Référence agro

« Il faut un Green Deal, mais pas au dépend d’une sécurité alimentaire », Marc Fesneau

Le | Politique

Lors de son audition devant la Commission des affaires européennes du Sénat, le 19 décembre 2023, Marc Fesneau est revenu sur plusieurs sujets d’actualité européenne relatifs à l’agriculture. Parmi ceux-ci, le Green Deal, les nouvelles techniques génomiques et la future adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne. Le ministre chargé de l’agriculture a notamment insisté sur la nécessaire sécurité alimentaire.

« Il faut un Green Deal, mais pas au dépend d’une sécurité alimentaire », Marc Fesneau
« Il faut un Green Deal, mais pas au dépend d’une sécurité alimentaire », Marc Fesneau

« Le Green Deal a été posé, à l’époque, dans un cadre qui n’était pas celui dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui », a insisté Marc Fesneau, le 19 décembre 2023, lors d’une audition devant la Commission des affaires européennes du Sénat. Pour le ministre chargé de l’agriculture, les événements qui se sont déroulés depuis, à savoir le Covid, la guerre en Ukraine, les crises alimentaires et la mise en perspective de l’impact du dérèglement climatique sur la sécurité alimentaire, ont changé la donne.

Avoir des outils pour produire

Pour Marc Fesneau, l’Europe doit réinterroger sa politique dans ce nouveau cadre. Selon lui, l’Europe est en train de prendre le même chemin sur la question alimentaire que sur la question énergétique, si elle se prive des moyens de produire. « L’an dernier l’Europe a importé 20 Mt de céréales, cette année elle va en importer 40 Mt », a souligné le ministre devant les sénateurs. Et de préciser qu’il s’agit non seulement de nourrir la population européenne, mais également celles qui se situent à sa frontière, et notamment dans le bassin méditerranéen : « Ce n’est pas la même chose si c’est nous que si c’est les Russes. »

Marc Fesneau ne souhaite pas revenir sur le Green Deal et affiche la volonté de conserver la trajectoire de réduction d’utilisation des produits phytosanitaires, « mais pas au dépend d’une sécurité alimentaire ». Il faut selon lui, avant tout, se doter d’outils pour produire : alternatives aux produits phytosanitaires de synthèse, nouvelles techniques génomiques (NGT)… car contrairement aux États-Unis ou au Brésil, l’espace européen est limité et exige de conserver une forte productivité. Et les marchés agricoles ne sont pas « des marchés où nous venons imposer les règles au monde, a-t-il avancé. C’est la nécessité de nourrir qui impose ces règles. » Or si l’Europe réduit sa présence sur les marchés, d’autres prendront sa place : « Soit c’est nous, soit c’est d’autres », a insisté Marc Fesneau.

NGT, trouver un accord dans les six mois

Sur les NGT, Marc Fesneau a pour objectif de trouver un accord au niveau européen sous la présidence belge, dans les six mois. « On a encore une minorité de blocage sur le texte, allemande et plutôt des pays de l’Est, a-t-il noté, avant de préciser qu’il se rendra prochainement dans un certain nombre de pays européens qui sont aujourd’hui dubitatifs sur ces techniques. Car pour le ministre, ces NGT sont non seulement intéressantes pour la protection des cultures, mais également pour les questions de dérèglement climatique. « Il y a deux ou trois pays à aller chercher pour essayer de trouver une majorité », a-t-il conclu.

Ukraine, s’en faire une alliée

Interrogé sur la future adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne, Marc Fesneau a mis en avant la nécessité de faire de cette grande puissance agricole un véritable allié. Et ce, pour éviter que l’Ukraine « vienne sur nos marchés, avec des distorsions de concurrence ». Selon lui, avec l’Ukraine, l’UE peut devenir une puissance alimentaire. « Mais ça ne marche que si on le fait dans une logique de puissance collective », a-t-il souligné. Objectif : faire en sorte que « l’Ukraine vienne avec nous conquérir les marchés sur lesquels sont aujourd’hui les russes, les brésiliens… ».