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Rapport IPBES sur la biodiversité, l’agriculture suscite des réactions

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Fruit d’un travail long de trois ans, le rapport de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), sur l’état de la biodiversité, dresse un constat sans appel. Un million d’espèces animales et végétales seraient menacées d’extinction, pour certaines dans les prochaines décennies. En réaction à ce bilan, le président de la République a annoncé des mesures en faveur de la biodiversité. Et le gouvernement a signé la Charte de Metz, lors du G7 environnement, présidé par la France et qui se tenait les 5 et 6 mai.

« À l’IPBES, les scientifiques nous ont alertés. Nous avons intégré leurs recommandations en signant une charte pour la biodiversité. Nous voulons montrer que tout est lié, que la nature et le climat ne sont pas deux choses différentes », a réagi Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique. Le Comité national de la biodiversité salue le travail mené par l’IPBES. Il demande, dans un communiqué du 7 mai, que les décideurs publics et privés y « répondent avec célérité et ambition ».

 Pour les associations environnementales, « l’heure n’est plus aux demi-mesures »

Des déclarations qui n’ont que peu convaincu les associations environnementales, en attente de mesures franches et contraignantes de la part du gouvernement. Notamment au niveau de l’agriculture. Dans un communiqué du 6 mai, plusieurs d’entre elles (1) plaident pour que la France s’engage « dans une transition agroécologique en conditionnant systématiquement tous les financements nationaux ou européens à l’agriculture ». Plus précisément, elles demandent au Gouvernement de peser sur les négociations de la Politique agricole commune pour que les aides soient attribuées en fonction des services réels rendus à l’environnement et à sa protection ».

Le WWF France attend une réduction de la dépendance aux importations de soja pour l’alimentation animale et la fin de l’usage d’huile de palme et de soja dans les agrocarburants. « L’utilisation de pesticides étant l’une des causes majeures du déclin de la biodiversité en France, WWF France réclame que les moyens soient enfin mis pour atteindre les objectifs du plan Écophyto (-50 % de pesticides en 2025) », indique l’ONG.

Des actions « connues à renforcer »

Les revendications sont du même ordre chez France nature environnement (FNE), qui souhaite que la France se dote « d’une ambitieuse stratégie interministérielle ». « L’inaction coûterait demain beaucoup plus cher que la mise en place dès aujourd’hui de politiques ambitieuses », déclare Michel Dubromel, son président. Pour sa part, Greenpeace en appelle à une réduction de moitié, au niveau mondial, de la consommation et la production de viande. « Toute augmentation de surface agricole pour la production de nourriture animale pour l’élevage industriel est un facteur clé du changement d’affectation des sols qui aggrave la déforestation et la destruction des habitats naturel », précise l’association.

Des attentes globalement partagées jusque dans les rangs politiques. Pour Matthieu Orphelin, député de Maine-et-Loire, « les actions sont connues et doivent être urgemment renforcées : agriculture plus durable et sans pesticides, lutte (réelle) contre l’artificialisation des sols sur notre territoire, lutte contre la déforestation importée, préservation des océans et lutte contre la surpêche. »

 « L’agriculture peut-être la solution »

Au cœur des diverses propositions d’actions, le secteur agricole veut aussi témoigner de son engagement et des solutions qu’il porte. « L’agriculture peut être la solution face à la chute de la biodiversité et les agriculteurs en ont déjà pris conscience car ce sont les premiers impactés », a plaidé, au micro de France Info le 6 mai, Jean-Baptiste Moreau, député LREM et rapporteur de la loi Égalim. Ce dernier formule le souhait d’un allègement de la fiscalité « sur les productions agricoles vertueuses d’un point de vue environnemental ». Une position partagée par l’interprofession de la viande et du bétail (Interbev), qui souligne les bienfaits du modèle d’élevage herbivore français et des 13 millions d’hectares de prairies présentes sur un cinquième du territoire français. « Ces prés, entourés généralement de haies, offrent des habitats refuges pour la biodiversité tout en préservant la qualité de l’eau et des sols », précise la structure, qui rappelle les capacités de stockage de carbone dans les sols de la prairie.

S’exprimant au lendemain de la présentation du rapport, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) est plus mesurée. Elle estime que le document, établi avec des données mondiales, n’est pas représentatif de l’agriculture française. « Les agriculteurs sont en recherche permanente de solutions. Ils s’adaptent aux nouveaux défis environnementaux et sont force de proposition depuis de nombreuses années », souligne ainsi le syndicat.

(1) LPO, Humanité et Biodiversité, Aspas, SNPN, ANPCEN et Surfrider