Mercosur : inquiétude sur les volumes de viande importés
Le | Politique
Alors qu’un rendez-vous entre les ministres du Mercosur, le commissaire européen à l’Agriculture, Phil Hogan et la commissaire au Commerce, Cecilia Malmström est prévu jeudi 27 juin à Bruxelles pour finaliser un accord commercial vieux de 20 ans, Jean-Pierre Fleury, président du groupe de travail viande bovine du Copa-Cogeca partage avec nous son inquiétude quant à l’augmentation du volume de viande bovine importé en Europe.
Reference-Appro : Un an après la pause liée aux élections brésiliennes, le Mercosur revient sur la table des négociations. Concernant la viande bovine, est-ce que les volumes ont changés ?
Jean-Pierre Fleury : À ce jour, il n’existe qu’une proposition écrite, celle d’un contingent de 70 000 tonnes, ce qui est déjà inadmissible. Tout le monde a entendu parler des 99 000 tonnes, mais qui l’a dit ? C’est écrit nulle part ! Mais le pire se cache ailleurs. Nous avons soulevé un point très inquiétant la semaine dernière auprès de la Commission européenne. En décortiquant les appels d’offre et la délivrance des certificats d’importation trimestriels, nous avons constaté qu’en moyenne les pays du Mercosur envoyaient 40 % de volume de viande supplémentaire hors contingent ! En bons commerciaux, ils font une moyenne entre le prix du contingent et celui du hors contingent. Et il faut dire qu’avec le cadeau royal des 7,5 % de droits de douane que nous leur offrons, ils peuvent se permettre d’envoyer 40 % de volume supplémentaire au prix fort. Ce qui fait par exemple que le Brésil envoie actuellement 80 % de volume hors contingent par trimestre.
R.A. : Comment expliquez-vous ces défaillances ?
J.-P.F : Parce que nous n’avons plus les moyens de nos ambitions et le business l’a bien compris ! C’est déjà tout un cirque pour rétablir le contrôle au Royaume-Uni avec le Brexit. Avec un contrôle qui reste à la charge du pays de départ, l’accord du Mercosur prépare le prochain scandale sanitaire de demain. La DG Sanco n’ose pas y retourner depuis la fraude à la salmonelle de l’année dernière : ils ne prévoient pas de contre-visite avant cet automne ! Cet accord va à l’encontre de toutes les injonctions que nous entendons, tous les jours, sur la qualité sanitaire, climatique, sur le bien-être animal, etc.
R.A : Reste-t-il des chances d’aménager ou de bloquer l’accord ?
J.-P.F : Nous ne pouvons que saluer l’initiative française [pour freiner l’accord] car c’est une évidence, mais pour quels résultats ? Tout ce qu’on signera en dehors du volume ne sera qu’un coup d’épée dans l’eau. La clause de sauvegarde ? L’Europe ne la déclenche jamais ! Nous attendons de voir ce que va faire le Parlement européen tout frais, si les actes vont être à la hauteur des annonces. Mais, surtout, la Commission n’a plus la légitimité pour sceller un tel accord. La réunion se tiendra le 27 juin, soit trois jours avant la fin du mandat de Juncker : signer le Mercosur serait un acte antidémocratique ! Quoiqu’il en soit, si cet accord est ratifié, on n’évitera pas une très grande explication avec les dirigeants…