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Rencontre avec Sébastien Poncelet, Agritel - « Le maïs, inquiétude numéro 1 »

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Depuis quelques semaines, les cours des céréales jouent au yoyo. D'un côté, la récolte des blés qui avance… et qui rassure. De l'autre, des maïs qui souffrent. Le point sur les marchés avec Sébastien Poncelet, conseiller chez Agritel.


Quel premier bilan pouvez-vous dresser de la collecte française 2015 ?

Rendement et qualité sont pour l'heure au rendez-vous pour les blés français mais la grosse question reste sur ce qui est encore sur pied, au nord d'une ligne Rennes-Beauvais-Strasbourg. Là, le coup de chaud de fin juin-début juillet et le manque d'eau depuis deux mois risquent de laisser quelques traces, notamment en terme d'échaudage. L'inquiétude numéro un est toutefois le maïs pour qui les problèmes s'accumulent : stress hydrique, stress thermique et chaque jour de nouvelles restrictions liées à l'irrigation. Alors que les fortes chaleurs pénalisent la fécondation et le nombre de grains formés, le manque d'eau impacte la taille des épis et le poids des grains. Ajoutez à cela une baisse des surfaces à l'échelle nationale de 8 %, un transfert possible des maïs grain en maïs ensilage pour compenser une pousse d'herbe déficiente dans les zones d'élevage… et on comprend pourquoi les cours du maïs rattrapent peu à peu ceux du blé.


Les cours du maïs pourraient-il dépasser ceux du blé ?

Cette situation n'est pas à exclure car la tension sur le marché du maïs est réelle. En France et ailleurs en Europe : en Espagne, en Hongrie, dans l'Ouest de la Roumanie et dans le nord de la Serbie. Aux États-Unis, la moitié des surfaces de maïs se porte bien, l'autre moitié est sous les eaux. Toutes ces régions, très productrices de maïs, restent sous observation.


Quel conseil donnez-vous aux agriculteurs pour vendre leur récolte ?

Aujourd'hui, nous sommes en plein Weather Market. Plus que jamais, c'est l'état de la plaine qui rythme les marchés et crée cette instabilité. Peu d'affaires se sont faites avant les récoltes. De nombreux opérateurs attendent. Les outils des marchés à terme aident les agriculteurs à prendre position. Pour ceux qui connaissent leur rendement, nous leur conseillons de sécuriser une partie de leur collecte en profitant des rebonds pour la vendre. Le recours aux options permet de saisir les opportunités.


Quelle est la tendance de la semaine ?

Après avoir grimpé en début de semaine, les cours ont de nouveau chuté avec l'annonce de l'arrivée d'une nouvelle canicule, le recul de l'euro et l'accord fragile signé par la Grèce. D'autres événements interpellent, comme l'achat par l'Algérie, jeudi 16 juillet, de 250 000 t de blé français, alors qu'elle venait d'en acheter 750 000 t. Pourquoi ce pays revient-il si vite aux achats ? Autre annonce : l'achat par le Mexique de plusieurs bateaux de blé français. Un achat inhabituel qui remplacerait le blé américain : plus proche certes, mais attendu comme de moins bonne qualité cette année.


Et à plus long terme ?

Si à court terme, les blés russes et ukrainiens pourraient concurrencer la production nationale avec des prix plus bas, à long terme, dans un marché mondial de blé en recul en volume, la production française pourrait, de par sa qualité, tirer son épingle du jeu.


Cours en euros/tonne sur les marchés, au 17 juillet. Euronext, première échéance. Entre parenthèses, cours du 10 juillet.


Blé : Euronext, 194,5 (197,25) ; rendu Rouen, 188 (190)

Maïs : Euronext, 182,5 (185) ; rendu Bordeaux, 173 (175)

Colza : Euronext, 387,75 (389) ; rendu Moselle, 390 (390)