Analyse : La compensation agricole, un concept en cours d'affinage
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Instauré par la loi d’avenir pour l’agriculture de 2014, le principe de compensation agricole n’est entré en vigueur qu’en décembre 2016. Il impose aux porteurs d’aménagements consommant des terres agricoles, comme une voie ferroviaire, d’évaluer l’impact du projet sur l’agriculture, en termes productifs. Et, le cas échéant, de le compenser.
Approche quantitative et qualitative de l’impact sur l’agriculture
Le prestataire de services Agrosolutions propose un accompagnement aux porteurs de projets. « C’est un travail très quantitatif, précise Carole Hernandez Zakine, docteur en droit de l’environnement au sein d’Agrosolutions, le 11 avril lors d’un bilan d’activité de la structure. Il faut anticiper le nombre d’hectares, la production, les effets chiffrés pour les producteurs, mais aussi pour l’aval de la filière. » La notion de qualité est également de mise : « 15 hectares de moins sur un territoire AOP ne seront pas évalués de la même manière que 15 ha de céréales en Beauce. »
Ne pas entamer la production d’un territoire
Une fois l’estimation effectuée, la loi impose de trouver une voie de compensation. Il ne s’agit pas simplement d’un dédommagement financier, mais bien de mesures visant à ne pas amoindrir la production d’un territoire. Sous peine de remettre en cause l’aménagement ? « L’esprit de cette mesure était de donner aux préfets le pouvoir d’aller jusque là. Dans le droit, ce n’est pas encore le cas », note Carole Hernandez Zakine.
De fait, la compensation agricole n’a pas été très bien accueillie par les aménageurs, qui la contestent encore. D’où la latence dans l’adoption du décret dédié, et certains flous persistants. Le ministère de l’Agriculture entretient des liens étroits avec les prestataires comme Agrosolutions, qui s’est déjà attelé à quatre procédures depuis fin 2016. « Nous remontons les cas de figures rencontrés, qui n’entrent pas toujours dans le périmètre prévu », explique Carole Hernandez Zakine.
Un sens nouveau pour les projets d’aménagements fonciers
Si le ministère travaille encore à l’affinage du dispositif, les acteurs de terrain ne peuvent pas attendre et doivent dès à présent composer avec cette contrainte. « Un opérateur routier peut potentiellement avoir à s’impliquer dans la consolidation ou la création d’une filière agricole », précise encore Carole Hernandez Zakine. La spécialiste relève toutefois un certain intérêt pour ces enjeux, qui donnent un sens nouveau, l’alimentaire, aux porteurs de projets d’aménagements fonciers.