Référence agro

Yves Madre, Farm Europe - « Pac, les outils de gestion doivent évoluer… et ce, dès 2018 »

Le | Politique

Les 30 et 31 mai s'est tenu un conseil informel de l'Agriculture, à Amsterdam, sur la Pac post-2020. La France et la présidence néerlandaise ont, chacune de leur côté, proposé un document de travail. Des pistes de réflexion pour d'éventuels ajustements en 2018, avant une réforme plus profonde en 2020. Pour Yves Madre, agronome, économiste et cofondateur du cercle de réflexion Farm Europe (1), « les propositions de la France vont dans le bon sens ». Selon lui, les éventuels ajustements doivent être actés d'ici la fin de l'année.


« Le document transmis pas la France annonce les orientations souhaitées mais ne proposent pas pour l’heure de mesures concrètes, précise-t-il. Toutefois, cela va dans le bon sens, vers davantage d’innovation, de durabilité et de résilience. Ce qui est clair, c'est que pour viser une plus grande durabilité à la fois économique et environnementale, il faut ajuster les mécanismes de gestion actuelle. La crise du lait nous montre que les outils en place ne fonctionnent pas : ils ne sont pas à la hauteur des difficultés. Or, les marchés continueront d’être volatiles : les outils de gestion doivent donc évoluer… et ce, dès 2018.

2018 doit être l’étape à ne pas louper pour avoir une réforme ambitieuse en 2020 : pour définir une Pac à la hauteur de ce que l'Europe attend de ses agriculteurs et de ce que ses agriculteurs sont en droit d'attendre de l'Europe. Les propositions d'éventuels ajustements de la pac actuelle devraient être présentées par la commission d'ici la fin de l'année 2016. « C’est à ce moment-là que sera dévoilé le degré d’ambition de la France et des autres Etats Membres. Pour participer activement à ces débats, Farm Europe réunira, mi-octobre, 250 « décideurs européens » pour plancher sur ce sujet et faire des propositions concrètes à Bruxelles. Pour Farm Europe, trois priorités : parier sur une agriculture performante en soutenant l’investissement, répondre à la volatilité des marchés et lier durabilité environnementale et durabilité économique ».


La France parie sur l'épargne, l'emploi et l'environnement

Des pistes qui semblent d'ores et déjà avoir été, en partie, retenues par le ministre de l'Agriculture français. Dans son document présenté le 30 mai, Stéphane Le Foll met l'accent sur trois points :

  • Mettre en place « une épargne de précaution », au niveau de l'exploitation. L'idée : « qu'une partie des aides directes reçues par les agriculteurs soit mise de côté les bonnes années pour constituer une réserve mobilisable lors des années difficiles. » Cette épargne remplacerait la « réserve de crise européenne », alimentée jusque-là par une ponction sur les aides directes versées aux agriculteurs l'année de crise.

  • Favoriser l'emploi. Au-delà du soutien de base, « les aides couplées doivent permettre de soutenir de façon ciblée certaines filières, fragiles, émergentes et vertueuses, dans une approche stratégique d'orientation des productions. »

  • Répondre aux défis environnementaux et climatiques. Le ministre souhaite une nouvelle approche du verdissement, en « passant d'une politique d'obligation de moyens à une politique de contrat sur des objectifs de résultats. Couverture des sols, mesures agri-environnementales, soutien au bio, à l'autonomie fourragère des élevages… Au final, renforcer ce qui existe déjà, en simplifiant, et en « prenant mieux en compte la prise de risque que représente un changement de mode de production ».

De leur côté, les Pays-Bas prônent une Pac plus libérale, axée sur la demande plutôt que sur l'offre comme c'est le cas actuellement. L'ensemble des propositions sont regroupées dans le document « La nourriture pour l'avenir - l'avenir de la nourriture ». Pour eux, « les agriculteurs doivent gagner leur revenu sur les marchés. »


(1)  Farm Europe est un think tank multi-culturel qui vise à stimuler la réflexion sur les économies rurales, à l'échelle européenne.