Les micro-algues, peut-être notre carburant de demain
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__On connaissait le terme agrocarburant, il faudra s’habituer à celui d’algocarburant. Les micro-algues offrent un rendement en biocarburant 30 fois supérieur aux oléagineux, sans menacer l’environnement, ni concurrencer les cultures alimentaires.__ Le projet Shamash qui regroupe 9 laboratoires de recherche doit permettre à la France de rattraper son retard dans le domaine des algocarburants. J.P. Deux actualités récentes démontrent que les biodiesels à base d’algues ne sont pas seulement que des promesses de laboratoires. Le 30 décembre 2008, un avion de la compagnie américaine Continental Airlines a volé avec un mélange de 50 % de biocarburants issus de micro-algues et de 50 % kérosène. Le 17 mars, la compagnie californienne PetroAlgae a remporté mardi le prix « Sustainable Biofuels Technology Award » (technologies des biocarburants durables) dans la catégorie des fournisseurs de technologie, à l’occasion du World Biofuels Markets 2009, la manifestation la plus importante pour les professionnels de biocarburants qui s’est tenue à Bruxelles du 16 au 18 mars. La société lauréate en a profité pour démontrer la viabilité commerciale à court terme des algocarburants. « Nous avons atteint presque tous les objectifs que nous nous étions fixés, affirme John Scott, président de PetroAlgae. Nous n’avons jamais été aussi confiants en notre modèle d’entreprise et notre capacité à rivaliser avec les autres matières premières à base de biodiesel. D’ailleurs, nous nous attendons à ce que nos installations pilotes à l’échelle commerciale soient complètement opérationnelles d’ici les prochains mois ». Bénéfice énergétique et impact environnemental La possibilité de fabriquer du carburant à partir d’algues est très loin d’être une idée neuve. Cette possibilité a été reconnue et validée depuis 1996, date à laquelle le National Renewable Energies Laboratory (NREL), suite à une expérimentation de 18 ans, a remis ses conclusions sur ce sujet. L’organisation américaine a mené ses études sur le site de Salton Seas (Californie) entre 1978 et 1996. Ses conclusions ont été sans appel : avec un minimum d’investissement, les algues marines permettent d’envisager des rendements à l’hectare 30 fois supérieurs aux biocarburants issus de cultures terrestres. Autre bénéfice, celui-ci environnemental : en les couplant à une installation industrielle ou une station d’épuration, les micro-algues peuvent absorber le CO2, et se nourrir des rejets (azote, phosphate, nitrates) pour augmenter leur production de lipides. Les micro-algues pourraient ainsi servir de « piège à carbone » pour des centrales thermiques au charbon, comme c’est déjà le cas dans une installation aux Etats-Unis. D’autres pays, tels que le Japon, l’Allemagne, l’Espagne, le Royaume-Uni ou la Chine mènent des recherches dans le domaine. La France dans la course En France aussi, les micro-algues font l’objet de l’attention des chercheurs. Le projet Shamash, du nom d’une divinité babylonienne représentée par un soleil dans une roue (une métaphore du biocarburant), a démarré en décembre 2006. Son objectif est d’évaluer la faisabilité technico-économique d’une filière de production d’ester de méthyl à partir de micro-algues. Shamash regroupe 9 équipes et entreprises françaises pour un budget total de 2.8 Millions d’euros. Le Programme National de Recherche sur les Bioénergies (PNRB) de l’Agence Nationale de la Recheche (ANR) finance 0.8 Million d’euros. Le projet est coordonné par Olivier Bernard (Inria Sophia-Antipolis) et Jean-Paul Cadoret (Ifremer-Nantes). Depuis peu, la société Alpha Biotech, la première entreprise de production de micro-algues en France, installée au coeur des marais salants de Guérande, a rejoint le projet Shamash. La France est définitivement entrée dans la course aux carburants à partir d’algues.