« Nous réfléchissons à l’évolution de notre pôle, le marché du canard est encore très mouvementé », Christophe Bonno, DG de Maïsadour
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Transition écologique et agriculture régénérative, gestion de la grippe aviaire, réorganisation de la filière canards, Christophe Bonno, directeur général de Maïsadour, présente une vision stratégique de la coopérative pour les prochaines années.
Référence agro : Le budget sur la transition écologique risque d’être réduit. Comment trouvez-vous les financements pour poursuivre votre transition écologique ?
Christophe Bonno : La réduction du budget pour la transition écologique est totalement insensée. Les cultures sont bouleversées avec le réchauffement climatique tout au long de l’année. On a vécu une sécheresse très importante il y a deux ans. Cette année, nous sommes plutôt avec des pluies incessantes. Nous avons retardé les semis et les rendements vont baisser dans certains secteurs. Diminuer le budget est complètement inverse à ce qu’on veut faire. Nous travaillons autour de notre stratégie d’entreprise Ambition 2030, et notamment sur la diminution de l’azote chimique dans les cultures. Cela nécessite des entretiens et des passages de machines fréquents pour redynamiser le sol. Nous avons des aides de la région, de la Nouvelle-Aquitaine ou de FranceAgriMer.
Nous prenons en main le sujet, en développant l’agriculture régénérative. 450 diagnostics carbone ont été faits à ce jour dans les exploitations de nos adhérents. Nous devons monter en compétence sur le sujet du carbone. Nous avons notamment déployé les couverts végétaux qui enrichissent le sol et favorisent la captation du carbone. L’année dernière, MAS Seeds a développé une gamme de couverts végétaux adaptés à différents types de sol et différentes pratiques. Nous incitons nos agriculteurs à récolter dès maintenant le maïs pour implanter plus tôt les couverts végétaux, et ainsi protéger les sols. Vu que les couverts vont grandir, ils vont créer de la matière organique qui va nourrir le sol. Quand on va les ramasser pour planter le maïs, le sol va être plus riche. Nous proposons à nos agriculteurs de faire des analyses de sol avant de planter le couvert. Ainsi, ils savent exactement la bonne dose d’engrais à mettre. Cela ne sert à rien d’en mettre trop. Déjà, cela coûte extrêmement cher. Et puis, écologiquement, ce n’est pas bon.
Sur le volet sanitaire, craignez-vous un retour de la grippe aviaire ou ce n’est pas un sujet ?
Christophe Bonno : Le vaccin fonctionne très bien. Nous vaccinons depuis octobre 2023. Depuis, nous n’avons aucun cas dans le secteur. Pour les animaux non vaccinés, c’est un problème, comme pour les dindes, mais pour les canards du Sud-Ouest, le vaccin fonctionne très bien. Deux doses sont nécessaires. La première est désormais faite au couvoir, à un jour, et la seconde est gérée par les éleveurs. Cela est plus pratique pour les agriculteurs. L’État a désormais référencé le vaccin de l’entreprise Ceva. Nous inaugurerons le site d’accouvage dans le Gers en 2025 avec la mise en place du robot pour l’ovosexage, que nous testons actuellement. Ce robot sera opérationnel dès cet automne.
Nous avons démarré la nouvelle vaccination avec les nouvelles règles. Il est dommage que l’État réduise l’aide de 85 % à 70 %. L’interprofession se mobilise pour demander à l’État de continuer. Ces aides sont utiles pour toute la biosécurité, pas seulement pour le vaccin. La surveillance des canards est un dispositif complet à mettre en place et il ne faut pas lâcher prise là-dessus.
Quel avenir pour MVVH après le départ du directeur général et son remplacement par un directeur général adjoint ? Une réorganisation des activités est-elle envisagée ?
Christophe Bonno : Après l’arrêt de notre rapprochement avec Euralis, nous continuons à réfléchir à l’évolution de notre pôle parce que le marché du canard est encore très mouvementé. Nous sommes passés par des années de pénurie avec près de 40 % de baisse de production avec la grippe aviaire. Maintenant, on remet la filière en route, on va avoir une production semblable à celle avant la grippe aviaire, et on va commencer à réfléchir pour la suite après Noël 2024. Le temps de voir comment le consommateur se comporte sur une année normale de production et de consommation.
Pour la partie canard, nous avançons pour que nos usines soient plus efficientes, productives et performantes. Nous travaillons aussi en flux tirés par les clients. Nous avons recruté un directeur de la performance qui a notamment mis en place cette la démarche S&OP, rationalisant les opérations pour répondre parfaitement aux clients. La demande du client déclenche la production. Cela nous permet d’avancer sur une chaîne de l’assiette à la graine. Nous avons aussi renforcé les équipes commerciales avec une formation à la clé qu’on appelle l’Académie Delpeyrat, pour monter en expertise. Nous sommes actuellement le leader du canard gras et nous voulons le rester et prendre des places sur le foie gras cette année. Nos produits sont montés en gamme et en qualité.
Nous continuons aussi nos produits de saurisserie, c’est-à-dire truite fumée et saumon fumé, même si ce sont aussi des marchés compliqués. Nous finalisons un investissement sur la pisciculture de truite en Bretagne, avec un process innovant qui n’existe pas en France, un circuit fermé, des consommations d’eau faibles et avec des panneaux photovoltaïques pour alimenter le bassin. Il n’a pas encore vu le jour, car les investissements sont lourds. Nous l’inaugurerons au printemps 2025.