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Les engrais perlés, interdits en agriculture biologique

Le | Agrofournisseurs

Les engrais perlés, des fertilisants fortement chargés en azote ammoniacal provenant d’Asie, ont été interdits par les autorités françaises en agriculture biologique, après des mois de débats. Un dénouement auquel s’attendaient fournisseurs et distributeurs.

Les engrais perlés, interdits en agriculture biologique
Les engrais perlés, interdits en agriculture biologique

Suite et fin d’un feuilleton qui aura occupé le petit monde des engrais organiques pendant de longs mois. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, DGCCRF, a fait savoir aux metteurs en marché d’engrais perlés qu’ils n’avaient désormais plus l’autorisation de faire figurer la mention « utilisable en agriculture biologique ».

Fin d’utilisation de certains produits au 30 avril

Les premières injonctions ont été envoyées fin 2022, pour des produits commercialisés par Novaem et Terram. Les agriculteurs ont jusqu’au 30 avril 2023 pour utiliser ces engrais fortement dosés en azote ammoniacal pour leurs cultures biologiques. Le dernier importateur d’engrais perlés, Calcisol, a reçu une injonction lui interdisant le recours à la mention « UAB » en mars.

D’après Sébastien Ferran, son directeur, la raison majeure invoquée par l’administration française est que l’enregistrement de la matière première principale du produit, la fermentation de maïs, est incorrect. « Il nous est précisé que nous ne disposons pas d’AMM pour cette matière première et qu’elle n’est également pas présente dans la liste des matières exemptées d’AMM », a précisé Sébastien Ferran dans un courrier envoyé à ses clients distributeurs.

Les distributeurs avaient anticipé l’interdiction des engrais perlés

« Nous nous attendions à cette interdiction, en particulier après les injonctions reçues par nos concurrents », confie-t-il à Référence agro. Calcisol avait d’ailleurs annulé ses dernières importations. Et pour cause, de nombreux distributeurs avaient préféré se montrer prudents. « Nous étions sur le point de faire des achats lorsque nous avons eu vent de la polémique, explique un responsable des achats engrais de l’est de la France. Certains de nos collègues se sont positionnés, mais en raison des incertitudes autour de ces produits, la procédure n’est pas allée au bout. »

Même son de cloche, dans le Sud Ouest de la France. « Nous avions référencé ces produits, mais en faible quantité, car nous savions, depuis un an, qu’il y avait des risques, pointe Pascal Ramondenc, directeur de la centrale d’achats Axso. Les structures qui en commandaient avaient commencé à lever le pied. »

De très chères alternatives

Coopératives, négoces et unions d’appro se montrent confiants sur leur capacité à trouver des alternatives pour ces produits. Calcisol a d’ailleurs augmenté sa capacité de production d’engrais organiques en bouchons, issus notamment de farines animales.

Un débouché intéressant, compte tenu du manque de disponibilités en matières organiques, mais qui subit la concurrence des productions agricoles à valeur ajoutée, et dont le prix est rédhibitoire. « Entre 5 et 6 euros l’unité d’azote », estime Laurent Pasquier, directeur approvisionnement de la Cavac, qui, auparavant, achetait des engrais perlés. « Pour un cultivateur, ça n’a aucun intérêt, précise-il. Il risque d’y avoir des impasses en azote, les rendements et les taux de protéines des blés seront en baisse, et l’impact sera négatif pour la filière bio. Nos seules alternatives sont les leviers agronomiques, comme l’intégration de légumineuses, mais cela n’aura jamais la même action. »

Manque de transparence sur les procédures ayant mené à cette décision

Et si les autorités françaises appuient leur décision sur le droit européen, « les engrais perlés ne sont pas interdits dans d’autres pays de l’Union européenne, tels que la Belgique, l’Italie, la Lituanie ou la Bulgarie », rappelle Sébastien Ferran.

Par ailleurs, la DGCCRF, l’Inao et la DGPE justifient cette interdiction par la réponse apportée par la Commission européenne à une question posée par ces mêmes autorités françaises. Or cette question n’a jamais été rendue publique, laissant planer le doute sur son intitulé. Référence agro a tenté de se procurer cette information auprès de l’Exécutif européen, qui lui a opposé une fin de non-recevoir, les autorités françaises s’étant opposées à la divulgation de ces documents auprès de notre rédaction.