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Région Nouvelle-Aquitaine : préconisations de la MIE sur la politique agricole et alimentaire

Le | Politique

La mission d’information et d’évaluation (MIE) relative à la politique agricole et alimentaire de la Région Nouvelle-Aquitaine a été présentée, le 23 septembre 2024, lors d’une séance plénière du conseil régional consacrée à la politique agricole.

La MIE relative à la politique agricole et alimentaire de la Région Nouvelle-Aquitaine a été présent - © D.R.
La MIE relative à la politique agricole et alimentaire de la Région Nouvelle-Aquitaine a été présent - © D.R.

Lancer un appel à manifestation d’intérêt (AMI) sur l’agroécologie, engager des projets alimentaires territoriaux (PAT) « territoires en précarité alimentaire », poursuivre le soutien aux biocontrôles ou encore la mise en place de clauses miroirs à l’échelle européenne, telles sont certaines préconisations formulées par la mission d’information et d’évaluation (MIE) relative à la politique agricole et alimentaire de la Région Nouvelle-Aquitaine, et présentées le 23 septembre 2024 lors d’une séance plénière du conseil régional consacrée à la politique agricole.

La MIE s’est déroulée entre avril et septembre 2024, à l’initiative des conseillers régionaux de l’opposition, à savoir les élus des groupes Les Républicains et Centre et Indépendants. Elle était composée de 25 conseillers régionaux, avec pour président Pascal Coste (LR), également président du conseil départemental de la Corrèze, conseiller régional du groupe Les Républicains. Lydia Héraud (PS), présidente de la communauté des communes de l’Estuaire, conseillère régionale déléguée en charge de la viticulture et de VitiREV, en était la rapporteure.

Cette mission avait pour objet d’évaluer « les aides attribuées aux agriculteurs, les dotations aux nouveaux et jeunes agriculteurs, à l’installation, à l’accompagnement vers les transitions, à l’innovation, aux subventions pour lutter contre le changement climatique, ainsi que les répercussions et les résultats chiffrés des éco-socio-conditionnalités et des différentes feuilles de route, pactes et règlements d’intervention ».

Les préconisations de portée régionale

Agroécologie

  • « Expérimenter l’agroécologie sur des territoires néo-aquitains à capacité d’exemplarité et d’entrainement :

    • Lancer un AMI sur l’agroécologie pour accompagner des territoires “moteurs” et tendre à la reconnaissance et une définition permettant la normalisation de l’agroécologie ;

  • Intégrer à cette démarche un groupe de travail pour l’appui aux Paiements pour Services Environnementaux. »

Renouvellement générationnel

  • « Dotation Nouveaux et Jeunes Agriculteurs (DNJA) :

    • Réaliser un bilan à mi-parcours de la DNJA pour étudier des adaptations, à partir des travaux de l’observatoire ;
    • Reposer le cadre des consultations départementales avec les chambres et les syndicats agricoles (homogénéité, transparence et équité) ; Proposer la levée de l’anonymat si le porteur de projet ne s’y oppose pas ;
    • Ajouter une tranche supplémentaire (liée au coût de la reprise de l’exploitation) sur le volet investissement de la DNJA.

  • Attractivité :

    • Développer une communication positive sur le métier d’agriculteur ;
    • Aider le développement des espaces tests permettant de minimiser les risques et accroître les réussites dans les installations ;
    • Favoriser la Formation Tout au Long de la Vie ;
    • Appuyer la transition par la formation professionnelle ;
    • Développer des formations dans le service public de l’enseignement agricole : agronomie, gestion d’entreprise… ;
    • Investir pour accompagner la transition dans les exploitations des lycées agricoles ;
    • Étudier l’opportunité d’une extension du dispositif Plan d’action en faveur de l’entreprenariat des femmes (PAREF) à l’agriculture et veiller à l’égalité d’accès pour les femmes et les hommes.

  • Transmission :

    • Lancer une réflexion multi-partenariale pour mieux accompagner les agriculteurs dans la préparation de la transmission (dès 50 ans) ;
    • Renforcer les partenariats avec la Safer et Terre de Liens ;
    • Engager une réflexion sur les outils d’ingénierie financière et de portage foncier, notamment dans le cadre des transmissions. »

Hydraulique - refonte et assouplissement des dispositifs existants

« La MIE recommande deux principaux aménagements, conciliant production agricole et préservation des milieux aquatiques dans le contexte très marqué de changement climatique, et visant le maintien d’une agriculture de qualité, diversifiée et compétitive :

  • Simplifier considérablement l’accès aux aides, en cohérence avec le principe de partage de l’eau comme “commun”, pour les projets collectifs d’amélioration des réseaux, en priorité en portage public (y compris les Associations syndicales autorisées, ASA) : projets qui permettent par nature une réduction de la consommation d’eau ou de la consommation énergétique ;

