Réglementation bio européenne : les discussions s’accélèrent
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Les discussions avancent sur l’évolution de la législation en agriculture biologique. La présidence du Conseil de l’Union européenne passera à Malte en janvier 2017, un État peu concerné par la thématique de l’agriculture biologique. Les parties prenantes du trilogue - Conseil des ministres, la Commission et le Parlement européens - visent donc un aboutissement d’ici à la fin 2016. Dans ce cas de figure, son application pourrait débuter à la mi-2017, et plus probablement en janvier 2018. Où en sont les débats ? Le point avec Fiona Marty, en charge des affaires européennes à la Fédération nationale de l’agriculture biologique, Fnab,
La mixité des exploitations, rapidement validée
C’est un des points qui a abouti à un consensus rapide. Les exploitations ont actuellement la possibilité de développer des activités bio et conventionnelle en parallèle. Ce droit est maintenu.
- Fiona Marty : « La Fnab aurait souhaité que des conditions soient introduites. Par exemple, autoriser la mixité, mais donner dix ans aux exploitations pour passer en tout bio. »
La certification collective en bonne voie
L’idée : permettre une certification bio collective pour les exploitations les plus modestes. Si le dossier n’est pas complètement abouti, cette piste est en bonne voie de validation.
- Fiona Marty : « Cette pratique permettrait de diviser le tarif de certification pour les petites exploitations, la Fnab y est favorable. »
Lien avec le sol : un cas par cas envisagé
Certains États membres du nord de l’Europe demandent la possibilité de certifier en bio des productions hors-sol, pour pouvoir produire y compris quand leurs terres sont gelées. Les représentants du Parlement suggèrent une approche au cas par cas, en laissant cette autorisation uniquement aux Pays nordiques. Pour le moment, le sujet est loin d’être tranché.
- Fiona Marty : « Pour la Fnab, le lien au sol est indissociable de la bio. Y renoncer serait prendre le risque de discréditer l’ensemble de la certification. Un écart peut être toléré par dérogation pour les pays nordiques, qui ont déjà mis en place cette pratique et dont les produits sont essentiellement consommés sur place, mais pas pour de nouvelles fermes ni généralisé pour les pays exportateurs, comme l’Espagne ou les Pays-Bas. »
Des contrôles maintenus tous les ans, sauf si…
C’est l’un des dossiers majeurs du trilogue. Faut-il maintenir le contrôle des opérateurs bio tous les ans, ou l’assouplir pour un protocole plus léger, moins couteux et fondé sur une analyse de risque ? Le trilogue a abouti à un consensus : un contrôle tous les douze mois reste la règle, que les États membres peuvent toutefois élargir à 24 mois maximum à leur gré pour les opérateurs « à faible risque. »
- Fiona Marty : « Le contrôle annuel est un des piliers de la confiance des consommateurs envers l’agriculture biologique. La notion d’opérateur à faible risque n’est pas spécifiée, et donc laissée à la seule appréciation des Etats membres. Cette issue aux négociations n’est donc pas satisfaisante, car elle va à l’encontre de l’idée d’harmonisation recherchée. Le risque est d’entamer la confiance des consommateurs dans la bio. »
Bras de fer autour du déclassement des produits présentant des pesticides
La Commission aborde la bio avec une approche « produit », qui la pousse à prôner le déclassement des productions au dessus d’un certain seuil de pesticides détectés. Le Parlement et le Conseil sont contre, défendant l’idée selon laquelle les producteurs pourraient être pénalisés si la contamination n’est pas de leur fait. Sur ce point polémique, l’accord est encore loin d’être trouvé.
- Fiona Marty : « La Fnab rappelle que l’agriculture biologique est avant tout une obligation de moyen mais n’est pas contre l’idée de seuil de déclassement. Elle refuse cependant que les producteurs qui font bien leur travail puisse être pénalisés. En cas de contamination fortuite, il est possible d’envisager de déclasser les produits le cas échéants, pour une plus grande transparence vis-à-vis du consommateur. Dans ce cas, l’agriculteur doit être dédommagé, par exemple sur les fonds d’une taxe sur les pesticides. »
La fin des autorisations de semences conventionnelles, pas encore actée
La Commission souhaite mettre fin aux dérogations pour l’utilisation de semences conventionnelles en bio. Un certain nombre d’acteurs des filières y sont favorables. Les négociations sont en cours.
- Fiona Marty : « La Fnab souhaite évidemment aller dans le sens du « tout semence bio », mais il est sans doute trop tôt pour approvisionner l’ensemble de l’agriculture bio, faute de fournisseurs suffisamment nombreux. »