu’il s’agisse d’une production en quantité et en qualité, contribuant pour 50 %, à égalité avec la médecine, à l’allongement de la durée de vie moyenne. « Pour autant, on dit que l’agriculture pollue, et vous en êtes un peu responsables, a-t-il souligné en s’adressant à une salle où dominaient les industriels. Toutes ces accusations ne sont pas justes, mais elles existent ! ».

Principe de réalité, donc, qu’il a prolongé par un appel à l’innovation « pour fournir des engrais plus efficaces, plus rapidement assimilables », proposant au passage la contribution du centre Agro-Recherche-Développement. « Ce dont nous n’avons pas besoin, a-t-il toutefois poursuivi, c’est de l’annonce de fermetures d’usines pour faire monter les prix. Nos relations de confiance ne peuvent supporter la gestion à court terme. A terme, il n’est pas certains que vous soyez gagnants ». C.D.


Photo : Michel Prud’Homme (Ifa), Pascal Prot (Champagne Céréales), Jean-Marc Jancovici (Carbone 4) et Gilles Poidevin (Unifa), le 6 février à Reims.

A gauche, Pascal Prot

Des fermetures d’usines surtout motivées par la baisse de la consommation ont en substance répondu les représentants de l’industrie, qui plaident, eux aussi, pour une vision sur le long terme. Les enjeux posés lors de ces deux jours par des intervenants d’horizons très différents supposent que l’on travaille plus sur les points de convergence.

L’intervention la plus déstabilisante est sans conteste celle présentée par Jean-Marc Jancovici, polytechnicien, directeur de Carbone 4. La crise financière et économique actuelle, directement corrélée selon son analyse à la poussée des prix de l’énergie l’an dernier, et à des flux qui vont aller très vite en se réduisant, suppose une mobilisation immédiate. Elle ne concerne pas les générations futures, mais bien celle de nos enfants, estime-t-il, avec une contrainte majeure : « les problèmes vont aller croissants, avec des moyens qui vont décroissants ».

Une contrainte également soulignée par Bruno Parmentier, directeur de l’Ecole supérieure d’agriculture d’Angers : « nous touchons aux limites de notre planète et des effets de la révolution verte ». La multiplication par quatre de la production sur les dernières décennies a mobilisé quatre fois plus d’eau, de terre, de chimie et d’énergie. « Nous allons devoir produit plus, mais avec quatre fois moins ! ». Pour lui, « il faut en urgence réinvestir massivement dans l’agriculture mondiale, une agriculture à haute intensité environnementale qui utilise mieux les différentes combinaisons d’animaux et de végétaux pour remplacer les apports externes d’énergie et de chimie, pour maîtriser les nouvelles combinaisons de gènes à venir ». Agriculture enfin, régie par des règles du commerce international protégeant les cultures vivrières.

L’innovation est apparue à plusieurs reprises comme un élément salvateur. Elle pourra sans aucun doute apporter des réponses. L’industrie y travaille et revendique au passage en France une simplification des procédures d’homologation. Autre élément important de réponse aux enjeux décrits lors de ces rencontres : un approfondissement des connaissances agronomiques et l’optimisation de leur diffusion. Le conseil a de beaux jours devant lui !