ZNT, les textes seront applicables dès le 1er janvier 2020
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C’est officiel. Des Zones non traitées (ZNT) de trois à vingt mètres devront être respectées par les agriculteurs qui épandent des phytosanitaires à proximité des habitations. Ces annonces ont été faites par les ministères de l’Agriculture de la Transition écologique et de la Santé le 20 décembre dans la soirée. Si la majorité des mesures correspond au projet de loi, celles liées aux substances les plus préoccupantes se sont durcies : les distances de sécurité ont été doublées. Les textes s’appliqueront désormais rapidement, début 2020.
Très attendues par les professionnels et les ONG, la majorité des mesures à respecter par les agriculteurs qui épandent des phytosanitaires à proximité des habitations sont celles prévues dans le projet présenté le 27 juin : la loi instaure des Zones de non traitement (ZNT) de cinq mètres pour les cultures basses et de dix mètres pour les cultures hautes comme l’arboriculture et la viticulture. Cette distance minimale pourra être réduite à cinq mètres pour les cultures hautes et à trois mètres pour les cultures basses, dans le cadre de chartes d’engagement signées entre les résidents et les agriculteurs.
Vingt mètres pour les substances dangereuses
Le ton s’est toutefois durci pour les substances les plus dangereuses, majoritairement les CMR1 et les molécules considérées comme perturbateurs endocriniens : la distance incompressible de dix mètres a été doublée pour passer à vingt mètres. Par ailleurs, une instruction interministérielle sera publiée début 2020 pour les mesures s’appliquant aux établissements accueillant des personnes vulnérables. Les produits de biocontrôle ou « à faible risque » ne sont pas concernés. « Ces distances s’appuient sur les préconisations scientifiques et indépendantes formulées par l’Anses dans son avis du 14 juin 2019 », assurent les ministères de l’Agriculture, dans un communiqué commun le 20 décembre.
Un processus réglementaire pour les chartes départementales
Ces distances minimales seront fixées par un arrêté. Il sera accompagné d’un décret qui précisera le cadre général pour les chartes d’engagement à l’échelle du département. Ces chartes doivent inclure, a minima, les modalités d’informations et de dialogue des résidents ainsi que les distances de sécurité. Elles peuvent également comprendre les techniques de réduction de la dérive (buses à injection d’air, panneaux récupérateurs, matériel de traitement dit « confiné », etc.), des bonnes pratiques pour l’application des produits phytosanitaires, des délais de prévenance des résidents, ou encore des dates et horaires de traitement adaptés. Près de la moitié des départements n’a pas encore entamé ce travail, estime la FNSEA.
Les nouvelles règles pour les cultures de printemps
Autre difficulté pour les agriculteurs : les délais d’application. Le décret (règles d’élaboration des chartes) et l’arrêté (distances minimales) entreront en vigueur le 1er janvier 2020. Toutefois, les distances minimales de sécurité sont applicables au 1er juillet 2020 pour les parcelles déjà emblavées à la date de publication du texte, hormis pour les substances les plus préoccupantes. Ainsi, les nouvelles règles concerneront les cultures de printemps, qui seront emblavées de février à avril 2020.
Le Gouvernement a également annoncé le déblocage au printemps d’une enveloppe de 25 M€, confiée à FranceAgriMer, pour aider à l’achat de matériel d’application limitant la dérive. Sur la partie recherche, un projet d’épidémiologie de 14 M€ sur quatre ans sera lancé en 2020 pour évaluer l’exposition aux pesticides dans les lieux de vie chez les riverains de zone agricole.
Enfin, les mesures actuelles d’interdiction d’utilisation de phytosanitaires en milieu non agricole, dans les lieux ouverts ou directement accessibles au public, seront étendues, en particulier aux copropriétés et aux espaces privés accessibles au public. « Le Gouvernement se rapprochera rapidement des parties prenantes pour organiser une concertation sur ces nouvelles dispositions, afin notamment de déterminer des délais d’entrée en vigueur appropriés », indique le Gouvernement.
Incompréhension de la FNSEA
Si la FNSEA estime que le texte ZNT est une avancée au regard des débats irrationnels que la profession agricole subit, son incompréhension reste forte sur de nombreux points. « Nous sommes satisfaits que le Gouvernement se soit fondé sur l’avis scientifique de l’Anses pour bâtir sa réglementation sur la protection des riverains vis-à-vis des pesticides et qu’il reconnaisse l’importance des chartes pour adapter ces mesures, indique Christian Durlin, vice-président de la commission environnement du syndicat agricole. Même si nous souhaitions l’absence de ZNT dans certains cas… Quoiqu’il en soit, nous appelons désormais tous les départements à mettre rapidement en place des chartes. Mais, même s’ils sont réactifs, la procédure requise pour valider une charte prendra facilement quatre mois. Or, les prochaines cultures qui devront répondre aux nouvelles règles se sèment de février à avril. Le planning n’est donc pas approprié.
Autre point d’incompréhension pour nous : le Gouvernement n’indique pas le devenir de ces ZNT. Sur le Nord-Pas-de-Calais, nous estimons que 5000 hectares pourraient être concernés. Qui va les prendre en charge ? Quelles compensations financières pour les exploitants ? Rien n’est, pour l’heure, prévu ! Par ailleurs, comment gèrera-t-on les nouvelles habitations qui vont s’implanter dans les zones agricoles ?
Quant au doublement de la distance de sécurité pour les substances les plus dangereuses, nous ne trouvons pas de justification scientifique à ce revirement de situation. Ce point posera des problèmes dans les zones péri-urbaines, à forte présence de cultures maraîchères et où les agriculteurs n’ont parfois pas d’autres choix que d’utiliser ces produits. »
La FNE envisage des recours en justice
De son côté, France nature environnement estime que les bases du dialogue dans les territoires ne sont pas au rendez-vous. L’association envisage des recours en justice