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Pastoralisme, un rapport dessine des évolutions possibles à horizon 2035

Le | Politique

Comment évoluera le pastoralisme au cours des quinze prochaines années ? C’est la question à laquelle a tenté de répondre une étude prospective, financée par le ministère de l’Agriculture. La prédation du loup était l’un des éléments de contexte prédominants, mais le changement climatique ou la politique européenne ont également été pris en compte. Sur la base d’une centaine d’hypothèses, trois scénarios prospectifs ressortent.

Pastoralisme, un rapport dessine des évolutions possibles à horizon 2035
Pastoralisme, un rapport dessine des évolutions possibles à horizon 2035

Estimée entre 1,6 et 1,8 million d’hectares, le pastoralisme couvre, en France, 6 % de la surface agricole utile (SAU). 40 000 élevages, soit un quart d’entre eux, utilisent des ressources pastorales. Pour mieux appréhender les potentielles évolutions du pastoralisme, dans un contexte où le loup exerce une forte pression sur les éleveurs, le ministère de l’Agriculture a financé, dans le cadre du PNA loup 2018-2019, une étude prospective à l’horizon 2035. Pour réaliser leur travail, les auteurs de l’étude, TerrOïko et Blézat Consulting, ont recensé 23 variables clés du pastoralisme, comme le changement climatique, la réglementation de protection du loup, l’attractivité des métiers, les nouvelles technologies ou la consommation de viande. Sur cette base, trois scénarios ont été élaborés. Ils offrent «  une vision volontairement contrastée voire caricaturale des futurs plausibles du pastoralisme », pour faciliter l’identification de « leviers d’actions et les recommandations pour l’avenir ». Selon le rapport, « il est donc attendu et prévisible que la réalité de l’évolution du pastoralisme en 2035 aura une dynamique majoritaire vers un de ces scénarios mais pourra aussi évoluer sur certains territoires vers les autres scénarios. »

L’avenir du pastoralisme lié à la transition écologique

De manière globale, « l’avenir souhaitable pour le pastoralisme semble se bâtir en tirant pleinement profit de la transition écologique de nos sociétés », résume le rapport. Cela se confirme dans les lignes du premier scénario, présenté comme le plus souhaitable ». Dans celui-ci, un pacte agroécologique est appelé de ses vœux par la société. La qualité prime sur la quantité chez les consommateurs : les produits issus du pastoralisme bénéficient de soutiens publics, découlant de la reconnaissance de ses bénéfices pour l’environnement. En ce qui concerne le loup, le niveau de viabilité se maintenant, l’autorisation des tirs sans condition préalable pour les éleveurs est mise en place tout en maintenant le soutien aux moyens de protection. « La société comprend la nécessité d’intensifier les interventions sur cette espèce car la prédation remet en cause les effets positifs du pastoralisme sur l’environnement et le bien-être animal. »  Le rapport souligne néanmoins le caractère « ambitieux » de ce scénario concernant la diminution de la prédation, compte tenu des tensions existants au sein du Groupe national Loup et l’absence de résultats sur des méthodes suscitant des comportements d’évitement de troupeaux par les meutes.

 Vers une gestion régionale de la prédation ?

Les deux autres scénarios se placent dans des contextes moins favorables, notamment liés à des budgets serrés. Dans le second, la gestion du loup est décentralisée et des guichets régionaux mis en place. Cela génère de fortes disparités, alors même que les populations de loup augmentent. Les zones les plus sujettes aux attaques sont peu à peu abandonnées. Dans celles où la prédation a été maîtrisée, le « développement des ENR a parfois permis de « clôturer » le foncier et assure une protection facilitée en faisant paître les troupeaux dans des parcs fixes », lié également à une moindre taille des troupeaux. Contrairement aux zones de montagne, qui bénéficient d’un fort soutien local, d’autres moins rentables.

La situation est d’autant plus critique dans le troisième scénario, où les aides Pac à la conversion agroécologique sont entamées. Les zones pastorales en pâtissent, forçant certains élevages à se tourner vers des systèmes plus intensifs. En 2035, 70  des élevages pastoraux ont disparu en 2035  ! Avec la disparition du pastoralisme, des investisseurs publics et privés rachètent de grosses unités foncières, pour y installer de larges parcs à moutons, d’où sont exclus les prédateurs, ou des troupeaux de type « ranching », où le volume compense les pertes liées à la prédation.

Les populations d’éleveurs difficilement stabilisées

Aucun des scénarios ne préfigure une reprise à la hausse du nombre d’éleveurs pastoraux. Tout au mieux celui-ci est stabilisé dans le premier cas de figure. Par ailleurs, le rapport insiste sur le rôle que pourrait jouer plusieurs facteurs, appelés « signaux faibles », dont « on ne peut évaluer s’ils gagneront de l’ampleur au cours de la période prospective 2020-2035, mais dont l’influence sur l’évolution des scénarios peut être significative ». Par exemple le retournement de l’opinion publique contre le loup suite à une attaque par exemple ou la propagation de zoonose. Si le pastoralisme est à la croisée des chemins de nombreuses aspirations sociétales actuelles, les défis à relever sont nombreux, tout comme les points de vigilance cités par le rapport. Notamment, la sécurisation du foncier pastoral « stratégique dans un contexte de concurrence des usages et de changement climatique », ou encore la cohabitation avec le loup qui peut nuire à la bonne image dont bénéficie le pastoralisme, et donc les évolutions demeurent assez incertaines, tout comme la faisabilité technique de méthodes d’intervention et de protection plus efficaces.