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« Une crise sanitaire d’une ampleur jamais vue », Laurence Marandola, Confédération paysanne

Le | Politique

La Confédération paysanne a présenté ses quatre dossiers prioritaires pour la rentrée, lors d’une conférence organisée le 11 septembre 2024. Avec un fort accent mis sur la situation sanitaire autour des épidémies de FCO et de MHE.

De g. à d. : Véronique Marchesseau, Laurence Marandola, Thomas Gibert, Caroline Nugues - © D.R.
De g. à d. : Véronique Marchesseau, Laurence Marandola, Thomas Gibert, Caroline Nugues - © D.R.

« C’est une rentrée qui suit un été très dur, parfois dramatique pour certaines productions. Il n’y a pas eu de trêve syndicale. Cette rentrée est marquée par notre besoin de répondre aux attentes du terrain et d’accompagner nos agriculteurs. Notre priorité n’est pas d’avoir un ministre, le nom d’un ministre, un nouveau gouvernement, ou un commissaire européen pour l’agriculture. Notre boussole est la situation agricole sur le terrain et essayer d’obtenir des réponses », déclare Laurence Marandola, porte-parole nationale de la Confédération paysanne, lors de la conférence de rentrée du syndicat à Bagnolet le 11 septembre 2024.

En présence de Laurence Marandola, Véronique Marchesseau, secrétaire générale et Thomas Gibert, secrétaire national, le syndicat a présenté ses quatre dossiers prioritaires pour cette rentrée, avec un fort accent mis sur la situation sanitaire autour des épidémies de FCO et de MHE. « Sur la situation sanitaire, la non-gestion de l’État est scandaleuse. Il n’y a jamais eu de carte fiable, afin de savoir comment évoluait la situation. Nous n’avons jamais eu de bilan officiel non plus. Quand nous aurions dû vacciner, les vaccins n’étaient pas disponibles. Nous avons des témoignages d’agriculteurs dans les Pyrénées qui ont voulu vacciner, en particulier en brebis lait et qui n’en ont pas trouvés », selon Laurence Marandola.

« Cette crise sanitaire est d’une ampleur jamais vue jusque-là »

« La crise sanitaire FCO a débuté bien avant les premières annonces gouvernementales. C’est une crise d’une ampleur jamais vue, de part le nombre d’élevages touchés et le taux de pertes directes et indirectes. Ce qui n’a jamais été vu non plus est la forme de déni du gouvernement et d’une partie des services de l’État pendant des semaines. L’État n’a pas pris au sérieux cette crise sanitaire. Dans les Pyrénées-Orientales, les premiers cas sont survenus mi-juin. Nous n’avons eu aucun signal d’anticipation, aucune information. Nous sommes scandalisés de voir la différence de traitement entre la FCO3 et la FCO8. Nous appelons l’État à changer radicalement de méthode sur les questions sanitaires, en terme d’anticipation, indique Laurence Marandola. Nous demandons à débloquer la question de force majeure pour la PAC, puisque des agriculteurs ont tellement perdu de bêtes qu’ils ne seront pas dans les clous sur le chargement pour les aides directes, ni sur les ratios de productivité pour l’aide ovine ou pour l’aide couplée. Tous les moyens doivent être déployés sur la question des indemnités fortes : la FMSE, la réserve de crise européenne, des aides construites comme pour la MHE l’an dernier. Rien ne pourrait justifier qu’il n’y ait pas d’accompagnement pour les éleveurs touchés par la FCO. Pour rappel, l’an dernier, le début de la mobilisation trouvait son origine dans la crise autour de la MHE. Cela peut repartir à tout moment. »

« Nous sommes face à l’échec total du système assurantiel »

La Confédération paysanne reste en alerte sur les sujets de la PAC, et notamment sur la révision du PSN. « Le premier pilier de la PAC est censé soutenir le revenu des agriculteurs. Il est essentiel que ce chantier soit rouvert, pour qu’enfin, la PAC remplisse cet objectif. Il y a toujours les mêmes oubliés de la PAC, les plus petites surfaces, les productions diversifiées, les fruits et légumes, souligne Laurence Marandola. Les agriculteurs sont démunis et abandonnés face aux aléas climatiques et sanitaires. Aujourd’hui, nous sommes face à l’échec total du système assurantiel, qui protégerait toutes les productions. Nous demandons une amélioration profonde et concrète du système assurantiel, des calamités, et surtout un fonds mutuel et solidaire pour tous. »

« L’absence de revenus suffisants ne doit pas être compensée par un revenu énergétique »

« Il y a une nécessité d’empêcher l’accaparement du foncier. Il faut travailler à une nouvelle gouvernance des Safer, permettant de réellement répartir le foncier et d’éviter de s’enfoncer dans un modèle d’agrandissement des fermes, qui élimine les exploitations les unes après les autres, pointe Véronique Marchesseau, secrétaire générale. Le photovoltaïque au sol représente une véritable menace à la conservation du foncier agricole. Le décret à ce sujet doit, soit disant, permettre de conjuguer activité agricole et production d’énergie, mais on voit bien que l’activité agricole est un alibi. Cela participe au surenchérissement du foncier et empêche ainsi son accès aux personnes voulant s’installer. »

« C’est à nous de défendre la vocation agricole et alimentaire du foncier. Nous restons extrêmement mobilisés contre l’artificialisation des terres et la dénonciation de tous les détournements des outils de régulation. C’est une ligne rouge absolue. L’absence de revenus suffisants, du fait des problèmes de prix, ne doit pas être compensée par un revenu énergétique. On doit pouvoir vivre de notre travail, précise Laurence Marandola.

Les ambitions de la Confédération paysanne pour les élections des Chambres d’agriculture

« Nous avons plusieurs ambitions pour ces élections professionnelles - on tient à ce terme : avoir une liste dans chaque département, sans alliance, afin de pouvoir voter pleinement Confédération paysanne ; progresser partout, c’est-à-dire gagner des chambres. Les chambres d’agriculture sont un outil d’orientation locale indispensable pour développer notre projet d’agriculture paysanne et surtout pour devenir un syndicat incontournable par rapport au poids d’orientation des politiques agricoles nationales », proclame Thomas Gibert, secrétaire national.

« Nous allons à ces élections avec beaucoup d’envie. C’est un moment peut être un peu dur syndicalement, mais c’est aussi un moment précieux. Cela permet de se parler entre agriculteurs, entre syndicats, avec des voisins, d’avoir des débats. Il est vraiment précieux de se dire de quelle politique nous avons envie, et d’échanger nos propositions très concrètes, afin d’être prêts au moment où nous serons amenés à gérer une chambre, affirme Laurence Marandola. Nous ne sommes pas favorables à un report de ces élections. Nous rappelons combien il est important que ce moment ‘démocratique’ se tienne. Il faut que le gouvernement prenne ses responsabilités, pour organiser du mieux possible ces élections. Le décret paru à la mi-juillet a permis de lancer les opérations, la révision des listes électorales, de fixer une échéance au 31 janvier 2025. Nous sommes satisfaits qu’il n’y ait pas de report. »