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Olivier de Temmerman, responsable adjoint sur les marchés céréaliers chez Terre Atlantique (17). « Les fondamentaux restent solides »

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Après les envolées des dernières semaines, les marchés ont subi, les 24 et 25 juillet, une baisse de près de 20 €/t en deux jours. Nerfs fragiles… s’abstenir ! Une volatilité qui, plus que jamais, remet sur le devant de la scène les prix moyens constitués par les coopératives. Olivier de Temmerman, en charge des marchés chez Terre Atlantique (17), nous livre son analyse.

Les marchés ont encaissé une baisse de 20 € en deux jours. Etait-ce prévisible ?

Prévisible au jour près, non. Les marchés grimpaient en ligne droite depuis plus d’un mois, une correction était de plus en plus probable. Pour autant, les fondamentaux céréaliers restent solides et donnent lieu à de nombreuses rumeurs et/ou faits porteurs de volatilité sur les prix : sécheresse et chaleur aux Etats-Unis qui mettent à mal maïs et soja, rendements en baisse sur la mer Noire, peu de visibilité sur les exports russes, incertitudes macro-économiques liées à la crise… Mais, il est vrai que les prix élevés sur les marchés focalisent de plus en plus l’attention sur l’état de la consommation mondiale plus que sur l’état de la production mondiale. Dans ce contexte, les financiers américains ont choisi de prendre une partie de leurs bénéfices. Etant donné la taille des positions des fonds financiers, chaque prise de bénéfices de leur part fait trembler les prix. Sans compter que l’arrivé des récoltes en Europe apporte un peu plus de volatilité aux prix. Propos recueillis par Anne Gilet

Le contrat à prix moyen reste-t-il donc toujours d’actualité ?

Plus que jamais dans un contexte de forte volatilité où rien n’est jamais acquis. L’an passé, au sein de la coopérative, le ratio entre prix ferme et prix moyen était de 60/40 %. Bien sûr, les pris élevés incitent à vendre en prix ferme mais attention à ne pas être trop « gourmands ». Nous proposons plusieurs mécanismes d’assurance à nos adhérents pour s’engager à différents niveaux de risque… selon leurs attentes. L’idéal est, à mon sens, de diversifier son risque en combinant plusieurs de nos offres. Pour les épauler dans leurs décisions, nous diffusons via notre extranet et nos équipes terrain des conseils objectifs pour traduire et essayer d’anticiper les mouvements du marché. Devant la complexité des marchés, notre nouvelle méthodologie de construction du prix moyen séduit beaucoup de nos agriculteurs. Ainsi, la tendance pourrait, cette année s’inverser : 60 % en prix moyen et 40 % en prix ferme. Ce mois de juillet, nous avons décidé de verser une avance de trésorerie de 200 €/t sur le blé.

La collecte de blé tendre s’annonce prometteuse. Les acheteurs se manifestent-ils déjà ?

La moisson 2012 s’annonce effectivement en hausse. A l’échelle nationale, les prévisionnistes tablent sur 37, voire 38 Mt. Le potentiel à l’exportation pourrait donc approcher les 11 Mt. Certes les qualités en blé ne semblent pas être à la hauteur de celles de l’année dernière - qui étaient très bonnes - mais il est encore un peu trop tôt pour dresser un état des lieux précis. Pour l’heure, bien que nos acheteurs soient présents, la question qui domine est de savoir comment se comportera la consommation mondiale face à des prix élevés et face aux inquiétudes économiques. La fin des récoltes permettra aussi d’y voir plus clair. Autre fait marquant, la collecte française s’avère aujourd’hui compétitive face aux blés américains avec un euro/USD qui est passé sous la barre des 1,20 en début de semaine. Cependant cette parité fluctue beaucoup et peut remettre en cause rapidement notre compétitivité.

Les prix pourraient-ils repartir à la hausse ?

Tout est possible mais il est vrai qu’aucun élément lié aux fondamentaux connus à ce jour ne prédit le contraire. Plus que la production à ce jour, quel sera l’état de la consommation avec des prix élevés dans les prochains mois ? Quelles seront les rumeurs et les faits de demain ? D’un autre coté, des éléments techniques comme les nombreux achats/ventes d’options peuvent apporter quelques accélérations aux mouvements des cours, dans un sens comme dans l’autre. Ainsi, il est fort probable de voir les marchés plus volatiles dans les prochains jours. De là à imaginer une cassure du 270€/t pour se diriger vers les 300€/t ou une nouvelle correction de 20€/t, tout semble possible…