Le projet de loi sur la biodiversité assoupli par les Sénateurs
Le | Politique
Au final, l’Assemblée nationale et le Sénat sont tombés d’accord sur 37 articles sur 103. Huit ont été supprimés. Il reste donc 58 articles à discuter lors de la Commission mixte paritaire, qui devrait être convoquée le 25 mai. Le texte sera ensuite présenté aux deux chambres. Si elles ne valident pas la nouvelle mouture, le projet repartira en troisième lecture.
Quels sont les changements apportés par cette deuxième lecture au Sénat ?
La gouvernance
Au niveau national, l’Agence française pour la biodiversité (AFB) voit ses missions de formation étendues aux enseignements supérieurs et agricoles.
Malgré l’avis défavorable du gouvernement et du rapporteur, les missions relatives à la biodiversité terrestre des Agences de l’eau ont été supprimées. Pour les sénateurs, cette extension aurait pour conséquence de réduire les capacités des structures à atteindre les objectifs fixés par la loi sur l’eau. Il sera donc du ressort de l’AFB, en lien avec les délégations territoriales, de traiter des missions de biodiversité terrestre.
Au niveau territorial, les sénateurs demandent la consultation du comité régional de la biodiversité lors de l’élaboration du schéma régional d’aménagement de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet).
Les comités de bassin retrouvent leurs trois collèges, et non quatre comme le prévoyait le texte avec la création d’un collège dédié aux usagers non économiques. Selon les sénateurs, une structure en quatre collèges créerait un déséquilibre entre les représentants, en réduisant fortement la représentation des usagers économiques dont les agriculteurs.
Pesticides
L’interdiction des néonicotinoïdes est supprimée . Les sénateurs ont voté pour des conditions de remplacement progressives des produits contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes, sans adopter de date butoir.
Les semences
Les sénateurs ont remis en cause la brevetabilité des gènes.
Les outils de la biodiversité
Les sénateurs estiment qu’il n’y a pas besoin d’un nouvel outil pour protéger la biodiversité et suppriment de ce fait leszones prioritaires pour la biodiversité.
Sur les obligations réelles environnementales, le texte prévoit que le propriétaire s’assure de l’accord préalable et écrit de tout preneur à bail. La durée maximale des obligations est fixée à 99 ans. L’obligation cesse si la contrepartie au contrat n’existe plus. L’amendement rétablit l’obligation de faire naître le dispositif par un acte « authentique, exonéré de droits » afin que ces obligations soient connues des propriétaires successifs. Afin de rendre l’outil plus attractif, les propriétaires ayant conclu une obligation réelle environnementale pourront être exonérés de la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Les sénateurs ont demandé un rapport au bout de deux ans du Gouvernement au Parlement sur la mise en œuvre du mécanisme.
L’article 36 quater est supprimé : il créait dans le code de l’urbanisme des espaces de continuités écologiques, sur la base des zones identifiées dans le cadre de la trame verte et bleue.
Compensation écologique
Autre suppression, celui de l’agrément pour les opérateurs de compensation, « afin de faciliter le développement du secteur. »
Lors d’un projet d’utilité publique, les mesures de compensation ne doivent ni par leur coût, ni par leur délai, être de nature à remettre en cause le projet. Les mesures compensatoires doivent se traduire par une obligation de résultats et être effectives durant toute la durée des atteintes.
L’huile de palme
La contribution additionnelle à la taxe spéciale sur les huiles végétales est supprimée, pour les huiles de palme, de palmiste et de coprah. Une telle taxe additionnelle présentant un risque élevé de non-conformité avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), indiquent les sénateurs. Ils estiment que la taxation des huiles trouverait mieux sa place dans une loi de finances.
Le préjudice écologique
Le Sénat a supprimé le principe de non-régression en matière d’environnement et d’une absence de perte nette de biodiversité. Le délai de prescription applicable aux actions en réparations est réduit de 30 à 10 ans. Elles sont limitées aux acteurs institutionnalisés. En cas d’impossibilité de réparation en nature, le Sénat donne comme alternative d’allouer les dommages et intérêts à AFB.
Les espèces nuisibles et à protéger
Les sénateurs demandent une évaluation des dommages agricoles et forestiers causés par les espèces animales protégées. L’État devrait prendre des mesures pour limiter ces dommages, voire indemniser les exploitants agricoles et forestiers lorsqu’ils remettent en cause l’activité économique. Ils citent le cas du Choucas des Tours ou de l’Oie Bernache Cravant en Bretagne et en Pays de la Loire, des grues cendrées en Champagne-Ardenne, ou encore des castors dans un certain nombre de régions.
La deuxième lecture a réintroduit l’article qui visait à améliorer la situation des espèces menacées dans des plans à élaborer avant le 1er janvier 2020. Cette version du texte prend en compte uniquement les espèces endémiques identifiées comme « en danger critique » et « en danger » dans la liste rouge nationale des espèces menacées, établie selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature.
Le Sénat rétablit la demande au Gouvernement d’un rapport sur l’opportunité de classer le frelon asiatique dans la catégorie des organismes nuisibles dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi.