Agroécologie

Report du règlement contre la déforestation : une sage décision, selon Stéphane Radet, Snia

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Le 30 décembre 2025 plutôt que le 31 décembre 2024 : la Commission européenne a annoncé le report de l’entrée en application du Règlement européen contre la déforestation et la dégradation des forêts (RDUE) le 2 octobre 2024, afin de « permettre aux parties prenantes concernées de mieux préparer la mise en œuvre de ce règlement ». Réaction de Stéphane Radet, directeur du Syndicat national des industriels de la nutrition animale, Snia, un secteur concerné par les achats de soja.

Report du règlement contre la déforestation : une sage décision, selon Stéphane Radet, Snia
Report du règlement contre la déforestation : une sage décision, selon Stéphane Radet, Snia

Êtes-vous satisfait du report de l’entrée en vigueur du Règlement européen contre la déforestation et la dégradation des forêts (RDUE) ?

Stéphane Radet : C’est une décision que nous considérons comme sage. Toutefois, il est important de noter qu’il ne s’agit que d’une proposition de la Commission, soumise à l’adoption du Conseil et du Parlement. Cela n’est donc pas encore définitivement acté. La Commission a effectivement jugé nécessaire de prendre le temps d’une mise en œuvre adéquate, en tenant compte du fait qu’il reste encore des travaux à réaliser pour assurer une application complète et effective du règlement. Parallèlement, elle a publié divers éléments complémentaires, attendus par les professionnels, concernant les modalités pratiques d’application du règlement, y compris des dispositions techniques. Elle a ainsi renforcé son soutien pour l’implémentation du texte et proposé un délai supplémentaire de douze mois pour une introduction progressive.

Est-ce que cela remet en cause les engagements du secteur ?

Stéphane Radet : Il est important de rappeler que le secteur de l’alimentation animale a déployé des efforts significatifs pour garantir l’absence de déforestation dans ses approvisionnements en soja. En France, le manifeste des fabricants d’aliments pour le soja stipule qu’à partir du 1ᵉʳ janvier 2025, tout soja doit disposer de garanties de non déforestation et de non conversion. Ce manifeste demeure en vigueur. Ce report ne remet pas en cause les actions menées en France pour garantir des filières d’approvisionnement en soja non issu de zones déforestées.

Ce report n’est-il pas regrettable ?

Stéphane Radet : Bien que nous considérions cette décision comme sage, il est vrai que nous pourrions la regretter. Après tant d’efforts déployés ces derniers mois, nous aurions souhaité avoir les éléments concrets et attendus suffisamment tôt pour préparer l’opérationnalisation au quotidien des dispositions réglementaires. Il est regrettable que la Commission ait été contrainte de proposer ces douze mois supplémentaires.

Mais les demandes massives d’organisations au niveau européen et mondial lui sont apparues justifiées. Cela est dû au fait que les modalités pratiques et les conditions d’application du texte ont tardé à être mises en lumière. Les derniers éléments publiés par la Commission l’ont été le 2 octobre 2024, soit moins de 100 jours avant la mise en œuvre complète prévue pour le 30 décembre.

En France, notre travail intensif avec les fournisseurs et les engagements des fabricants d’aliments démontrent que nous n’étions pas en retard sur les garanties à apporter aux filières. Nous continuons à fournir des garanties de non déforestation, mais qui ne répondent pas nécessairement aux exigences réglementaires techniques. Ce texte s’applique à la mise sur le marché européen pour les produits listés, qu’ils soient importés ou produits localement. Pour ces derniers, les modalités de mise en œuvre ne sont toujours pas arrêtées alors que la récolte de soja est en cours. Plus le temps passait, plus cela devenait compliqué, en raison de la nécessité de couvrir les achats.

Beaucoup de travail reste à réaliser par les autorités pour mettre en place le texte, notamment en ce qui concerne les conditions de contrôle. Il y a encore certaines zones d’ombres, et nul doute que tous les pays européens se trouvent dans une situation similaire.

Les incertitudes des derniers mois comme cette proposition de la Commission à un impact sur les marchés et sur les flux. Nous risquions des distorsions fortes au sein de l’UE dans l’application et le contrôle du texte.

Que pensez-vous des précisions apportées ?

Stéphane Radet : Nous sommes en train d’analyser ces précisions. La Commission a mis à jour la foire aux questions, alimentée par des interrogations soumises par les acteurs concernés. Elle a également introduit un outil technique permettant aux opérateurs de s’enregistrer : c’est un élément important du texte pour assurer la traçabilité et obtenir un numéro de suivi.