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« Climat et biodiversité sont les deux priorités de mon action », Agnès Pannier-Runacher

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Agnès Pannier-Runacher a été auditionné le 6 novembre 2024 par la commission Développement durable du Sénat. Revenant sur les trois textes récemment mis en consultation (PNACC, SNBC, PPE), la ministre de la Transition écologique en a profité pour présenter sa feuille de route.

« Climat et biodiversité sont les deux priorités de mon action », Agnès Pannier-Runacher
« Climat et biodiversité sont les deux priorités de mon action », Agnès Pannier-Runacher

« Le monde vivant est en danger et si nous restons inactifs, c’est la survie de notre propre espèce qui est en cause. Nous devons mener ces deux combats de front. Climat et biodiversité sont les deux priorités de mon action, les deux faces d’une même pièce. Pour agir, nous avons une méthode, la planification écologique, engagée en 2022. Une méthode qui porte ses fruits : en 2023, nos émissions de GES ont diminué de -5,8 %. Pour autant, face à l’urgence, nos efforts doivent se poursuivre », a déclaré Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques, lors de son audition par la commission Développement durable du Sénat, le 6 novembre 2024.

PNACC : « L’objectif est de le déployer en 2025 »

Je soumets actuellement trois textes importants à la consultation du public :

  • Tout d’abord, le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC), présenté par le Premier ministre dans le Rhône. Le texte prévoit 51 mesures pour renforcer la protection de la population face aux effets déjà perceptibles dans nos vies du changement climatique. Il s’agit à la fois d’anticiper, que ce soit dans nos modes de travail, dans la manière d’aller à l’école, dans la question des examens en période de canicule… Plus fondamentalement, de développer une culture du risque par rapport aux dérèglements climatiques. Parmi les mesures du PNACC, 75 M€ supplémentaires pour le fonds Barnier, porté à 300 M€ en 2025 pour multiplier et accélérer les projets de prévention. L’objectif est de le déployer pour l’année 2025  ;
  • Ensuite, j’ai lancé, avec mes collègues François Durovray (ministre délégué chargé des Transports) et Olga Givernet (ministre déléguée chargée de l’Énergie), la consultation sur la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Ces deux textes correspondent au deuxième pied de notre action écologique. D’un côté, il est nécessaire de s’adapter, parce que le réchauffement climatique est là et qu’il nécessite de changer nos modes d’aménagement de la ruralité, de la périphérie, de la ville, et également de changer nos habitudes. Mais de l’autre côté, il ne faut pas baisser la garde dans le combat contre le dérèglement climatique, et il faut continuer à baisser nos émissions de GES. Les deux textes ont pour spécificité d’introduire de nouvelles ambitions : nous augmentons notre ambition à -50 % de baisse des émissions de GES à horizon 2030. C’est également le fait qu’en 2030, nous ne soyons plus dépendants des énergies fossiles qu’à hauteur de 42 %, alors que la précédente programmation prévoyait qu’on soit encore dépendant à hauteur de 60 %. »

Plan Vert : « Nous avons besoin de clauses miroirs »

« J’aurai également d’autres priorités au cours des prochaines semaines et des prochains mois sur le sujet de la protection de la biodiversité et de l’eau :

  • D’abord, assurer le déploiement de la Stratégie Nationale Biodiversité (SNB). Elle date d’un an, mais nous allons nous assurer qu’elle est correctement mise en œuvre. Il y a une échéance importante qui est de placer 10 % de notre territoire sous protection renforcée ;
  • Deuxième élément, lancer la grande conférence nationale sur l’eau annoncée par le Premier ministre, une conférence qui a vocation à se décliner au niveau territorial, bassin par bassin ;
  • Troisième élément, spécifique mais important, le plan Eau pour Mayotte pour aider cette île à faire face à une grave crise de l’eau qu’elle connaît depuis des mois ;
  • Enfin, mettre un plan de sécurisation des captages pour garantir la qualité de l’eau. Ce plan, je l’avais élaboré au Masaf. Je l’emporte avec moi au ministère de l’Écologie, parce que la question de la qualité de l’eau est essentielle. »

« Vous pouvez compter sur moi pour continuer la mise en œuvre du Plan Vert, avec l’absolue nécessité de le coupler à une ambition industrielle et à une politique commerciale adaptées. Nous avons besoin de clauses miroirs, de mesures miroirs, et d’un système qui permet aux entreprises européennes qui font les efforts de la transition de ne pas se retrouver en situation de concurrence déloyale par rapport à d’autres pays. »

