L’innovation, au cœur du congrès technique de la FNA
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La Fédération du négoce agricole, FNA, organisait son congrès technique à Orléans, le 23 novembre, veille du colloque de la fédération du commerce agricole et alimentaire. Au programme : l’innovation, et notamment l’exploitation des données des entreprises. Quatre ateliers ont donné aux négociants des clés pour optimiser la gestion de leurs sociétés.
Une centaine de personnes avait fait le déplacement à Orléans, le 23 novembre, pour le congrès technique de la Fédération du négoce agricole, FNA, qui se tenait la veille du colloque de la FC2A. Après le stockage du grain en 2021 et l’énergie en 2022, cet événement, « pragmatique », selon Antoine Pissier, dirigeant du négoce éponyme et président de la FNA, portait cette année sur l’innovation. Un sujet qui se déclinait sous plusieurs aspects : le renforcement de la qualité sanitaire, la traçabilité et la logistique, la valorisation des matières premières, avec en filigrane la nécessité de créer plus de valeur ajoutée, et la sécurisation de la commercialisation. Des sujets très stratégiques, selon Benoît Rabilloud, directeur général du groupe Perret, arrivé en poste cet été. En ouverture du congrès, il a évoqué la réflexion, au sein de Perret « de créer un comité projet, avec des idées qui viennent des équipes. Cela permet de ne pas s’éparpiller, de prioriser, car les investissements financiers et humains peuvent être importants. »
Contaminants, faire face au renforcement du cadre
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Pascal Pusset, responsable qualité pour Armbruster, au milieu, en bleu, explique les démarches du négoce pour assurer la sécurité sanitaire. © EB/Référence agro[/caption]
Un premier atelier « innovation » portait sur la qualité sanitaire des récoltes. Un abaissement des seuils autorisés de contaminants sur les céréales est envisagé, d’après Benoît Meleard, responsable qualité pour Arvalis. En Don, 7 % de la collecte pourrait être déclassée et en alcaloïdes de l’ergot, c’est jusqu’à 12 % de la collecte en farine qui pourrait ne plus être conforme. Pascal Pusset, responsable qualité pour Armbruster, estime que « nous devons nous adapter à la pression réglementaire, mais aussi à celle de nos clients. Cela nous a amenés à ouvrir un laboratoire en 2006 et une échantillothèque en 2018, afin de doser nous-mêmes les mycotoxines présentes sur les céréales. ». 3000 analyses sont réalisées par an. Le négoce a testé de nombreux outils, tels qu’un spectroscope, et des services de start-up. « Le durcissement de la réglementation risque de rendre une récolte sur cinq non commercialisable pour les OS français, ajoute-t-il. C’est un sujet qui va prendre de l’ampleur : auparavant, en stockant correctement, nous n’avions pas de soucis. Plusieurs start-up spécialisées dans la détection ou l’éradication de nuisances ont présenté leurs offres.
Traçabilité, optimiser la logistique
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Serge Tardin, responsable QHSE pour le groupe RAGT Plateau central a présenté « Je livre en sécurité », un protocole de sécurité digitalisé. © EB/Référence Agro[/caption]
Avec les fluctuations des marchés céréaliers, difficile pour les négoces d’anticiper leurs marges. La logistique est une solution permettant de limiter les dépenses pour créer plus de valeur. Le projet Cohesio regroupe 12 OS sur l’axe Seine-Nord. Il permet d’agréger les données de chacun pour « parler le même langage et optimiser la logistique et les coûts », explique Albane Thouéry, de AgDataHub, qui coordonne le projet. Autre témoignage des intérêts d’une optimisation logistique, celui de Serge Tardin, responsable QHSE pour le groupe RAGT Plateau central. Ila présenté « Je livre en sécurité », un protocole de sécurité digitalisé qui permet d’avoir un suivi des manœuvres des chauffeurs de camion sur les sites du négoce. Une protection juridique en cas d’accident, mais aussi un outil de suivi de la performance des chauffeurs. Pour les adhérents de la FNA, le suivi des camions via des balises apparaît aussi comme une solution attractive et peu coûteuse à mettre en place : à partir de 7,99 € par mois et par véhicule. Si le négoce Bernard envisage d’équiper la cinquantaine de véhicules de son groupe et de former ses équipes à l’écoconduite, Coralie Racle, du négoce Bresson, a déjà sauté le pas. « C’est un outil intéressant qui permet de challenger les équipes, tout en ayant une meilleure vision des flux, pour les améliorer », confie-t-elle à Référence Agro.
Valoriser les démarches agroécologiques
Après avoir assuré la qualité sanitaire grâce à l’innovation, et avoir optimisé la logistique, la valorisation des démarches agroécologiques, et notamment du carbone, apparaît comme un levier supplémentaire pour accroître la valeur des exploitations. Myriam Cabamus, responsable qualité pour Bernard, a présenté la démarche agroécologique adoptée en mai par le groupe. Une dizaine de fermes pilotes et une vingtaine d’agriculteurs ont, pour le moment, été embarqués dans ce projet qui consiste à valoriser de bonnes pratiques en termes de carbone, d’eau et de biodiversité sur céréales. « Nous vendons à des industriels du carbone premium », explique Myriam Cabamus. La démarche sera lancée à plus grande échelle en mai 2024. MyEasyFarm, Cargill ou encore Farmleap ont présenté leurs offres , qui permettent de valoriser financièrement les efforts des agriculteurs.
Des outils pour signer, comparer les prix, commercialiser
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Jean-François Quiviger, responsable QHSE pour la Source, à gauche, a présenté les avantages de la signature électronique. © EB/Référence agro[/caption]
Enfin, la data, si elle peut être un outil d’innovation, peut aussi garantir la sécurité des entreprises. C’est par exemple le cas avec la signature électronique, qui permet d’accélérer les démarches administratives et de se couvrir en cas de litige avec un client. Une démarche adoptée par le négoce La Source. Jean-François Quiviger, responsable QHSE, explique : « Lorsque la signature électronique a été mise en place, nous avons eu 80 % de signatures dès le premier envoi, bien plus qu’auparavant. Au niveau administratif, sur les envois, les rappels, l’archivage, tout prend moins de temps. » L’utilisation d’outils tels que Perfarmer a soulevé un débat, entre défenseurs et pourfendeurs de cette application qui donne en temps réel le prix des matières premières. « Cela convient bien à une population d’agriculteurs qui va chercher à gauche et à droite la meilleure affaire possible, pointe Olivier Bidault, du négoce éponyme. Or ce que nous recherchons, c’est la fidélisation. »
Un réel enthousiasme des participants pour l’innovation
Les congressistes se sont montrés enthousiastes et convaincus par la quinzaine de partenaires de la FNA ayant présenté leurs outils. Alexandre Marty, des Ets Villemont, a confié : « nous avons déjà référencé la moitié des solutions présentées aujourd’hui, ce qui est rassurant sur notre capacité d’innovation ! » François Renaud, des établissements Renaud, a pour sa part salué l’apparition de « nombreuses petites innovations qui permettent de se distinguer, tout en répondant aux attentes des clients les plus jeunes. » Véronique et Yves Tamin, du négoce d’élevage Sorodiab, ont apprécié l’intérêt des filières céréalières pour l’innovation, précisant : « dans l’élevage, cela va beaucoup plus lentement. Certains de nos clients n’ont toujours pas d’adresse e-mail ! »