    • Revoir les modalités de soutien aux projets de développement des infrastructures individuelles et collectives avec prélèvement dans les zones où les masses d’eau sont en bon état ou sans prélèvement (par ex : réserves d’eau, retenues collinaires, réhausse d’ouvrages existants, stockage eau de pluie…). »

  • « De plus, et en complément, le taux d’aide serait bonifié si l’agriculteur s’engage dans un contrat d’accompagnement à la transition agroécologique proposé par la Région (et travaillé en Commission), s’appuyant à la fois sur un volet agronomique (pour l’adaptation au changement climatique) et un volet réduction des produits phytosanitaires. Ce contrat pourrait inclure un volet collectif (échanges, mutualisations…).Deux recommandations sont proposées sur cette même thématique :

    • Encourager le processus d’études de type HMUC (Hydrologie, Milieux, Usages, Climat) (ou équivalent) afin d’objectiver les enjeux de quantité et qualité de l’eau par territoires, et favoriser le dialogue au plus près du terrain, pour les projets structurants par territoires, hors financement Région ;
    • Dans le cadre du Plan végétal pour l’Environnement (PVE), étudier les modalités d’accompagnement des agriculteurs pour faciliter l’acquisition de matériel d’optimisation des apports en eau. Enfin, la Mission préconise une mise en œuvre effective des recommandations relatives à l’hydraulique dès le prochain appel à projets, y compris en termes d’adéquation des moyens budgétaires avec la stratégie. »

    Alimentation

    • « Poursuivre le déploiement du Pacte alimentaire ;
    • Appuyer la plate-forme Acena pour favoriser l’approvisionnement local, bio et de qualité dans les cantines des établissements scolaires ;
    • Favoriser les partenariats Acena avec Ehpad, ESMS, les hôpitaux…
    • Poursuivre le soutien aux circuits courts et circuits alimentaires locaux et la transformation/commercialisation par les agriculteurs notamment regroupés en collectifs ;
    • Pour les territoires affichant une plus grande vulnérabilité, engager des PAT “territoires en précarité alimentaire' (exemple : aide bonifiée, mise en réseaux avec des association d’aide alimentaire…) ;
    • Poursuivre le soutien aux expérimentations de type 'sécurité sociale de l’alimentation”. »

    Pack Transition

    • « La Région propose un Pack Transition qui s’appuie sur des feuilles de route structurantes et reconnues et sur le financement d’actions collectives à travers des contrats d’objectifs régionaux ou l’accompagnement collectif de la transition agricole (animation, appui technique, expérimentation, diffusion de connaissances, projets partenariaux d’innovation, Partenariats européens pour l’innovation…) ;

      • Agriculture biologique :

        • Réaffirmer le soutien à la bio (3,5 M€ sur les 9,7 M€ totaux consacrés à l’accompagnement collectif de la transition).
        • Préserver les aides individuelles aux agriculteurs bio confortées par des incitations propres (bonification, critères d’éligibilité et de sélection), du levier de la restauration collective scolaire avec les objectifs d’introduction de produits bio et locaux dans les cantines, et enfin du soutien aux exploitations post conversion bio à travers le conseil par exemple ;

      • Massification de la transition :

        • La transition passe par d’autres types d’agricultures et la MIE recommande d’accentuer les efforts de massification (avec les Chambres, les coopératives, les Civam…).  »

Santé / sanitaire

  • Soutenir la création de l’École vétérinaire de Limoges et encourager la présence vétérinaires en milieu rural, en lien avec les autorités compétentes ;
  • Poursuivre le soutien à la recherche et à l’expérimentation de solutions alternatives aux pesticides, ainsi que la diffusion et la massification des solutions éprouvées ;
  • Poursuivre le soutien aux biocontrôles ;
  • Développer une communication positive sur le lien entre agroécologie et santé. Il s’agit d’adopter une approche pédagogique ;
  • Intégrer dans le Plan Régional Santé Environnement, la prévention santé et sanitaire sur l’impact des pesticides (cf. Ordonnance verte) ;
  • Soutenir, faire connaître et mettre en synergie les initiatives existantes pour la santé mentale des agriculteurs (MSA, Solidarité Paysans…) ;
  • Proposer une évaluation de la cohérence interne des politiques régionales en matière de santé-biodiversité, en transversalité aux politiques régionales.

Filière élevage

  • Faciliter l’accès au Plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE) :

    • Soutenir les filières de qualité, accroître les moyens du PCAE-PME pour toutes les filières en assurant le financement de tous les projets répondant aux priorités régionalesen augmentant les plafonds et en baissant les planchers  ;
    • Lancer une réflexion pour accompagner les projets à haut besoin d’investissement, pour lesquels le PCAE-PME n’est pas adapté, à travers une programmation annuelle discutée avec les filières, recherchant la mobilisation d’outils d’ingénierie financière et qui s’inscrivent dans une démarche de contractualisation de l’amont à l’aval de la filière.

