EGA : Macron promet de transformer le monde agricole, y compris la distribution
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Tout le monde l'attendait. Il est venu… et s'est exprimé durant près d'une heure et demie. Le discours d'Emmanuel Macron, à Rungis le 11 octobre, à mi-parcours des Etats généraux de l'alimentation, fut l'occasion d'un premier bilan et le support à de multiples annonces. Réduction des phytos, sortie du glyphosate, séparation du conseil et de la vente, expertise scientifique indépendante, modernisation des coopératives… Autant de pistes qui pourraient, à terme, bouleverser le métier des distributeurs. Leurs représentants restent pour l'heure dans l'expectative.
S'il fut beaucoup question de prix, de juste rémunération et de filières, le Président a également évoqué les transformations, en profondeur, qu'il souhaite initier au sein des modes de production. Dans l'ensemble, ses propositions furent plutôt bien accueillies par les syndicats et fédérations agricoles (cf autre papier dans cette lettre). Tous attendent de voir leur mise en œuvre, à commencer par le contenu d'une loi, promise pour 2018.
Séparer le conseil de la vente
Le Président de la République a ainsi rappelé sa volonté de séparer le conseil de la vente. « Sur beaucoup de produits phytosanitaires, il y a encore une vente liée qui fait que le conseil n'est pas indépendant et la loi séparera la vente du conseil », assure le Président. Ce volet devrait donc être intégré au projet de loi sur la transformation agricole qu'Emmanuel Macron compte mettre en oeuvre (cf autre papier dans cette lettre). Le projet de loi sera proposé et voté durant le premier semestre 2018. Les coopératives sont prêtes à s'engager sur ce chantier. « Reste à connaitre les modalités », précise Michel Prugue, président de Coop de France. « Cette séparation est possible, à condition qu'elle ne se fasse pas au détriment de la qualité et des exigences de nos clients », rappelle Jean-François Loiseau, président d'Axéréal et de l'atelier 4 des EGA, dédié à la reconquête des marchés à l'international.
Vers la sortie du glyphosate
De manière plus globale, le Président de la République souhaite réduire le recours aux produits phytosanitaires. Emmanuel Macron assure qu'il n'y aura pas d'impasse et qu'il soutiendra la recherche par un programme volontariste d'investissements pour trouver des alternatives. Il veut regarder « filière par filière comment on peut mieux doser » , et mettre en avant celles qui ont déjà engagé des efforts. En revanche, il ne reviendra pas sur l'arrêt du glyphosate. « Reporter à dix ans la problématique du glyphosate n'est pas une bonne idée parce que c'est prendre une responsabilité face à l'histoire », affirme le Président.
Une expertise indépendante
Pour dépassionner le débat sur la question plus générale des phytosanitaires, il compte instaurer des experts scientifiques indépendants. « Nous avons, sur tous ces sujets, subi ces dernières années trop de pressions, trop d'intérêts cachés et des expertises industrielles qui ne sont en rien des expertises scientifiques », accuse le Président. Avant de poursuivre : « Nous nous mettrons donc sur chacun de ces sujets en capacité d'avoir des experts indépendants sur le plan scientifique, c'est-à-dire des experts dont nous connaissons d'abord les connaissances académiques mais aussi l'indépendance financière par rapport aux pressions existantes ».
Transparence et modernisation prévue pour les coopératives
Tous ces engagements touchent directement la coopération agricole, qu'Emmanuel Macron a citée expressément dans son discours. « Nous devons nous engager dans sa modernisation, faciliter le départ des coopérateurs, rénover la gouvernance du Haut Conseil de la coopération agricole (HCCA) », déclare le Président. Il s'est montré en revanche plus critique sur la répartition de la valeur au sein des coopératives. « Nous devons inciter les coopératives à faire part de plus de transparence dans la redistribution de leurs gains aux producteurs », souligne-t-il. « Le modèle n'est peut-être pas parfait, mais il a le mérite de permettre aux agriculteurs de se regrouper », rétorque Michel Prugue, président de Coop de France. Lui comme Jean-François Loiseau font valoir les démarches déjà en place au sein de leurs entreprises et qui contribuent à plus de transparence comme par exemple les comptes certifiés par des commissaires aux comptes ou la révision de la coopération. Les échanges entre le gouvernement et le monde agricole devraient donc se poursuivre.