Renouvellement des générations, Eureden lance les passeports JA
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Eureden a annoncé le 28 mai le lancement de son dispositif, « Les passeports JA » destiné à mieux accompagner les repreneurs d’exploitations. La coopérative bretonne double ses aides financières pour ces derniers, propose un parcours de formation ciblé et un suivi technique pour la réussite des projets.
« Nous sommes confrontés à une nouvelle donne préoccupante : un agriculteur sur deux partira à la retraite d’ici dix ans, et seulement un départ sur quatre sera remplacé. Les attentes des jeunes évoluent et l’inflation atteint des niveaux sans précédent », souligne Michel Bloch, administrateur d’Eureden en charge de la commission installation, le 28 mai. Le phénomène est déjà en cours. « Nous allons perdre entre 2 et 3 % de la production chaque année et, actuellement, un poulet sur deux consommé en France est importé, poursuit-il. Si rien n’est fait, 30 à 40 % des agriculteurs disparaîtront dans la prochaine décennie. » En plus de l’attractivité du secteur, les installations deviennent de plus en plus complexes en raison de l’inflation. « Le coût des constructions a augmenté d’au moins 30 %, ajoute l’administrateur. Tout cela pèse lourdement sur les filières de qualité. Dans le secteur du porc bio, le marché s’est complètement effondré. »
800 exploitations à céder, 200 installations par an
Chez Eureden, 800 exploitations sont à céder chaque année. « Nous installons 200 jeunes, explique Damien Craheix, responsable du pôle stratégie des exploitations. Les agrandissements de fermes ont temporairement compensé les départs, mais ce n’est plus le cas actuellement. »
Pour attirer de nouveaux agriculteurs, la coopérative bretonne a mis en place un nouveau dispositif d’aide renforcé par un accompagnement global de l’exploitation : « Les passeports JA ». L’objectif est d’accompagner 300 nouvelles installations par an d’ici à 2030. « C’est sur les productions animales que nous rencontrons le plus de difficultés », précise Damien Craheix. Néanmoins, le dispositif s’adresse à l’ensemble des exploitations, sans limite d’âge.
Quatre pass
Il est articulé autour de quatre axes principaux :
- Un pass finance avec un doublement des aides allouées pour atteindre une enveloppe de deux millions d’euros par an. Elle passera à trois millions d’euros lorsque les objectifs d’installation seront atteints. Les aides seront réparties également entre les subventions directes et les prêts, servant à la modernisation des bâtiments, à l’achat d’animaux et d’agrofournitures, à l’acquisition d’outils de collecte, etc.
- Un pass compétence offrant un accès à des formations et à des groupes de progrès sur des sujets techniques, stratégiques et environnementaux. Eureden propose un parcours de formation de dix jours sur la gestion des risques, le management des ressources humaines, les performances technico-économiques, la planification stratégique et les perspectives filière.
- Le pass performance, avec un renforcement du suivi technique pendant les trois premières années, des offres sur les outils d’aide à la décision comme Xarvio, et sur les analyses de sol et de fourrage. « Les trois premières années sont cruciales dans la réussite du projet », souligne Michel Bloch.
- Le pass environnement, offrant un accès facilité aux outils de conseil pour simplifier et sécuriser les projets d’exploitation concernant les actions et déclarations agro-environnementales (plans de fumure, PAC, etc.).
« Première coopérative à créer un pôle d’experts dédiés à l’installation »
Les agriculteurs sont soutenus par le pôle « stratégie des exploitations », composé de neuf experts dans divers domaines. « Nous sommes la première coopérative à créer un pôle d’experts dédié à l’installation, assure Damien Craheix. Ces personnes, qui travaillaient déjà au sein de la coopérative, ont été choisies pour leurs compétences et leur vision filière. Ils possèdent souvent une formation de niveau ingénieur. » Eureden prévoit de recruter un expert spécialisé dans le droit des sociétés, la gestion comptable et la fiscalité d’ici à la fin de l’année.
« Il ne faut pas se tromper, car les éleveurs investissent sur une période de 15 ans », avertit Eric Humphry, président de la section volailles d’Eureden. Nous sommes dans une région avec un fort tissu agroalimentaire qui pourrait être mis en difficulté par la diminution du nombre d’agriculteurs. C’est aussi un enjeu de souveraineté alimentaire.»
Pour Michel Bloch, il est essentiel que les agriculteurs ne se sentent pas isolés : « Notre accompagnement est très apprécié par les banquiers. Nous devons garantir à nos adhérents un revenu et des débouchés. Notre présence sur une large gamme de marchés constitue une véritable force. »
Les aides et dispositifs mis en place ne sont pas obligatoires mais fortement recommandés par la coopérative. Cependant, l’adhésion à l’outil de gestion des exploitations de la coopérative, qui mesure les performances financières, est incontournable.
Un sujet de concurrence entre distributeurs agricoles
La coopérative souhaite également renforcer ses liens avec les écoles. Des employés d’Eureden interviennent dans les établissements agricoles, participent à l’élaboration des programmes scolaires, et aident à trouver des stages dans les exploitations agricoles. « Nous voulons aider les jeunes qui souhaitent s’installer à trouver ce qui leur convient, indique Damien Craheix. Nous évaluons la viabilité des projets dans leur globalité. Il faut savoir dire non lorsque c’est nécessaire. »
La coopérative ne nie pas que la concurrence va être rude entre les distributeurs agricoles pour sauvegarder sa production. « Tout le monde a à gagner avec ce type de dispositif », reconnaît Michel Bloch.