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L’Anamso met en garde contre le risque de manque de multiplicateurs

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L’Association nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences oléagineuses, Anamso, tenait son assemblée générale le 13 avril 2023, à Paris. L’association souhaite améliorer la rémunération des multiplicateurs, dans un contexte de forte hausse des charges. Une piste envisagée : se structurer en organisation de producteurs. Évoquée en 2022, cette option est encore à l’étude.

L’Anamso met en garde contre le risque de manque de multiplicateurs
L’Anamso met en garde contre le risque de manque de multiplicateurs

En moyenne, les charges des agriculteurs multiplicateurs ont augmenté de 15 à 20 % en 2022, estime Laurent Bourdil, président de l’Association nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences oléagineuses, Anamso. Une hausse, sur de nombreux fronts, énergie, eau, carburant, intrants, qui n’a pas été compensée par une revalorisation générale du prix des semences par les établissements semenciers.

Pas de revalorisation nationale, faute de capacité de négociation

« Il y a eu des valorisations à la marge, de façon ponctuelle, tempère Laurent Bourdil. Mais elles sont très insuffisantes, et ne sont négociées qu’à l’échelle individuelle. » Car depuis les loi egalim 1 et 2, l’Anamso n’a plus le droit de négocier les prix avec les établissements semenciers, au nom de ses adhérents.

Une situation qui a renforcé l’hétérogénéité des tarifs sur le territoire, entre les agriculteurs multiplicateurs qui dépendent de coopératives et négoces, à même de défendre leurs intérêts, et les indépendants, qui doivent négocier seuls. Selon l’Anamso, aucune revalorisation générale n’a eu lieu depuis trois ans.

L’Anamso pourrait se structurer en organisation de producteurs

Pour pouvoir à nouveau négocier les prix, l’Anamso pourrait se structurer en organisation de producteurs, une solution préconisée par Semae. Mais ce modèle ne convainc pas totalement l’association. « Le décret qui définit précisément les conditions des organisations de producteurs devrait paraître avant l’été, explique Laurent Bourdil. Mais d’après les informations que nous avons déjà pu consulter, ce modèle comprend des limites. » Parmi elles, le fait que chaque organisation de producteur doit embaucher au minimum une personne à mi-temps, chargée de la mise en place des parcelles de semences. Une organisation de producteur doit aussi comporter une surface et un nombre minimal d’adhérents, pour une durée d’au moins trois ans.

« Mais certaines années, des multiplicateurs ne font pas de semences. Soit car cette culture ne correspond pas à leurs rotations soit parce que les contraintes d’isolement rendent compliquées leur implantation, rappelle Laurent Bourdil. Ce système va exiger de ces agriculteurs qu’ils paient une cotisation durant trois ans, même s’ils ne produisent pas de semences. » Enfin, des incertitudes demeurent sur la capacité de l’Anamso de se structurer à l’échelle nationale : les organisations de producteurs étant en général locales. Cela rendrait caduque la tentative de négociation à l’échelle globale.

Le travail des agriculteurs multiplicateurs, de plus en plus compliqué

« Si on nous empêche de négocier, les producteurs ne continueront pas », met en garde le président de l’Anamso. L’association souhaite aussi travailler sur le sujet du renouvellement des générations : « d’ici trois à cinq ans, de nombreux agriculteurs multiplicateurs partiront en retraite, explique-t-il. Des exploitations qui, aujourd’hui, produisent des semences sur des petites surfaces pourraient être absorbées par des structures plus importantes. » Avec le risque que l’activité semence disparaisse d’autant que, selon l’Anamso, les jeunes agriculteurs sont moins enclins à accepter les contraintes de la production semencière.

Et l’activité est déjà fortement challengée par l’actualité. « Avec la hausse des prix du tournesol, suite à la guerre en Ukraine, un producteur de semences peut être moins bien payé qu’un producteur de tournesol de consommation » rappelle Laurent Bourdil. D’autant que la hausse nationale de la sole de tournesol a rendu plus compliquée la production pour les multiplicateurs, puisqu’ils doivent respecter un isolement de 800 mètres.

Des demandes sur l’eau et les impasses techniques formulées auprès du ministère

L’Anamso craint aussi la limitation de l’accès à l’eau. « Nous devons assurer aux établissements semenciers que nous disposons d’un accès à l’eau pour produire. Mais derrière, que se passera-t-il si nous subissons des restrictions d’eau ? », regrette Laurent Bourdil. Avec Semae, il a rencontré Marc Fesneau à la fin du mois de mars 2023, pour demander que les agriculteurs multiplicateurs soient considérés comme prioritaires pour l’accès à l’eau.

Autre risque pointé par l’association : le manque de moyens techniques en colza et tournesol. « J’ai demandé au ministre que nous puissions apporter de l’azote au colza avant fin septembre, peu après les semis, pour aider les jeunes cultures à mieux résister aux altises », explique Laurent Bourdil. Le phosmet, qui permettait de lutter contre les ravageurs, a été interdit il y a un peu plus d’un an.