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COP22 : « Il y a encore trop de désaccord en agriculture sur le climat », Ronan Dantec

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Référence environnement : Quel bilan tirez-vous de la COP22 ?

Ronan Dantec : Dans un contexte d’élection de Donald Trump, un vrai climatosceptique, à la tête d’une des plus grandes puissances mondiales, nous aurions pu nous attendre à une ambiance plus morose. Mais cela n’a pas été le cas. Avec Marrakech, nous entrons dans un cycle d’application de l’accord de Paris. Point majeur qui ressort des discussions : la décision des États de diffuser un premier bilan de leurs actions dès 2018. L’agenda s’est accéléré depuis la COP21. Maintenant que l’accord de Paris a été signé, l’énergie qui avait été déployée à négocier ce texte peut donc être consacrée ailleurs.

Nous avons actuellement deux COP. La « COP technique » d’application de l’accord de Paris, entre négociateurs, et la « COP de l’action », avec une forte mobilisation de la société. De nombreuses initiatives prennent de l’ampleur. Alors qu’auparavant on travaillait sur des écoquartiers, nous parlons désormais d’écocités. Il y a aussi des projets de structuration de filières. Quelque chose se passe, il y a une vraie prise de conscience de l’enjeu climatique.

R.E. : Quelle a été la place de l’agriculture dans la COP22 ?

R.D. : Plusieurs initiatives majeures étaient présentées : l’adaptation de l’agriculture africaine, ou triple A, et le projet de conservation des sols « 4 pour 1000 » porté par la France. Mais l’agriculture reste un sujet difficile. Deux visions s’affrontent, sans compromis : l’agrobusiness et l’agriculture paysanne. De plus, les pays en voie de développement sont méfiants sur la question, car on leur demande de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Or, ils ont besoin de développer l’agriculture et ne veulent pas de systèmes de régulation sur ce secteur majeur pour leur avenir.

Il y a encore trop de désaccord en agriculture. Du coup, les négociations officielles sur ce secteur restent particulièrement difficiles. .

Pourtant, il n’est pas possible de dissocier le climat et le développement agricole. L’équation est complexe, nous demandons beaucoup à l’agriculture : qu’elle se développe dans les pays en voie de développement, qu’elle assure la sécurité alimentaire, tout en stockant du carbone et en réduisant son impact sur le climat.

R.E. : Que pensez-vous des efforts du monde agricole sur le climat ?

R.D. : Il faut être conscient qu’il y a une agriculture intensive, dont le bilan CO2 est incompatible avec l’avenir de la planète. L’agriculture n’a de toute façon pas le choix, car c’est un des premiers secteurs impactés par le changement climatique, c’est sa survie qui se joue. Elle est aujourd’hui confrontée à un système libéral avec une volatilité des prix. Travailler sur le climat c’est travailler à une plus grande maitrise de son avenir. Il faut une agriculture qui peut trouver un autre équilibre économique avec la production d’énergie renouvelable, qui assure une plus grande autonomie alimentaire des territoires, et qui va trouver de l’innovation avec l’enjeu climatique.