Loi biodiversité : « Tout n’est pas parfait, mais… », Geneviève Gaillard, rapporteure du texte
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« Fragile », « entre passable et insuffisante », « ambivalente »… Les termes utilisés par les intervenants, lors d’une conférence organisée le 22 mars par la Ligue pour les oiseaux (LPO), sont restés très mesurés. Il leur était demandé de qualifier le texte de loi sur la biodiversité transmis par l’Assemblée au Sénat, où il sera étudié à partir du 10 mai prochain. « Sentiments partagés » et « réels progrès » Rapporteure de la loi, la députée PS Geneviève Gaillard a elle-même admis être en proie à « des sentiments partagés. » Avant de défendre les efforts déployés autour du projet. « Tout n’est pas parfait, mais il y a dans cette loi de réels progrès », fait-elle valoir. Et de citer l’objectif visé de zéro perte nette de biodiversité, le maintien dans le texte de la solidarité écologique, des zones prioritaires pour la biodiversité et du concept de préjudice écologique. Geneviève Gaillard se réjouit aussi d’avoir porté une loi « globale », structurante, quand le dernier texte en la matière, en 1976, était focalisé sur des cas particuliers (espaces, espèces…). Compromis impératifs « Je préfère avancer, même peu, plutôt que de créer un blocage, explique l’élue. Dans le cas de l’huile de palme, par exemple, les montants des taxes avancés par le Sénat n’avaient aucune chance de faire consensus. Mieux vaut avoir une taxe drastiquement réduite, mais existante, que pas de taxe. On est clairement dans le compromis. » La taxe sur l’huile de palme a été divisée par dix entre le Sénat et l’Assemblée, de 300 à 30 euros la tonne en 2017, et de 900 à 90 euros la tonne en 2020. La députée a par ailleurs insisté, à plusieurs reprises, sur la difficulté de trouver ces compromis face à l’influence sur les assemblées de certains acteurs, citant notamment les chasseurs et les agriculteurs. Néonicotinoïdes : entre satisfaction et impatience L’ensemble des participants à la conférence a d’ailleurs salué le travail des rapporteurs, et leur recul sur le texte actuel. Y compris Serge Grouard, député LR représentant l’opposition. « Le texte n’est pas à la hauteur de l’urgence, mais il propose une progression », analyse-t-il, reconnaissant notamment du « courage » dans la décision d’interdire les néonicotinoïdes en 2018. Laurence Abeille, député EELV déplore de son côté que l’interdiction soit si lointaine. Et, tout en se félicitant de l’introduction du préjudice écologique au code civil, regrette que celui-ci ne soit pas adossé à des amendes dissuasives, en plus de la réparation. Semences paysannes et sol, les grands absents Certaines « lacunes » ont également été mises en avant. Bernard Chevassus-au-Louis, président d’Humanité et biodiversité, pointe du doigt l’absence du mot « sol » dans le texte. Jean-David Abel, vice-Président de France Nature Environnement, identifie un autre combat à mener : la facilitation de la libre circulation des semences paysannes, autre oubli de la loi selon lui. Les deux hommes se rejoignent ainsi pour parler d’une cartouche en partie gaspillée, ces thématiques ayant peu de chance d’intégrer la législation avant longtemps. En conclusion, Allain Bougrain-Dubourg, président de la LPO, a synthétisé l’ambiance générale en se disant « frustré, malgré les avancées ». Et a annoncé l’organisation prochaine d’une formation gratuite, à destination des parlementaires, sur la thématique biodiversité. « Trop de sottises sont encore proférées dans les hémicycles sur ce sujet, il y a là de quoi rédiger un véritable bêtisier », constate-t-il.