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Condamnation sur les nitrates : la France veut plaider auprès de la Commission européenne

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Les bassins Adour-Garonne, Rhône-Méditerranée, Rhin-Meuse et Loire Bretagne n’ont pas désigné assez de zones vulnérables dans le cadre de la directive nitrates, selon la Cour de justice de l’Union européenne. Cette dernière a donc décidé le 13 juin de condamner la France pour manquement aux dispositions de la directive européenne de 1991. Une décision prévisible puisque la Commission a adressé le 28 décembre 2011, date d’expiration du délai imparti par Bruxelles pour se mettre en conformité, un avis motivé à la France. Laquelle a répondu que le calendrier de révision des zones vulnérables devait se conclure au plus tard en décembre 2012. Ne s’estimant pas satisfaite de cette réponse, Bruxelles a traduit le 27 février, la France devant la Cour de justice de l’UE « pour n’avoir pas pris les mesures efficaces contre la pollution des eaux par les nitrates » concernant la délimitation des zones vulnérables, mais également les programmes d’action. Eviter une sanction financière Comment a réagi le gouvernement ? Delphine Batho a immédiatement dénoncé la responsabilité du précédent gouvernement, et a indiqué qu’elle souhaiter rencontrer le Commissaire européen à l’environnement. « Notre objectif est d’éviter que la France ne soit condamnée en manquement sur manquement », ont réagi de concert les ministères de l’Agriculture et de l’Ecologie. En effet, la France risque une amende et des astreintes journalières élevées. La ministre de l’Ecologie entend vendre la politique actuelle sur la réduction des pollutions et notamment la redéfinition des zones vulnérables rendue publique fin 2012 et la préparation d’un nouveau plan d’actions qui entrera en vigueur au 1er trimestre 2014. Par ailleurs, le gouvernement entend présenter aux instances européennes les actions de préventions sur les zones vulnérables qui se concrétiseront par un arrêté interministériel en septembre 2013. Il devrait prévoir des bandes végétalisées le long des cours d’eau, la fixation des conditions d’épandage sur les sols pentus et détrempés, et les exigences de couverture végétale des sols. De plus, un arrêté fixera des allongements de période d’interdiction d’épandage lorsque les conditions pédoclimatiques l’exigent pour certaines cultures et certaines zones géographiques. L’agro-écologie comme solution Les deux ministères devraient mettre en avant les ambitions du projet d’agro-écologie pour faire évoluer les pratiques et réduire le lessivage des nitrates. Par ailleurs, le plan Energie Méthanisation Autonomie Azote (EMAA) lancé le 29 mars vise à augmenter la substitution de l’azote minéral par l’azote organique provenant des effluents d’élevage ou contenu dans les sous-produits issus de la méthanisation. Le gouvernement prévoit de faciliter cette substitution en intégrant un suivi de l’azote total épandu, minéral et organique, dans la mise en œuvre des zones de surveillance des programmes d’actions nitrates. Aujourd’hui, seul l’azote organique étant comptabilisé, ce qui n’incitait pas, selon les ministres, à limiter l’usage d’engrais chimique. Enfin, afin de ne pas pénaliser les élevages à l’herbe, le gouvernement précise qu’il demandera une dérogation au plafond de 170kg d’azote épandu par hectare, comme l’ont fait l’Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas, l’Italie, l’Irlande et la Belgique. S.Ay et J.P.

  • Les réactions
« Les gouvernements français successifs sont pleinement responsables de cette condamnation pour avoir transmis à Bruxelles, dès 2006, des données incomplètes et surtout non pleinement représentatives de l’état de nos masses d’eau », a fustigé la FNSEA suite à la condamnation de la France le 13 juin sur la mise en œuvre de la directive nitrates. Même coupable du côté de l’association Eau & Rivières : « Les gouvernements ont appliqué la directive a minima, faisant supporter aux contribuables le milliard d’euros que coûte chaque année la pollution des eaux par les nitrates, plutôt que de faire évoluer les systèmes de production agricoles. » Pour France Nature Environnement, « cette condamnation doit être un signal pour enfin changer d’orientation ». L’association dénonce les mesures complexes et coûteuses qui n’ont pas suffi à améliorer la situation. « Au contraire, les zones touchées se sont étendues, indique FNE dans un communiqué du 13 juin. De nombreux exemples productifs et rentables montrent qu’il est possible de produire autrement, sans atteinte à l’environnement. Les récents rapports de Marion Guillou et du Cese proposent de suivre cette même direction. »