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Loi Egalim : dans l’attente des ordonnances

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Le projet de loi Egalim a été adopté par l’Assemblée nationale le 30 mai. Qu’il s’agisse de la séparation du conseil et de la vente des phytos, de la disparition des 3R ou du statut de coopérateur, au final, pour l’heure, peu de changement par rapport à la version actée en Commission des affaires économiques le 20 avril dernier. Mais rien n’est joué. Après le passage au Sénat prévu fin juin, restera l’étape capitale des ordonnances.

Les députés ont débattu des heures durant. Certains n’ont pas ménagé leurs efforts pour défendre leurs amendements. La plupart ont été retoqués. Dans les faits, personne ne sait encore dire comment le projet de loi Egalim, qui a été adopté par l’Assemblée nationale le 30 mai, va se traduire. Mais le ministre de l’Agriculture l’a promis : les « détails » seront traités dans le cadre de concertations pour rédiger les ordonnances. Or ce sont précisément ces détails qui, à moyen terme, impacteront le métier de distributeur. « Les échanges au sein des groupes de travail alimentant la feuille de route gouvernementale sur le plan phyto devraient nourrir le contenu des futures ordonnances, espère Damien Mathon, délégué général de la FNA. Nous avons demandé à participer aux trois groupes : sur le conseil et la formation, sur le biocontrôle et sur la protection des riverains. Les réunions n’ont pas débuté mais nous devrions être convoqués dans les prochains jours pour un premier échange ».

Séparation conseil et vente : tout reste à écrire

Les députés opposés à la séparation du conseil et de la vente des phytos ont tout essayé pour que le ministre fasse marche arrière. Mais rien n’y a fait. Les arguments n’ont pourtant pas manqué : incompatibilité avec les CEPP, surcoût pour les agriculteurs, mise à mal de la logique de filières, risque de développement de circuits détournés, délocalisation d’entreprises, crainte de séparations de façade, montée en puissance de sites de vente en lignes… Beaucoup ont critiqué le choix de l’ordonnance et donc l’absence de précisions pour voter la disposition. Stéphane Travert a de son côté rappelé le besoin de cette ordonnance pour prendre le temps nécessaire à la concertation avec l’ensemble des acteurs. Et de préciser qu’elle « permettra de mieux définir le conseil » et de déterminer l’articulation avec les CEPP, « qui doivent être compris comme une forme de formation continue ».

Une mission interministérielle planche sur les 3R

L’interdiction des remises, rabais et ristournes dans les contrats de vente des phytos (article 14 du texte) est maintenue, sans modification. Et ce, malgré de nombreux amendements visant la suppression de l’article, l’amoindrissement des mesures ou encore l’exclusion du champ d’application de l’interdiction des ventes horizontales conclues entre les industriels. Mais des modifications pourraient encore être apportées : Stéphane Travert a précisé qu’une mission interministérielle dédiée était en cours. Les conclusions de l’expertise, prévue pour fin juin, pourront conduire le Gouvernement à proposer un amendement.

Ordonnances aussi pour le statut de coopérateur

Comme nous l’évoquions déjà dans notre lettre de la semaine passée, les relations entre les sociétés coopératives agricoles et leurs associés coopérateurs seront elles aussi redéfinies au travers d’ordonnances.

La loi Egalim, c’est aussi…

Glyphosate  : les différents amendements visant l’inscription de son interdiction à compter de 2021 ont été rejetés, y compris celui du député LREM Matthieu Orphelin qui autorisait des dérogations jusqu’en 2023.

Néonicotinoïdes : l’extension de l’interdiction aux substances ayant des modes d’action identiques est maintenue. Nouveauté : la liste de ces modes d’actions sera précisée par décret.

Protection des riverains : le Gouvernement a déposé, comme il l’avait annoncé, un amendement visant à autoriser les préfets à prendre des mesures pour interdire ou encadrer l’utilisation des phytos à proximité des résidences régulièrement habitées, sans préciser de distance pour autant. Face à la levée de boucliers, le ministre chargé de l’Agriculture a retiré l’amendement, en précisant toutefois que le sujet sera travaillé, notamment dans la feuille de route sur les phytos.

Fonds d’indemnisation des victimes : les amendements déposés en vue de sa création ont été rejetés. Le Gouvernement persiste sur sa volonté de privilégier l’amélioration des tableaux des maladies professionnelles.

Biostimulants : réduction prévue des délais d’évaluation et simplification des conditions d’autorisation, comme pour les produits de biocontrôle.

Épandage aérien : l’autorisation d’expérimentations visant l’utilisation de drones pour la pulvérisation de produits sur des parcelles présentant une pente supérieure ou égale à 30 % n’est désormais utilisée que pour les spécialités autorisées en agriculture biologique. Jusque-là prévue pour la vigne, la disposition a été étendue à toutes les cultures.

20 % de bio en restauration collective : Les députés ont validé l’intégration de 20 % de produits biologiques dans la restauration collective d’ici à 2022. Cette part est englobée dans un autre objectif de 50 % de produits « durables », à même échéance. Les 30 % restants doivent bénéficier d’un signe d’identification de la qualité et de l’origine, ou d’une mention valorisante ou d’une démarche de valorisation des produits, comme la Haute valeur environnementale.

Affichage environnemental renforcé : Contre l’avis du Gouvernement, un amendement enrichi l’affichage environnemental des denrées alimentaires, à partir de 2023. Certaines catégories alimentaires devront comporter les mentions : nourri aux OGM, et le cas échéant, le mode d’élevage ; l’origine géographique pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale et le nombre de traitements par des produits phytosanitaires sur les fruits et légumes frais.