Les soutiens publics « déterminants » dans les revenus agricoles
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Le revenu des agriculteurs est une notion difficile à caractériser. C’est ce que souligne une note de l’Inrae, réalisée dans le cadre d’un appel à projets du ministère de l’Agriculture. Le document insiste notamment sur l’éloignement croissant des exploitations du modèle classique de l’exploitation individuelle à deux travailleurs familiaux.
Afin de mieux connaître les principaux déterminants du revenu agricole et l’impact des politiques publiques sur son niveau, le Centre d’études et de prospective du ministère de l’Agriculture a lancé un appel à projets en 2018. Retenu dans ce cadre, le projet Agr’Income, piloté par l’UMR Smart-Lereco de l’Inrae, s’est attaché à l’analyse du niveau, de la composition et de l’évolution du revenu des agriculteurs français. Une note résumant les principaux enseignements de ces travaux a été publié le 20 août 2020. Elle souligne l’hétérogénéité des revenus agricoles, « selon l’activité, les soutiens publics et les sources de revenus non-agricoles ».
De nouvelles approches construites
Pour analyser les revenus agricoles, deux nouvelles approches ont été développées, en tenant compte par exemple des sources de revenus non agricoles des ménages ou en développant une typologie fonctionnelle des exploitations. Deux grilles de lectures en découlent. Selon la première, « qui cherche un compromis entre diversité et représentativité », 1,1 % des moyennes et grandes exploitations, soit 3070, « sont en 2017 à la fois hautement productives, fortement efficaces et faiblement dépendantes de l’endettement ». La même année, elles étaient 15 980 (5,6 %) à être, au contraire, « faiblement productives, faiblement efficaces et fortement dépendantes de l’endettement ».
Focus sur le secteur de l’élevage
Le document s’est également intéressé aux arbitrages entre rémunération immédiate et investissement sur le long terme. L’analyse s’est concentrée, dans un premier temps, sur les élevages français de ruminants. Ces derniers ont dû se restructurer pour répondre aux politiques publiques, perdant en chemin une partie de leur efficience technique. Le projet Agr’Income remarque que « la profitabilité des élevages a très peu évolué, souvent à la baisse, alors que les aides publiques ont fortement augmenté et que le prix d’achat des produits agricoles a fortement baissé ». Résultat : le surplus généré en bovins viande moyen et par exploitation découle en quasi-totalité des aides publiques. « Malgré les aides publiques, le revenu des éleveurs a stagné, captant seulement 1 % du surplus », souligne la note.
La Pac également prise en compte
Les effets de la Pac, et plus particulièrement celui du paiement redistributif (PR) du premier pilier, viennent compléter l’analyse. Le PR aurait un impact conséquent et le plafond d’attribution de ces aides constituerait « une variable de contrôle primordiale, jouant à la fois sur la sélection des gagnants et sur l’ampleur de leurs gains ». S’ils donnent des pistes de réflexion, ces travaux sont encore à approfondir. Ainsi, conclut le document, « aucune des sources actuellement disponibles n’est suffisante pour caractériser les différentes dimensions du revenu des agriculteurs. Elles le sont d’autant moins qu’avec le développement des formes sociétaires et la place accrue des revenus non agricoles, les exploitations s’écartent de plus en plus du type de l’exploitation individuelle à deux travailleurs familiaux. »