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Congrès de la FNSEA - L’urgence : vendre mieux et autrement

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Le ton monte à la FNSEA. Face aux difficultés du secteur de l'élevage, le syndicat majoritaire a demandé aux pouvoirs publics, lors de son congrès organisé à Troyes du 26 au 28 mars, de mettre en place des mécanismes qui permettent aux éleveurs de « répercuter les charges dans les prix ». La FNSEA reproche ouvertement à Stéphane Le Foll de ne pas agir assez, là où il y a urgence. De ne pas prendre à sa juste mesure la nécessaire relance de la compétitivité de la ferme France. Et, enfin, de ne pas assez concerter son syndicat qu'il rappelle majoritaire.

Au « produire autrement » du ministre de l'Agriculture, Dominique Barreau, secrétaire général, a avancé le « vendre autrement », donnant le ton du congrès. Pour Xavier Beulin, président de la FNSEA, le sujet du moment, c'est comment on redresse les agriculteurs et non l'agro-écologie : « La guerre des prix entre les grandes enseignes, qui se répercute sur les producteurs, n'est plus supportable. Nous n'accepterons pas longtemps de considérer que redistribuer les aides Pac et ajuster la Loi de modernisation de l'économie (LME) suffiront pour régler le problème. Le compte n'y est pas. » Anne Delettre

Photo : C'est vêtu d'une marinière à rayures vertes- agriculture oblige- fabriquée à Troyes, dans laquelle tout un chacun aura reconnu la communication ministérielle sur le redressement productif grâce au made in France que Xavier Beulin a prononcé devant le ministre un discours … musclé.

Déception face aux mesures prévues par le gouvernement

En réponse, Stéphane Le Foll a annoncé en clôture du congrès, le 28 mars, avoir saisi ce même jour le Conseil d'Etat afin de pouvoir réviser les contrats entre les producteurs et les distributeurs si le coût de production augmente. « Une clause de négociation doit être intégrée, a expliqué le ministre. C'est une des réponses pour l'élevage afin de valoriser les prix de vente alors que le cours des aliments s'envole. »

« Il y a encore trop de contrats qui ne sont pas respectés », estime par ailleurs le ministre. C'est avec le cadre législatif qu'il faut agir. Reconnaissant qu'il y a urgence pour le secteur laitier, Stéphane Le Foll a indiqué qu'une réunion était prévue le 8 avril pour réaffirmer les engagements de l'Etat, tout en expliquant qu'il ne pouvait faire un plan toutes les semaines.

Mise en œuvre du fonds céréaliers-éleveurs

Le syndicat a toutefois décidé de créer le fonds céréaliers-éleveurs déjà proposé à l'été 2012 « que nous allons assumer et qui fonctionnera sur le principe de la CVO », a déclaré Xavier Beulin. Une contribution volontaire obligatoire sera fixée annuellement afin d'alimenter le fonds de modernisation avec un objectif de 100 millions d'euros. Un dossier de demande d'agrément sera déposé fin avril auprès du ministère de l'Agriculture. Le syndicat a vivement regretté que le coût du travail n'ait été mieux pris en compte, défendant l'idée de la TVA sociale en place du crédit d'impôt pour la compétitivité. Il a rappelé la déclaration de François Hollande lors du Salon de l'agriculture sur le dossier de l'allègement des charges sociales pour les travailleurs saisonniers.

La FNSEA a appelé à manifester dans les départements le 12 avril sur le thème « Sauvons l'élevage français ». Le syndicat déposera alors un cahier de doléances. Il entend aussi organiser le 23 juin à Paris une journée de l'élevage pour sensibiliser le grand public et faire de ce sujet « une cause nationale. » Il y va de l'intérêt général, a souligné Xavier Beulin. « Comment faire plus de traçabilité, de productions diversifiées et vouloir nous obliger à nous aligner sur un standard européen de prix ? Nous revendiquons notre diversité, mais elle a une valeur », a souligné Xavier Beulin.

Pas de surenchère et des solutions concrètes

Regagner de la compétitivité, reprendre la place de champion. Tel a été le fil conducteur du discours de Xavier Beulin. Car si les grandes cultures végétales ou le vin tirent leur épingle du jeu, l'élevage ou les productions fruitières et maraîchères souffrent d'un déficit de compétitivité qui fragilise ces filières. Mais pour y parvenir, des freins sont à lever : trop d'empilement de réglementation, des exigences écologiques non justifiées, un coût du travail trop élevé, pas d'écotaxes supplémentaires… Le produire autrement, dossier pilote du ministre, est aussi loin de mobiliser les foules. « Y'en a marre des slogans ». Nous sommes un secteur d'excellence, ne modifions pas les règles. Améliorer oui, détricoter non ! ». Pointant aussi le manque de considération des agriculteurs : « nous voulons plus d'équité dans les instances consultatives face aux ONG. Il y a des sujets sur lesquels on a besoin de s'expliquer comme le rythme de convergence des aides PAC, la prime aux 50 premiers hectares, l'agro-écologie ».

 

Sur les questions de l'extension des zones vulnérables

La FNSEA refuse l'extension effectuée au « doigt mouillé » des zones vulnérables dans 33 départements. « On a rapproché des zones sans prendre en compte les critères, a expliqué Xavier Beulin. Nous avons dans ce contexte déposé des recours. Et nous aurons gain de cause. » La mise en place d'une date d'épandage nationale est également décriée, car en décalage avec le bon sens agronomique.

Stéphane Le Foll a de son côté indiqué que la France est en porte à faux et qu'il faut éviter de passer d'un contentieux à des amendes. Les discussions sont engagées au niveau européen. Des propositions pour réduire les impacts ont été déposées.

Sur les productions végétales

Xavier Beulin a rappelé au ministre qu'il ne pouvait accepter un écrit émanant de son cabinet dans lequel on relierait revenu agricole et niveau de consommation en produits phytosanitaires. « C'est une question de bon sens. Il est inacceptable de ne pas reconnaitre qu'avec une année sèche comme 2011 la pression parasitaire est moindre que lors d'une année humide comme 2012. » Et d'ajouter : « Nous aurons l'air malin quand nous serons les champions de l'agro-écologie et sans paysans. » De son côté le ministre a rappelé qu'il connaissait la réalité climatique, et que pour lui il est hors de question de lier revenu et niveau de consommation des phytos. Toutefois il a réaffirmé son credo dans le plan Ecophyto et l'agro-écologie : « il faut travailler en commun, sortir du débat, se faire confiance mutuellement. »

Sur la fiscalité écologique

La FNSEA refuse de payer des écotaxes supplémentaires, comme l'écotaxe transport ou encore celle sur l'azote minéral, un temps préssentie pour financer la méthanisation. Rappelant aussi qu'elle n'acceptera plus que le ministre de l'Agriculture puise dans le fonds Casdar, sans concertation, alors que le secteur agricole a besoin d'innovation et de recherche. « Sinon nous ne paierons plus cet impôt dont nous sommes le seul contributeur. »