Dysfonctionnements à l’Onema : trop de missions et pas assez de moyens
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Comme nous l’indiquions dans notre précédente lettre, le rapport de la Cour des Comptes sur l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’Onema, a été publié le 12 février : il fait état de dysfonctionnements importants au sein de l’Office sur la période 2008 à 2011. « Il est impératif d’assurer une gestion rigoureuse de l’établissement », indique la Cour des Comptes, alors que se rapproche l’échéance de 2015 fixée par la directive cadre européenne de 2000 pour atteindre un bon état des eaux, et que la loi de finances pour 2012 a porté le plafond annuel de la redevance sur l’eau versée à l’Onema de 108 M€ à 150 M€ à compter de 2013. Le dossier a été transmis à la Cour de discipline budgétaire et financière. Une instruction est en cours. Gestion des fonds du plan Ecophyto En cause : l’ampleur et l’accroissement des missions confiées à l’Office depuis sa création en 2006, comme par exemple la gestion des fonds du plan Ecophyto ou la coordination de l’Observatoire national des services d’eau, « qui n’ont pas été accompagnés de moyens à la hauteur des enjeux », indique la Cour. L’Onema confirme avoir « été chargé de mettre en œuvre des volets importants de plusieurs plans nationaux, induisant de lourdes charges de gestion sans qu’aucun moyen supplémentaire notamment en qualification ne lui fût attribué, malgré ses demandes insistantes et renouvelées conjointement avec la direction de l’eau et de la biodiversité. » Du coup, l’Office n’a rempli que partiellement ses missions initiales, comme celle de la gestion du système d’information sur l’eau, SIE, l’outil central permettant à la France de rendre compte à la Commission européenne de l’application des directives sur l’eau, qui a coûté 80 millions d’euros en 2010. Son efficacité est remise en question. Selon l’Onema, le SIE représente des millions de données, près d’une quinzaine de banques de référence, 612 dispositifs de collecte de données recensés, 1000 producteurs de données, 160 laboratoires agréés pour la réalisation d’analyses chimiques et biologiques. Davantage de contrôles sur la directive nitrate Par ailleurs, la Cour des comptes demande le renforcement des contrôles, notamment dans le cadre de la directive nitrates, qui fait l’objet d’un contentieux avec Bruxelles. « La pression de contrôle est insuffisante pour faire diminuer ce type de pollution et se prémunir contre de nouveaux contentieux ». La Cour des Compte estime que l’objectif de contrôle, établi par la circulaire du ministère de l’Environnement du 12 novembre 2010, manque d’ambition au regard des enjeux. « Dans les zones les plus sensibles, 1 % seulement des exploitations d’un département font l’objet d’un contrôle. Ce taux, à comparer avec ceux des stations d’épuration (20 %) ou des seuils et barrages (100 %), n’est pas de nature à contribuer à une diminution de la pollution de l’eau par les nitrates », indique la Cour. Un nouvel outil, Opale Convergence, prévu en 2014, doit permettre de mieux gérer les contrôles et ses résultats. « Mais ce logiciel accuse un retard important », s’inquiète la Cour. En réponse, la ministre de l’Ecologie explique que la mise en place de cet outil induit des enjeux forts de dialogue avec les partenaires, et que, pour la directive nitrates, les contentieux ne portent pas sur la pression de contrôle. Ministère et Onema : confusion des rôles La Cour demande une clarification du positionnement de l’Onema et une plus grande autonomie vis-à-vis de son organisme de tutelle, le ministère de l’Ecologie et la direction de l’eau et de la biodiversité à laquelle il est rattaché. « La confusion des rôles de président du conseil d’administration et de responsable de la tutelle reflète l’ambiguïté du positionnement de l’organisme vis-à-vis du ministère », indique la Cour. Un projet de décret qui réforme la gouvernance est actuellement soumis à la consultation obligatoire des instances techniques de l’établissement. L’Onema a indiqué qu’elle renforcera la priorisation des projets, leur pilotage et leur suivi, en lien avec le ministère de tutelle et en particulier la direction de l’eau et de la biodiversité. Voir aussi notre article : L’Onema entre deux eaux - Jean-Luc Ciulkiewicz, secrétaire général de SNE-FSU