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Semences et brevetabilité : juste équilibre à trouver

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Où  fixer les limites de la brevetabilité du vivant : conserver la dynamique de la recherche tout en préservant la propriété industrielle ? Cet enjeu, fondé sur la recherche du juste équilibre, a été le thème central du colloque organisé le 29 avril au CESE (Conseil économique, social et environnemental) par le Haut Conseil des biotechnologies (photo). Pour Claude Tabel, président du directoire de RAGT,  « les gènes ne doivent pas être brevetés. Le brevet, contrairement au COV, bloque toute utilisation commerciale. Manipuler une variété pour l'améliorer en lui soustrayant ses gènes brevetés est économiquement impossible. »

Le Certificat d'obtention végétale (COV), en vigueur en France, permet un accès libre à toute variété inscrite dans le but de l'améliorer et une rémunération de l'obtenteur. De même, la Convention sur le brevet européen (CBE) exclut les variétés végétales de la brevetabilité. Toutefois, la montée en puissance des biotechnologies, permettant notamment le décryptage du génome des plantes, se traduit par des dépôts de brevets sur les gènes qui risquent fort de confisquer à terme l'accès libre à la génétique.

Pour Philippe Moreau, président de la Commission propriété industrielle à l'UFS (Union française des semenciers), une clarification  réglementaire est nécessaire. Pas forcément en révisant la directive 98-44 sur la protection des biotechnologies, mais en la précisant mieux par rapport à cet enjeu. « Il faut un système de protection fort pour préserver l'innovation et permettre un juste retour sur les investissement, mais qui reste ouvert. Celui fondé sur le principe du sui generis a fait ses preuves. »


La question des brevets n'est pas sur l'agenda de la Commission


François Arbaut, chef de l'unité de la propriété industrielle au sein de la Commission européenne, a souligné que l'objectif de la directive sur les biotechnologies est de développer l'innovation, ajoutant que sa révision n'est pas à l'agenda. « En revanche, a-t-il insisté, un comité d'experts est consulté pour dresser un état des lieux des évolutions techniques et juridiques afin de mieux appréhender le secteur, le dernier rapport datant de 2005. » Sven Bostyn, maître de conférence en droit de la propriété intellectuelle et membre de ce comité, a expliqué que les analyses ne seront pas remises avant au moins un an à la Commission, laquelle rédigera ensuite ses propres conclusions.

Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, a rappelé en conclusion du colloque son attachement au système de COV et souligné que la résolution du Sénat déposée le 11 décembre 2013 pose les axes à suivre : « Nous avons été mobilisés pour que le brevet unitaire européen exclut les variétés. Ces lignes restent à traduire en droit, les concertations sont en cours ». Pour les enjeux liés aux brevets déposés sur les gènes, il estime que la solution se trouve dans la modification des pratiques de l'Office européen des brevets. Et enfin qu'une « information claire sur les gènes brevetés doit être disponible, un site dédié existe déjà mais il est incomplet. »