Colza, des intentions de semis en hausse malgré quelques interrogations
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Les semis de colza se préparent, sur fond de problème d’approvisionnement en herbicides et d’incertitude autour du segment insecticide, avec l’arrêt du phosmet. Pour autant, les rendements 2022 et les cours soutenus devraient porter un maintien, voire une augmentation de la sole. Si la météo estivale est favorable, le chiffre de 15 % d’hectares supplémentaires est évoqué.
Alors que les moissons de colza sont en cours, voire déjà achevées selon les régions, les agriculteurs se projettent déjà sur les prochains semis. Avec deux points d’interrogation principaux. Le premier porte sur l’approvisionnement en herbicides pour cette culture. Dans le Grand Est, les adhérents de Lorca devront faire avec des quotas sur les produits phares. « C’est la principale inquiétude, explique le responsable agronomie et innovation de la coopérative, Pascal Quirin. Les herbicides pourraient être un facteur limitant pour la culture de colza, ce serait une première. » Fabrice Verlet, responsable productions végétales chez 110 Bourgogne, confirme que le risque avéré de contingentement de produits laisse planer une ombre sur l’augmentation des surfaces.
Tensions sur le marché herbicides
Dans l’Ouest, de l’autre côté de la boussole, Ulrich Housseau, directeur général de la COC, suit ce dossier avec une certain confiance. « Les fournisseurs envoient des signaux qui nous rassurent sur la possibilité de gérer des surfaces équivalentes à l’an passé, voire supérieures, estime-t-il. La gamme herbicide est suffisamment large pour trouver des solutions. » Pascal Quirin confirme que des reports sur des produits moins souples d’utilisation, en pré-levée stricte sont à prévoir. Et s’interroge : « Les firmes pourront-elles assurer ce report, qui suggère une multiplication des volumes par trois ou quatre ? »
L’après phosmet interroge
Seconde inconnue : l’avenir à très court terme du segment des insecticides. L’arrêt du phosmet appelle une dérogation pour le cyantraniliprole, en particulier dans les zones ou la grosse altise développe des résistances super KDR aux pyréthrinoïdes. « Dans l’Yonne, par exemple, les agriculteurs ne tenteront pas le colza sans cette solution », pose Fabrice Verlet. L’Allemagne a donné son feu vert pour cette molécule, ce qui constitue un signal positif, mais sans garantie pour la France. Pascal Quirin, de son côté, soulève un dernier point : « Les producteurs gardent un œil sur le coût des engrais, qui peut peser en faveur du tournesol, moins gourmand en azote. »
La rentabilité du colza, une valeur sûre
Voilà pour les points d’inquiétude. Dans la colonne des « plus », deux arguments pèsent, synthétisés par Fabrice Verlet : « Les rendements colza de la récolte 2022 indiquent un bon cru avec une moyenne qui s’affichera entre 30 et 35 quintaux sur notre zone, combinée à un marché situé à plus de 600 € payés à l’agriculteur. C’est incitatif. » L’ensemble des spécialistes interrogés par Référence agro abondent : en plus de son intérêt agronomique dans la rotation, le colza est rentable. Ce qui explique en grande partie la dynamique constatée par les semenciers.
Carnets de commandes bien remplis pour les semenciers
« À date, nous sommes plutôt très en avance sur l’année dernière, en termes de commandes, expliquait François Jansseune », responsable du développement colza LG, le 4 juillet. Le 8, Samuel Dubois, chef marché hybrides France chez RAGT, évoquait lui « un bon rythme de vente ». Au-delà du volet économique, d’autres facteurs entrent en jeu pour expliquer cette tendance. « L’an passé, plusieurs acheteurs se sont manifestés tardivement, ce qui a entraîné des problèmes logistiques entre les semenciers et les distributeurs, glisse François Jansseune. Beaucoup préfèrent anticiper pour éviter de répéter ce désagrément. »
+10 à 15 % de surfaces si la météo est au rendez-vous
De plus, les semenciers sont conscients des problématiques techniques rencontrées sur le terrain, et mettent en avant leurs produits les plus adaptés. « Le rendement n’est plus le seul critère d’achat, constate Samuel Dubois. Depuis deux ans, nous développons le label Secure Install pour nos variétés avec la meilleure vigueur de départ, critère important pour avoir des plantes robustes faces aux altises. Ces variétés représentent aujourd’hui plus de deux tiers de notre carnet de commandes. » Fort développement, aussi, des Green packs dans lesquelles RAGT associe colza et plantes compagnes qui perturbent les ravageurs et limitent la pression adventice. LG n’est pas en reste, selon François Jansseune qui évoque une dynamique de gamme : « Face aux attentes, nos variétés ont fait leur preuve l’an passé, donc il n’y a plus d’hésitation. »
En bref, les cours soutenus, les rendements au rendez-vous, et une offre adaptée semblent à même de compenser les réticences des agriculteurs. Surtout si la météo, dernier facteur d’arbitrage, s’avère favorable. Semenciers et distributeurs s’accordent sur un chiffre : si la pluviométrie est au rendez-vous au moment du semis, gage de levée rapide, les surfaces devraient aller en augmentant, de 10 à 15 % selon les zones.