Space 2015, des éleveurs en quête de compétitivité
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Le Space, le salon international des productions animales, a difficilement ouvert ses portes le mardi 15 septembre. En cause, des manifestations d'agriculteurs, ralentissant l'accès. Conséquence : 30 % de visiteurs en moins le premier jour. Les autres jours se sont déroulés dans le calme. Grand absent : le ministre. Si les discussions entre les acteurs de la filière, les exploitants et leurs distributeurs, tournaient beaucoup autour de la crise, l'ambiance est restée sereine face à des éleveurs venant chercher des solutions et de la visibilité pour les mois à venir. Reportage.
« Les trésoreries des exploitations se sont dégradées depuis six mois à un an, reconnait Michel Mariette, responsable communication d'Agrial (14). La fin des quotas laitiers et la baisse de l'accompagnement financier de Bruxelles a fragilisé les exploitations. L'embargo russe a été un révélateur de cette situation. » Le maître mot : la compétitivité des entreprises. « Pour y parvenir, nous recherchons une plus grande performance, l'amélioration technique, l'optimisation des intrants avec un meilleur accompagnement des conseillers et l'utilisation d'outils d'aide à la décision pour aboutir à une qualité renforcée des produits ». Une plus grande compétitivité qui s'exprime également pour la coopérative par son rapprochement avec Eurial. « Il devrait être bouclé d'ici à la fin de l'année », précise Michel Mariette.
Photo : Michel Mariette, responsable communication d'Agrial
Selon Terrena (44), la crise devrait encore durer au moins un an. « Nous avons préparé le Space avec beaucoup d'humilité et de respect pour les évènements en cours, explique Paul Yves L'Anthoen, directeur du pôle amont de Terrena. Nous suivons en permanence la situation des comptes de nos adhérents et nous réfléchissons à des aides ponctuelles sur certains secteurs, en essayant d'être pragmatiques ». Pour Terrena, la logique filière et de territoire reste la meilleure. « Cela nous aide à gérer les performances techniques et financières de nos outils, en maitrisant les coûts. Et puis, nous gardons le cap sur la nouvelle agriculture, un moyen d'amener de la valeur ajoutée aux productions. »
Photo : Paul Yves L'Anthoen, directeur du pôle amont de Terrena.
Une valeur ajoutée dont compte bénéficier la CAM53, désormais section autonome de Terrena. « Ce rapprochement nous permet d'offrir des outils de compétitivité à nos adhérents, comme Farmstar pour la gestion de la fertilisation », explique Ivan Leclerc, le nouveau président de la CAM53, nommé en juin. La coopérative reconnait la difficulté des agriculteurs. « Les encours ont augmenté, mais le contact avec les éleveurs est serein. » La CAM prépare par ailleurs sa fusion avec le groupement de porcs Cap50 pour la fin de l'année. Il englobe 120 éleveurs et 400 000 porcs.
Photo : Ivan Leclerc, président de la CAM53
« Les agriculteurs ne sont pas là pour se plaindre, malgré les difficultés », reconnait Marie-Laure Louboutin, responsable communication chez Triskalia (29). La coopérative mise sur l'accompagnement technico-économique des exploitants. « Nous ne pouvons pas peser sur les marchés alors, nous tentons de rendre les exploitations plus performantes », poursuit-elle. La coopérative a lancé au Space une nouvelle identité, Excélia, qui englobe un ensemble de solutions en nutrition pour les élevages porcins.
« Notre projet est de dimension régionale fondé sur des valeurs », indique René Loret, président de la Coop de Broons (22). D'Aucy regroupe désormais la Cecab et la Coop de Broons. Cinq valeurs étaient inscrites sur le stand du Space : inventivité, compétitivité, engagement, solidarité et fiabilité. « Le manque de perspective est difficile pour les exploitants, reconnait Jean-Claude Orhan, vice-président de la Cecab. Il faut de la visibilité pour investir. C'est aussi le sens de notre projet. »
Photo : Jean-Claude Orhan, vice-président de la Cecab, et René Loret, président de la Coop de Broons.
A la Cooperl (22), pas de changement par rapport aux autres années. « Nous n'avons pas attendu le Space pour échanger avec nos adhérents, explique Anne-Marie Boullier, directrice communication à la Cooperl. Les marges brutes de nos éleveurs sont supérieures à la moyenne. Et ce, grâce notamment à un conseil technique fort et à des cahiers des charges qui rémunèrent mieux les exploitants. »
Enfin, l'organisation syndicale Négoce Ouest a profité du Space pour aider ses entreprises à recruter, via un job dating organisé le 16 septembre. Une première pour la structure. « Nous avons proposé une trentaine de postes dont une vingtaine pour la mission de technico-commercial », indique Yves Chandesris, directeur du réseau (photo de gauche). L'occasion aussi d'accueillir sur le stand des anciens de l'école Tecomah, avec qui le job dating était organisé.
« Je viens d'être averti par mon Smartphone qu'une de mes vaches va vêler ». Tel est l'un des multiples exemples qu'un agriculteur présentait sur l'espace R&D du Space sur le thème « je connecte mon élevage ». Les possibilités sont énormes et certaines sont déjà très opérationnelles comme l'agriculture de précision via drones ou satellites pour piloter la fertilisation d'une parcelle. Mais le repérage d'adventices ou la télédétection de maladies est en pleine expérimentation. L'autoguidage des engins ajoute encore de la précision. Côté bâtiments, de multiples capteurs surveillent … « L'analyse comportementale par imagerie issue de caméras de surveillance permet de suivre le bien-être des volailles ». La plateforme présentait même des lunettes connectées permettant un diagnostic, tel la « mesure pododermatique des poulets » !
Pour Jacques Chaouen, président de la chambre régionale d'agriculture de Bretagne, « l'agriculteur a besoin d'un maximum d'informations pour piloter son exploitation, et ce à tous les niveaux. Tant au niveau élevage qu'agronomie. Les données vont être de plus en plus importantes mais elles doivent être au service des agriculteurs. Les possibilités d'innovation sont extraordinaires ! » G.P.