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Renouer le dialogue avec les riverains, un kit pédagogique est à disposition

Le | Cooperatives-negoces

Sortir son pulvérisateur pour protéger ses cultures devient de plus en plus problématique en zones périurbaines. Afin de faciliter la reprise de dialogue entre le monde agricole et les riverains, France Nature Environnement a élaboré, avec différentes parties prenantes, un kit pédagogique dédié. Philippe Lefebvre et Rodolphe Bujon, des coopératives Oxyane et La Tricherie, ont participé au projet. Ils témoignent.

Thibault Leroux, chargé de mission au réseau agriculture de France Nature Environnement, Philippe Le - © D.R.
Thibault Leroux, chargé de mission au réseau agriculture de France Nature Environnement, Philippe Le - © D.R.

Le clivage autour des pesticides ne cesse de se renforcer au sein de la population. La nécessité de renouer le dialogue entre le monde agricole et les riverains fait désormais l’unanimité. « Les conseils municipaux comprennent de moins en moins d’agriculteurs, les communautés de communes périurbaines se déploient, avec toujours davantage de néoruraux, avance Philippe Lefebvre, directeur développement filières et développement durable pour le groupe coopératif Oxyane. Aujourd’hui, même les agriculteurs bio se font insultés lorsqu’ils sortent le pulvérisateur. » Pour Rodolphe Bujon, administrateur à la coopérative La Tricherie, les agriculteurs n’ont pas suffisamment expliqué leur métier : « Nous devons arrêter de nous cacher et dialoguer avec les riverains, être en phase avec eux ».

Avec ces convictions, les deux acteurs du monde agricole n’ont pas hésité à se porter volontaires lorsqu’ils ont été approchés par France Nature Environnement (FNE) pour participer à un projet visant à renouer le dialogue.

Co-construction d’un kit pédagogique

« Le projet a démarré en 2020, précise Thibault Leroux, chargé de mission au réseau agriculture de France Nature Environnement. Nous avions répondu à un appel à projets Écophyto et voulions montrer que les associations peuvent être force de proposition. De nombreuses associations adhérentes révélaient par ailleurs leur motivation sur la question. Avec la loi Égalim et la réglementation relative aux riverains, le dialogue s’avérait être un véritable enjeu. »

Une co-construction s’est alors mise en œuvre, réunissant acteurs agricoles, membres d’associations environnementales, représentants de communes, des ministères de la Santé et de la Transition écologique…

« Nous avons pu échanger, sans langue de bois, malgré les différentes sensibilités des uns et des autres », relate Rodolphe Bujon. Un constat partagé par Philippe Lefebvre : « Nous n’étions pas dans l’agribashing, dans le pour ou contre les pesticides, mais dans un vrai dialogue constructif ».

Les discussions entre les différentes parties prenantes ont conduit à la rédaction de six affiches reprenant les grandes thématiques discutées lors des réunions. Elles expliquent le travail et les contraintes d’un agriculteur, les politiques agricoles des soixante dernières années, les raisons d’utilisation de pesticides et la réglementation en vigueur, les effets de ces pesticides sur l’environnement et sur la santé. Enfin, elles font le point sur les alternatives dont disposent les producteurs.

Des clés pour un dialogue apaisé avec les riverains

« Ces affiches sont à la disposition de tous les acteurs concernés par la problématique, associations environnementales, collectivités, professionnels agricoles…, informe Thibault Leroux. Elles ont pour but de soutenir la dynamique de dialogue déjà engagée dans plusieurs territoires autour des pesticides. »

FNE propose également 17 fiches pédagogiques construites pour mener à bien un processus de dialogue territorial. L’association y détaille des clés concrètes, des outils d’intelligence collective pour engager la démarche, favoriser une culture de l’écoute et de la compréhension mutuelle des besoins de chaque acteur afin d’aboutir, dans un climat apaisé, à une co-construction d’actions.

« L’ensemble du kit pédagogique, que nous avons

en 2020/2021 avec des résultats encourageants, a été mis en ligne en décembre 2021, reprend le chargé de mission de FNE. Nous communiquons maintenant dessus auprès de nos associations adhérentes et des différentes parties prenantes. »

Un appui pour toutes les démarches territoriales

« La Tricherie, qui est dans cette démarche de dialogue, ne manquera pas d’exploiter ce kit, qui constitue un appui solide », assure Rodolphe Bujon. L’administrateur de la coopérative lance même l’idée d’une suite, avec un volet dédié à la consommation locale.

Philippe Lefebvre, de son côté, attend que les associations adhérentes de FNE s’approprient le kit pour revenir vers elles et entamer des démarches. « Ce kit permet de poser le débat, de montrer que les agriculteurs utilisent les pesticides par nécessité et qu’ils sont prêts à changer leurs pratiques », explique-t-il. Le groupe coopératif Oxyane est déjà très investi dans les démarches territoriales et l’agriculture durable. Une association dédiée, PrioriTERRE, a même été créée en mai 2021. « Nous cherchons à trouver des solutions alternatives aux pesticides efficaces et rémunératrices, ainsi que les moyens de les faire connaître », conclut-il.