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Gestion de crise, apprendre à s’y préparer

Le | Cooperatives-negoces

La distribution agricole, comme tout autre secteur, est de plus en plus susceptible d’avoir à affronter une crise. Or la gestion d’une crise ne s’improvise pas. L’anticipation et la préparation se révèlent nécessaires pour éviter toute surprise, faciliter la gestion et limiter les risques. Rencontre avec Didier Heiderich, fondateur et directeur général du Cabinet Heiderich spécialisé dans la communication et la gestion de crise, et président de l’Observatoire international des crises.

Gestion de crise, apprendre à s’y préparer
Gestion de crise, apprendre à s’y préparer

Référence agro : Vous accompagnez depuis longtemps des entreprises agricoles et agroalimentaires dans leur gestion des situations sensibles et des crises. Quelles genres de crises la distribution agricole peut-elle être amenée à affronter ? 

Didier Heiderich : Les crises potentielles sont diverses, les exemples ne manquent pas ces derniers temps : risques sanitaires, cyber, train vidé par des activistes… Nous sommes dans un monde qui s’est durci. Tout est remis en question et ce qui l’est devient la loi de demain. Le cas du glyphosate est parlant.

Les citoyens se révèlent de plus en plus attentifs à tout, alors qu’ils sont de moins en moins avertis. A ces risques métier s’ajoutent les éventuelles défaillances internes qui peuvent survenir dans toutes les entreprises.

R.A. : Pourquoi la mise en place de procédures de gestion de crise est-elle si importante ?

D.H. : Anticiper d’éventuelles crises et s’y préparer permet d’être plus réactif le moment venu et de réduire les impacts. L’arrivée d’une crise peut s’avérer brutale. Et les conséquences peuvent avoir un effet domino allant du risque image à la chute de l’entreprise. Et ce, quelle que soit la taille de l’entreprise. En étant prêt, la surprise est moindre, la gestion facilitée et priorisée. Il faut savoir comment être organisé, comment répondre à la crise avec des décisions appropriées. De plus, « pour vivre heureux, vivons cachés » ne fonctionne plus, la communication de crise est essentielle. Et cela s’apprend.

R.A. : Quels aspects doivent être pris en compte et anticipés ?

D.H. : Une crise est protéiforme. Il faut penser à tous les aspects, financiers, juridiques, assurantiels, etc., prendre en compte les craintes humaines, la gestion d’éventuelles analyses à réaliser… La communication, quant à elle, doit être menée en interne, auprès des autorités, des riverains, etc. L’entreprise doit savoir gérer le 360°.

R.A. : Une telle préparation exige du temps.

D.H. : L’entreprise doit identifier les risques émergents, les hiérarchiser puis mettre en place des procédures de gestion, un plan de communication sensible. La rédaction de manuels, réalisée avec les dirigeants et des spécialistes internes, exige quelques mois. La culture du risque doit entrer dans les mœurs, c’est cela qui demande le plus de temps. L’entreprise doit se préparer à l’improbable. Par ailleurs, les manuels ne font pas tout, les exercices s’avèrent indispensables. Tout doit être pensé. Qui fait quoi ? Comment fonctionner 24 h sur 24, y compris en période de fêtes de fin d’année pour ne jamais perdre les capacités décisionnelles de l’entreprise ?

Enfin, l’anticipation peut conduire à devenir précurseur, pour distancer ses concurrents sur des sujets d’avenir.

R.A. : Pourquoi conseillez-vous également de communiquer de manière constante ?

D.H. : La communication de crise ne suffit pas. L’entreprise doit l’asseoir sur une communication planifiée et régulière. L’étymologie du mot « communication » est « la mise en commun ». Échanger avec l’ensemble des parties prenantes, entretenir une relation, est essentiel. Cela permet entre autres d’éviter que quelqu’un décide à votre place par manque de connaissances.