La COP16 : « des résultats mitigés »

Sur la scène internationale, plusieurs événements importants nécessiteront un rôle actif de la France d’ici à la fin de l’année :

  • La COP16, avec des résultats mitigés. Un accord sur la protection des océans, un accord sur le lien entre climat et biodiversité. Il est plus problématique que certains pays, par exemple, ne souhaitent même pas faire la transparence sur l’utilisation de leurs phytosanitaires, dans le cadre de reporting des objectifs très ambitieux que s’était donné la COP de Montréal. L’ambition que j’ai, avec les pays les plus avancés en matière de lutte pour la protection de la biodiversité, est de ne pas mettre à la poubelle ces trois semaines de négociations. Ce qui s’est passé, c’est qu’au moment d’adopter ce texte sur le reporting, un pays a levé la main pour demander s’il y avait le quorum, sachant pertinemment qu’il y en a rarement en fin de COP et après une nuit blanche, ce qui a eu pour effet d’arrêter juridiquement et immédiatement la COP. Ce qu’il faut en retenir, c’est que le dialogue multilatéral se fait dans un moment un peu délicat et qu’il suppose d’être extraordinairement actif, assertif, présent en tant que ministre, pour pouvoir porter les positions ;
  • la COP29 sur le climat à Bakou, qui se tiendra dans les prochains jours et où nous tiendrons vigoureusement la chaise dans l’enceinte onusienne. Personne n’est naïf : nous avons des relations complexes, compliquées, pour le dire en langage diplomatique, avec l’Azerbaïdjan. Il n’y aura aucun événement auquel participeront des officiels français qui mettraient en valeur d’une quelconque façon tel ou tel élément de la politique azérie. Il n’y aura non plus aucun contact avec les autorités azéries qui n’ait de rapport avec la COP. En revanche, compte tenu des tensions qu’il y a eu pendant la COP 27, avec un accord difficile, du très bon accord obtenu à la COP28, permis par une très forte mobilisation d’une dizaine de ministres européens, il nous paraît impossible de ne pas tenir la chaise dans les salles de négociation. C’est très exactement cela que nous ferons, en rappelant nos valeurs et en les portant haut et fort ;
  • S’agissant ensuite des négociations de Busan sur la réduction de la pollution plastique, nous prenons un texte ambitieux, c’est-à-dire un texte qui ne se contente pas d’augmenter l’effort de collecte et de recyclage, mais prend le problème à la racine et fixe des objectifs de baisse de production des plastiques. Dans un monde où les experts nous expliquent que d’ici 2060, on triplera la production des plastiques, améliorer la collecte et le recyclage, c’est assez anecdotique. Il faut le prendre le sujet à la racine. Je ne vais pas vous dire que je suis très confiante, puisque pour le moment, il n’est pas question d’un segment ministériel à Busan, ce qui témoigne d’une hésitation dans la volonté de conclure un traité de haute ambition ;
  • Enfin, le One Water Summit à Riyad avec, pour le coup, des perspectives positives, mettant ce sujet de la désertification et de la ressource rare de l’eau sur la table avec des pays engagés. C’est une façon d’aborder le sujet du climat et de la biodiversité. Cela nous paraît être, pour le soft power de la France, mais aussi pour le combat climatique que nous portons, un levier tout à fait efficace. »

Économie circulaire : « un agenda chargé »

  • « En matière d’économie circulaire, nous avons aussi un agenda chargé. Je pense notamment au travail que nous menons sur l'affichage environnemental côté alimentation, au travail que nous devons mener pour inciter à l'incorporation de plastique recyclé. Nous avons de très faibles performances de recyclage des emballages plastiques : nous sommes en 26e position européenne et nous payons 1,5 Md€ de contributions à l’Europe parce que nous ne sommes pas au rendez-vous sur ce sujet. Au moment où nous sommes en train de rechercher des ressources budgétaires, c’est peut-être une bonne manière d’utiliser notre argent.
  • Factuellement, c’est un budget de 16,8 Md€ en autorisation d’engagements qui se situe dans la lignée de ceux de 2019 à 2021, c’est-à-dire un budget avant plan de relance et avant crise. En matière de financement, c’est un budget qui vise une meilleure efficience et sélectivité des données publiques. Il devra être complété grâce à davantage de mobilisation de ressources privées pour maximiser nos investissements écologiques. »