Agrostratégie

« L’accompagnement des agriculteurs doit être indépendant », Clément Le Fournis, directeur d’Agryco


Pour Clément Le Fournis, directeur d’Agryco, l’avenir de la distribution agricole passe par un conseil indépendant et objectif. À travers une plateforme transparente, des outils d’aide à la décision et une offre produits enrichie, Agryco entend jouer un rôle de facilitateur, au service d’agriculteurs toujours plus autonomes dans leurs choix.

Clément Le Fournis, directeur d’Agryco - © Agryco
Clément Le Fournis, directeur d’Agryco - © Agryco

Vous avez récemment changé de nom. Pourquoi ce choix ?

Le changement de nom d’Agriconomie, qui est désormais Agryco, a eu lieu le 12 septembre 2024, pour marquer nos dix ans. Nous avons choisi un nom plus international pour refléter notre évolution. En effet, nous étions très bien identifiés par les agriculteurs pour le volet économique, mais ces dernières années, nous avons beaucoup étoffé notre gamme de services. Nous proposons désormais des livraisons en 24 heures, des produits exclusifs, des marques de distributeur et une offre bien plus large que ce que l’on retrouve chez les coopératives ou négoces traditionnels. Ce changement de nom symbolise donc notre dynamique de croissance et notre volonté de nous ouvrir davantage à l’international.

Quels sont les chiffres de cette année ?

Nous enregistrons une forte croissance. En 2025, nous prévoyons de terminer à 150 M€ de chiffre d’affaires, contre 105 M€ en 2024. Cette croissance est principalement organique et provient de deux axes : d’une part, l’acquisition de nouveaux clients, d’autre part, l’augmentation des achats de nos clients existants. Concrètement, environ 25 % de notre croissance provient de l’acquisition de nouveaux clients et 15 % de l’évolution des achats des clients actuels. Aujourd’hui, nous comptons 650 000 agriculteurs clients à travers l’Europe, avec 300 000 en France et le reste réparti entre l’Allemagne, l’Espagne et la Belgique. Cela signifie qu’en France, environ 80 % des agriculteurs nous connaissent. En termes de trafic, nous estimons qu’entre 60 et 70 % des agriculteurs français visitent notre plateforme chaque mois. Et une grande partie d’entre eux viennent chercher de la formation sur des produits ou des conseils pour optimiser leurs décisions agricoles. Nous avons également développé des outils techniques comme des réseaux de recommandations pour guider les agriculteurs dans leurs choix.

La transparence est effectivement un de nos principes fondamentaux depuis le début. En offrant une plateforme transparente, nous permettons aux agriculteurs de comparer les prix, mais aussi de s’assurer qu’ils prennent des décisions éclairées. Nous voulons qu’ils sachent qu’en choisissant Agryco, ils obtiennent une bonne qualité au juste prix. Le rapport qualité-prix est désormais l’élément principal qui motive nos clients, bien plus que le prix seul. Nous veillons aussi à leur fournir des produits qu’ils ne trouveraient pas forcément ailleurs, comme des semences spécifiques, par exemple.

Quels sont selon vous les défis du conseil ?

L’accompagnement des agriculteurs doit être indépendant. Nous croyons en un conseil objectif, fourni par des experts externes. Cela permet aux agriculteurs de bénéficier d’un avis impartial et de trouver les produits qui conviennent le mieux à leurs besoins spécifiques. Nous ne voulons pas nous positionner en tant que conseillers techniques directs, mais plutôt comme un facilitateur, offrant un accès transparent à une large gamme de produits.

Comment expliquez-vous votre capacité à proposer des produits qu’on ne trouve pas ailleurs ?

Grâce à notre présence à l’international, nous avons accès à des produits qui ne sont pas disponibles en France. Mais aussi, à travers notre large réseau en France, nous sommes en mesure d’offrir des produits qui correspondent aux besoins spécifiques des agriculteurs dans différentes régions. Un agriculteur de la Champagne peut par exemple être intéressé par des produits spécifiques qui ne sont pas disponibles dans sa région, mais que nous avons dans notre catalogue. C’est cela qui nous permet de proposer une offre plus diversifiée et plus large.

Le prix reste-t-il un facteur important de différenciation ?

Historiquement, le prix était un argument majeur pour nos clients. Quand nous avons lancé Agriconomie, en 2016, 80 % de nos clients nous choisissaient pour nos prix attractifs. À l’époque, on offrait des économies substantielles. Par exemple, un client qui achetait 100 000 € de produits pouvait économiser jusqu’à 7 500 €. Aujourd’hui, ce n’est plus aussi simple. Nos concurrents réagissent pour contrer notre avance, ce qui rend le marché plus compétitif. Maintenant, nos clients viennent avant tout pour un bon rapport qualité-prix et pour la qualité du service. 24 % des agriculteurs viennent chez Agryco car ils ne trouvent pas le produit qu’ils souhaitent localement.

Quel regard portez-vous sur les coopératives et les négoces ?

Nous avons un regard respectueux envers les coopératives et négoces. Cependant, nous constatons que ces acteurs traversent une période difficile, avec des défis de rentabilité importants. Ils doivent réinvestir dans leurs infrastructures et se restructurer. En ce qui nous concerne, notre modèle est différent : nous voulons offrir une flexibilité maximale à nos clients, sans les enfermer dans des contrats contraignants. Nous ne cherchons pas à être le fournisseur unique de l’agriculteur. Nous sommes là pour compléter les services qu’il utilise déjà.

Le principal défi des distributeurs agricoles sera de générer de la valeur pour financer leur transformation. C’est un enjeu majeur pour les années à venir. Les distributeurs devront investir dans leurs infrastructures tout en étant capables de s’adapter à un environnement de plus en plus compétitif. Cela passe par une meilleure gestion de leurs coûts, une révision de leurs modèles économiques et un accompagnement toujours plus personnalisé pour leurs clients.

Concepts clés et définitions : #Coopératives , #Semences