  • Abattoirs de proximité :

    • Soutenir les abattoirs de proximité dans le cadre de la stratégie régionale portée par la DRAAF.

  • Polyculture-élevage et prairies :

    • Élaborer un Plan régional de polyculture élevage et des prairies favorisant notamment les filières de qualité.

  • Haute valeur naturelle (HVN) :

    • Lancer un groupe de travail pour mieux connaître le HVN et préciser les modalités de labélisation (collectif et/ou individuel).

      Calendrier : lancement du groupe de travail post-MIE, mise en place en 2025.

Salariat agricole

  • « Mieux connaître l’emploi agricole, observer les tendances et signaux pour mieux anticiper et accompagner ses mutations, en particulier concernant le salariat agricole ;
  • Dans le cadre du contrat régional de filière des métiers de la production agricole, programmer des travaux spécifiques aux groupements d’employeurs, pour répondre aux enjeux de développement et de valorisations des compétences managériales chez les employeurs et les salariés encadrants inscrits. »

Simplification

  • « Poursuivre la coordination et outiller le Service de Relation aux Usagers, porte d’entrée de la Région, pour aiguiller les porteurs de projets ;
  • Mettre en place un comité de pilotage (COPIL) Simplification ouvert aux principaux partenaires et têtes de réseaux ;
  • Mettre en place un baromètre annuel des délais de paiements. »

Les préconisations de portée nationale et européenne

Recommandations à l’État dans le cadre de la prochaine réforme de la PAC

  • « Favoriser le maintien de l’élevage dans les territoires ;
  • Clarifier la réglementation régissant les aides à l’irrigation ;
  • Favoriser la recherche sur l’agriculture de conservation des sols et sa labellisation au niveau national, voire européen ;
  • Accroître encore l’effort de recherche sur toutes les pratiques et technologies permettant la réduction de réduction des intrants. »

Recommandations relatives à l’organisation française et dans la perspective éventuelle d’une loi d’orientation

  • « Faire connaître et valoriser les fonctions de collaborateurs en exploitation agricole ;
  • Dans le cadre du régime de l’installation, réaffirmer le rôle des Régions dans la politique d’installation et par exemple leur permettre de faire connaître le plus tôt possible aux porteurs de projets d’installation agricole les solutions proposées par les Coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA) ;
  • Mettre en œuvre un fonds de garantie à l’image d’Alter’NA à même d’accompagner les investissements d’exploitants changeant de pratiques agricoles ;
  • Rendre incitatif fiscalement le démantèlement de grosses exploitations dans le cadre d’un projet d’installation et dans celui de confortement des petites exploitations. »

Recommandations relatives à l’application aux principes de simplification administrative et de réduction des normes

  • Simplification administrative :

    • « La Mission préconise un travail en collaboration, associant l’État et les services de la Région. Il s’agirait de mettre en place le “dites-le nous une fois” au niveau régional dans le domaine de la politique agricole et alimentaire. Une mission-flash, sous forme d’expérimentation pourrait être lancée dans l’objectif d’identifier des chantiers de court terme, porteurs d’avancées visibles, et des chantiers plus structurants de moyen terme. »

    • Limitation des surtranspositions de directives européennes :

      • « PAC, règles BCAE 8 : la luzerne et les légumineuses semées en pure sont classées dans les cultures et pas en prairie, ce qui pénalise les éleveurs (75 % de la surface agricole utile en prairie pour les exemptions) qui répondent à la politique d’implantation et de production de protéines. La Mission demande donc un changement de classification de la luzerne et des légumineuses, en cohérence avec les objectifs de décarbonation et d’accompagnement des transitions agricoles.
      • Dans le cadre de la PAC, la France fixe une période unique pour chaque département concernant la date de présence des Surfaces d’Intérêt Écologique (SIE) cultures dérobées, alors que la réglementation européenne permet que cette période soit individuelle. »

  • Recommandations adoptées à la majorité de tous les groupes à l’exception du groupe écologiste, qui s’abstient.

    • Mettre en place des clauses miroirs.
    • Calendrier de paiement des aides : La Mission demande le respect des délais de paiement. Ceci implique l’engagement de l’État à verser les crédits à l’Agence de services et de paiement (ASP) dans les délais impartis.

    Points plus particuliers

    • Domaine de la santé animale :

      • Repenser globalement la santé animale dans le cadre de la santé globale (One Health) et accompagner les projets de territoire qui vont dans ce sens, comme le projet d’école vétérinaire de Limoges ;
      • Faciliter l’obtention d’autorisations de mise sur le marché aux médicaments qui traitent les affections des petites filières “orphelines”.

    • Domaine du développement :

      • Évaluer la politique de massification de l’agroécologie à travers les Groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE) ;
      • Définir un cadre d’intervention des Chambres d’agriculture qui permettrait aux collectivités de contractualiser avec elles dans une obligation de résultat quant à la massification de l’agroécologie.