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L’agriculture au cœur de la Convention citoyenne pour le climat

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Tirés au sort à la fin de l’été dernier, les 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat ont présenté, leurs 150 propositions à Emmanuel Macron, le 21 juin. Près d’un tiers d’entre elles concernent l’alimentation et l’agriculture, témoignant de l’importance prise par ces enjeux. Mais les acteurs de ces secteurs regrettent des mesures déconnectées des réalités du secteur.

L’agriculture au cœur de la Convention citoyenne pour le climat
L’agriculture au cœur de la Convention citoyenne pour le climat

L’agriculture a un rôle à jouer dans la transition de nos sociétés, les citoyens l’ont bien compris. En témoignent les résultats de plusieurs consultations, avec en dernier lieu, ceux de la Convention citoyenne pour le climat. Fruit de huit mois de travaux, les 150 propositions devant permettre de réduire d’au moins 40 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, par rapport à 1990, ont été transmises au Président de la République, Emmanuel Macron, le 21 juin. Près d’un tiers d’entre elles (43) concernent la thématique « Se nourrir », réparties en 14 objectifs distincts. 

Interdiction des pesticides toxiques en 2035 

De nombreuses mesures concernent directement le secteur agricole. Les membres de la Convention souhaitent ainsi que la moitié des exploitations suivent un modèle agroécologique en 2040, mais sans donner plus de détails sur ce que cela sous-entend. Conformément aux objectifs du Plan Écophyto II+, ils visent également la réduction de l’usage des pesticides de 50 % d’ici à 2025. Ils  vont plus loin en se prononçant pour l’interdiction des pesticides les plus toxiques en 2035, ce qui nécessiterait le développement d’alternatives, encore inexistantes aujourd’hui. Autre mesure présentée, celle de l’augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour les engrais azotés. Pour l’heure, toutes les initiatives dans ce sens ont par le passé été retoquées par l’Assemblée nationale et le Sénat. 

Agriculture biologique et protéagineux

La Convention souhaite également que soient inscrits dans la loi et le Plan stratégique national (déclinaison nationale de la future Pac) plusieurs points, tels que le développement de l’agriculture biologique, l’aide à la structuration de la filière protéagineuse pour atteindre notamment 100 % d’autonomie en protéines pour l’alimentation humaine, l’aide au maintien des prairies permanentes en rémunérant par exemple les services rendus par les agriculteurs, l’interdiction du financement d’implantation de nouveaux élevages « ne respectant pas les conditions d’agroécologie et de faibles émissions de gaz à effet de serre ». Là aussi, des précisions seront à apporter.

Mieux suivre la mise en œuvre de la loi Égalim

Par ailleurs, de nombreuses mesures concernent le secteur de la restauration collective. Les membres de la Convention se prononcent pour la création d’un « Observatoire de la restauration collective » pour suivre l’atteinte des objectifs Égalim, mais aussi d’un organisme de contrôle dédié à la surveillance de la bonne mise en œuvre de cette loi. Les Français tirés au sort souhaitent également que les mesures de la loi Égalim soient étendues à la restauration collective privée à partir de 2025, et que les 50 % produits sous labels et bio devant approvisionner les cantines d’ici au 1er janvier 2022 soient ouverts aux agriculteurs en transition vers le bio, et aux produits à faible coût environnemental. Les mesures poussent aussi pour une plus grande offre végétarienne. Enfin, la mise en cohérence du Plan stratégique national (PSN) avec les stratégies bas-carbone (SNBC), pour la biodiversité et de lutte contre la déforestation importée (SNDI), ainsi qu’avec lPlan national santé environnement fait aussi partie des propositions.

Rencontre avec Emmanuel Macron le 29 juin

Ces propositions ont suscité de nombreuses réactions. Du côté des ONG, ces mesures sont plutôt saluées. « Cette assemblée démontre qu’avec un travail de sensibilisation au défi climatique, la société est prête pour la transition ! », se réjouit ainsi FNE. Mais du côté du secteur agricole, ces annonces semblent être accueillies plus froidement. Pour Jean-Baptiste Moreau (LaREM), agriculteur et rapporteur de la loi Égalim, ces propositions témoignent d’une « vision déformée » de l’agriculture française, qui « doit certainement faire mieux », mais dont certaines mesures présentées menaceraient de « provoquer à coup sûr sa disparition pure et simple ». De nombreux autres agriculteurs sur les réseaux sociaux regrettent également le manque de connaissances des citoyens concernant le secteur agricole. L’absence de mise en avant des efforts faits par des agriculteurs, de la modernité du métier, ou des impasses techniques est largement regrettée. Par règlement, référendum ou via un vote du Parlement : Emmanuel Macron s’était engagé en janvier à reprendre « sans filtre » les propositions de la Convention. Mais rien n’est encore acté. Les 150 membres de la Convention seront reçus le 29 juin par le Président. Il devra alors faire connaître la manière dont il tiendra, ou non, compte de ces propositions.