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Néonicotinoïdes, Denormandie et Pompili soutiennent une dérogation pour les betteraves

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Le ministère de l’Agriculture va proposer à l’automne un texte permettant des dérogations pour l’usage de semences traitées par des néonicotinoïdes pour les betteraviers, confrontés à une hausse de la présence du virus de la jaunisse. Une décision, prise en concertation avec le ministère de la Transition écologique, qui ne fait pas l’unanimité.

Néonicotinoïdes, Denormandie et Pompili soutiennent une dérogation pour les betteraves
Néonicotinoïdes, Denormandie et Pompili soutiennent une dérogation pour les betteraves

Interdits depuis deux ans par la loi sur la biodiversité, les néonicotinoïdes pourraient faire leur retour dans les champs de betterave. Le ministère de l’Agriculture l’a annoncé le 6 août, dans le cadre d’un plan de soutien à la filière. Les betteraviers doivent en effet faire face à une crise jugée sans précédent, liée au développement du virus de la jaunisse transmis par les pucerons. « Cette crise crée le risque d’un abandon massif de la betterave en 2021 au profit d’autres cultures. Or la France est le premier producteur de sucre européen. Le secteur concerne 46 000 emplois dont 25 000 agriculteurs et 21 sucreries », a justifié le ministère de l’Agriculture.

Des dérogations possibles jusqu’en 2023

Si les producteurs français n’utilisent plus de néonicotinoïdes, certains de leurs concurrents européens ont recours aux dérogations prévues par l’article 53 du règlement 1107/2009.  Le ministère entend permettre aux betteraviers de l’Hexagone de bénéficier aussi de ce système. Il va proposer une modification législative cet automne autorisant, au moment des semis 2021, une dérogation de 120 jours pour les semences enrobées de produits phytosanitaires de la famille des néonicotinoïdes. Cette décision pourrait aussi être appliquée pour les deux campagnes suivantes, soit jusqu’en 2023. « Les betteraves ne produisent pas de fleurs avant la période de récolte, ce qui circonscrit l’impact de ces insecticides sur les insectes pollinisateurs », poursuit le ministère.

L’utilisation par pulvérisation de ces substances actives restent en revanche interdites. Par ailleurs, il ne sera pas possible de semer des cultures attractives pour les pollinisateurs après la récolte des betteraves afin de ne pas exposer ces insectes aux résidus éventuels de produits.

5 M€ pour les pratiques alternatives

Le plan de relance de la filière comprend également un soutien à la recherche sur les alternatives techniques, « qui a été insuffisante depuis le vote de la loi interdisant les néonicotinoïdes en 2016 », selon Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, qui s’exprimait sur Twitter. « C’est désormais la priorité », insiste-t-elle. Cinq millions d’euros supplémentaires seront mobilisables dès 2021 au profit de l’Institut technique de la betterave et de l’Inrae, promet les deux ministères. Une indemnisation d’une partie des pertes est également envisagée.

Un délégué interministériel à la filière betterave-sucre sera chargé du suivi du plan d’action. Une instance est également créée, co-présidée Barbara Pompili et Julien Denormandie, associant les organismes de recherche et les services concernés. La première réunion se tiendra à l’automne.

Un courrier au ministre le 17 août

Les réactions à ce retour des néonicotinoïdes sont nombreuses. La FNSEA salue ce plan d’action qui « va laisser du temps à la recherche d’aboutir ».  « L’interdiction anticipée des insecticides néonicotinoïdes, sans réelle solution alternative est une folie », insiste de son côté la filière maïs qui réclame également une voie dérogatoire pour lutter contre les mouches et les taupins.

Dans un courrier adressé le 17 août à Julien Denormandie, 18 structures (ONG et syndicats)* se sont déclarées scandalisées par la volonté du ministre d’accorder des dérogations, qui constituent « un recul important du gouvernement sur la question de ces insecticides ». Elles estiment que la mesure visant à interdire de planter des cultures à fleur après la culture de la betterave sera insuffisante pour protéger les abeilles, du fait notamment de la persistance des substances actives. Selon elles, la crise subie par la filière betterave relève davantage de la fin des quotas de sucre en 2017 et de la surproduction mondiale.

 

*Agir pour l’Environnement, Confédération Paysanne, Eau et rivières de Bretagne, Nature & Progrès, Générations Futures, Greenpeace, Les Amis de la Terre, LPO, Miramap, Mouvement de l’Agriculture BioDynamique, Nous voulons des Coquelicots, POLLINIS, Syndicat des Apiculteurs d’Occitanie, Syndicat national d’apiculture, Terre d’Abeilles, Union nationale des apiculteurs français, WECF France, WWF-France.