Les chambres d’agriculture face à la loi sur la biodiversité
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Référence environnement : Comment les chambres d’agriculture seront représentées dans les instances de gouvernances de la biodiversité ?
Pascal Ferey : La création de l’Agence française de la biodiversité, AFB, va modifier la représentation des professionnels. En effet, toutes les structures qui travaillent sur la biodiversité vont rejoindre l’AFB. Par exemple, nous sommes actuellement très présents au sein du Comité national de la protection de la nature, le CNPN, notamment sur des expertises techniques. Lorsqu’il va intégrer l’AFB, nous allons perdre notre place au sein du Comité, comme toutes les autres structures, mais sans connaître la manière dont nous allons être représentés dans la future instance.
Au niveau des déclinaisons régionales, les chambres d’agriculture seront bien présentes. Un certains nombres de points seront fixés par décrets. Nous attendons d’en savoir plus sur le mode de gouvernance entre l’État et la Région ou encore le pouvoir de ces structures régionales, notamment sur la réglementation.
R.E. : Le projet de loi met en place des outils de gestion de la biodiversité. Qu’en pensez-vous ?
P.F. : Nous sommes opposés à la création des zones prioritaires pour la biodiversité. Cette mesure a été conçue afin de protéger le grand hamster d’Alsace. Il y a déjà assez de zonages et de mesures de protection. Celle-ci pourrait être injuste pour les agriculteurs et les propriétaires fonciers.
Les obligations réelles environnementales (ORE) ont pour objectif de protéger la biodiversité là où elle existe. Elles vont donc concerner les zones où la biodiversité est la mieux protégée, par exemple les sites Natura 2000. Pourquoi faudrait-il encore alourdir la réglementation sur ces territoires ? Et puis ce sera surtout l’élevage qui sera concerné. Par ailleurs, ces ORE feront diminuer drastiquement la valeur des terres agricoles. J’y vois une bonne manière pour la collectivité de s’approprier du foncier à moindre coût.
Quant à la compensation écologique, nous aurions voulu que les zones agricoles bénéficient de la même protection. C’est une double sanction pour les agriculteurs : d’une part, on ne protège pas les terres agricoles et d’autre part, elles pourraient servir à faire de la compensation écologique.
R.E. Que pensez-vous de l’interdiction des néonicotinoïdes ?
P.F. : Ce débat n’aurait pas dû avoir lieu dans le cadre du projet de loi sur la biodiversité. Si le gouvernement voulait se mettre à dos le monde agricole, c’était la meilleure manière de le faire. Alors que le sujet de la biodiversité est fondamental pour les exploitants. Pour l’heure, il n’y a pas de solutions alternatives efficaces aux néonicotinoïdes. La suppression envisagée a pour but de protéger les abeilles. Or, il y a des cultures qui ne sont pas concernées, comme le lin ou la betterave. Il faudrait différencier les filières.