Souveraineté alimentaire, le secteur agricole se mobilise
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Le confinement imposé par l’épidémie de Covid-19 a fait de l’agriculture un des secteurs prioritaires pour traverser cette crise, et maintenir l’approvisionnement des consommateurs. Dans ce cadre, la FNSEA insiste sur la mise en œuvre de mesures pour assurer la souveraineté alimentaire française. Le syndicat a présenté, le 6 mai, un manifeste découpé en quatre axes pour y parvenir.
Avec les professeurs ou le personnel de la grande distribution, les agriculteurs font partie de la « deuxième ligne », mobilisée pour faire face aux conséquences de l’épidémie de Covid-19. Malgré les inquiétudes et la forte pression exercée sur certains produits, comme les pâtes ou la farine, la France n’a pas connu de situation de pénurie. Dans ce contexte, le concept de « souveraineté alimentaire » a été plusieurs fois évoqué. Lors de son discours du 12 mars, le président de la République, Emmanuel Macron, affirmait lui-même que se serait « une folie » de « déléguer notre alimentation ». Dans ce contexte, la FNSEA a présenté, le 6 mai, un Manifeste pour une souveraineté solidaire. « Le confinement a modifié les manières de consommer, constate Christiane Lambert, la présidente du syndicat, lors de cette présentation. À
nous de tirer les enseignements de ce qui s’est passé pour fixer un nouveau cap. »
Réduire significativement les importations
Le document se divise en quatre grands axes. Un d’entre eux s’attache à faire de la souveraineté alimentaire un « enjeu stratégique » pour la France et l’Europe. Au cœur de cette ambition réside la question des importations, qui augmentent actuellement plus rapidement que les exportations, en France. « Pour sécuriser l’alimentation de nos concitoyens, nous sommes aujourd’hui dépendant des importations, notamment en ce qui concerne les fruits et légumes, dont 50 % sont importés, indique Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA. Ce point est la clé de notre manifeste. » Celui-ci rappelle que, depuis la fin des années 1990, la production de légumes stagne, et qu’elle baisse dans le cas de certains fruits (pêchers et pruniers notamment), alors même que la population a augmenté de 11 % dans le même temps. Par ailleurs, le syndicat assure « prôner la capacité des pays en développement à construire leur propre modèle de développement agricole ». « Les règles d’échanges internationaux doivent être équitables », pose Christiane Lambert.
Repenser l’échelon européen
Pour accompagner cette réorientation du modèle agroalimentaire français, le manifeste plaide pour une réorientation des politiques publiques, avec des mesures telles que : des prix agricoles rémunérateurs, la promotion de l’origine France et la sensibilisation des consommateurs à la construction des prix, la mise en place des EGA, le développement de filières longues de biomasse génératrices de valeurs non alimentaires, etc. Au niveau européen, la FNSEA demande une hausse de la Pac sur les deux piliers. « Nous devons réaffirmer que la Pac n’est pas has been, cette politique ne concerne pas seulement les 3 millions d’agriculteurs européens mais 450 millions de consommateurs, souligne Christiane Lambert. Nous plaidons pour plus d’Europe, pour réduire les distorsions de concurrence internes et repenser le rôle des institutions. »
Un pacte avec les consommateurs
Enfin, le manifeste défend une reprise du contact avec les consommateurs, pour que l’agriculture, qui s’engage sur la transition écologique, soit soutenue en retour par la société. « L’après Covid doit être un nouveau départ, nous avons assisté à une sorte de réconciliation entre les Français et les agriculteurs, à nous d’entretenir ce lien », affirme la présidente de la FNSEA.
La FNSEA n’est en tout cas pas le seul acteur du secteur agricole à se saisir du concept de souveraineté alimentaire. Dans une tribune datée du 5 mai, le syndicat ainsi que Jeunes agriculteurs, la Coopération agricole, la Confédération nationale de la mutualité, la coopération et du crédit agricoles (CNMCCA), la Fédération nationale du Crédit agricole (FNCA), Groupama assurances mutuelles, la Mutualité sociale agricole (MSA) et les Chambres d’agriculture plaident pour « rebâtir notre souveraineté alimentaire ». Un travail d’ampleur qui « sera le chantier d’une génération » selon les signataires. Ces derniers insistent, en particulier, sur les efforts à fournir pour susciter les vocations chez les jeunes, structurer et relocaliser si nécessaire les filières, répondre aux attentes de tous les consommateurs pour rester compétitifs , et renouer la confiance avec les Français, notamment autour du concept de transition agroécologique.