Référence agro

La dynamique bio est mal encadrée, selon un rapport du Sénat

Le | Politique

Le Sénat publie, le 5 février, un rapport de contrôle budgétaire sur les financements publics consacrés au bio. Et le bilan proposé est pour le moins critique : à mi-parcours, le programme Ambition Bio 2022, dont l’un des objectifs est de convertir 15 % de la surface agricole française au bio, est en retard en raison de « faiblesses structurelles de l’agriculture biologique en France ».

15 % de la SAU en bio, pas avant 2026

Dans une première partie, le rapport de 285 pages relativise la dynamique actuelle des conversions. Si les surfaces AB progressent d’environ 1 % chaque année entre 2015 et 2018, pour atteindre 9,46 % de la SAU française, c’est de manière hétérogène. D’une filière à l’autre, et selon les régions, les chiffres peuvent grandement varier. La part en bio pour les légumes secs atteint les 40 %, contre 4 % pour les céréales. Derrière une filière laitière très « convertie », l’élevage français reste « encore médiocrement concerné », selon les rapporteurs. Résultat : face à une demande qui progresse, la France importe 30 % de ses aliments bio.

Pour les sénateurs, vu la tendance, « le projet Ambition bio 2022 devrait être rebaptisé Ambition bio (au mieux) 2026 ». Ils émettent, de plus, des réserves sur la manière dont le décompte des surfaces est réalisé, redoutent qu'une partie des conversions ne soit pas économiquement viables, et un certain désenchantement global autour du bio, aussi bien pour les producteurs, les opérateurs et les consommateurs.

Une action publique peu financée et mal organisée

Passé ce bilan du secteur, le rapport s’intéresse au rôle du politique dans l’encadrement de la filière. Là encore, le document s’avère particulièrement critique, fustigeant des budgets « saupoudrés dans des budgets épars », relevant de trop nombreux financeurs, une hétérogénéité selon les régions, et des barèmes d’aides inadaptés selon les filières (« parfois trop importants, parfois pas assez »). Revenant sur le plan Ambition 2022, les sénateurs estiment qu’il n’est « de fait, pas financé », le gouvernement s’étant contenté d’additionner des budgets déjà existants, comme le remarquaient des observateurs dès 2018. Une formule synthétise le constat des sénateurs : « La politique publique de développement de l’agriculture biologique a, jusqu’à présent, pu être conduite à petits coûts budgétaires car à grands prix de marché ».

Les rapporteurs invitent fortement le gouvernement à revoir sa copie, en harmonisant les dispositifs et « améliorant considérablement la chaîne de paiements des aides bio », qui a montré d’importantes défaillances ces dernières années. Autre recommandation : remise à plat du fonctionnement des instances publiques en lien avec la filière (Agence Bio, Itab, INAO, DGCCRF, etc.), pour mettre fin à une « logique d’empilement qui crée des besoins de coordination coûteux et mal couverts et peut conduire à déresponsabiliser les acteurs ».