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Décret agrivoltaïsme : réactions mitigées chez les acteurs du monde agricole

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Suite à la publication au Journal officiel (JO), le 9 avril 2024, du décret fixant un cadre pour le développement de l’agrivoltaïsme, les réactions n’ont pas tardé à affluer de la part des acteurs du monde agricole. La plupart salue l’avènement d’un texte définissant les contours de l’installation de panneaux photovoltaïques sur les parcelles agricoles mais demeure en attente de précisions, notamment sur les conditions de contrôles et de sanctions.

Le président de France agrivoltaïsme Antoine Nogier, au micro, conclut des débats dans lesquels sont - © D.R.
Le président de France agrivoltaïsme Antoine Nogier, au micro, conclut des débats dans lesquels sont - © D.R.

Très attendu par le monde agricole, le décret relatif au développement de l’agrivoltaïsme, paru le 9 avril 2024 au Journal officiel (JO), a eu son lot de ravis et d’inquiets. Parmi les premiers, la FNSEA qui, dans un communiqué diffusé le lendemain, voit de nombreux avantages apportés par un texte « fondamental » : « [Il] concilie le déploiement de l’agrivoltaïsme dans le respect de notre souveraineté alimentaire. Il précise l’application des critères permettant de garantir le maintien d’une activité agricole sous les installations photovoltaïques et met fin aux projets « alibis ». Il définit les co-bénéfices, limite la perte des rendements en plafonnant le taux d’occupation des sols à 40 % et érige des mécanismes de contrôle et de sanction cohérents », énumère le syndicat.

En outre, ce dernier « se réjouit que soient désormais interdites les installations photovoltaïques au sol sur les terres d’agriculteurs en exploitation ». Même satisfaction affichée par Enerplan, syndicat de l’énergie solaire renouvelable, pour lequel « les précisions apportées par le décret, très attendues, sont une première étape vers la définition d’un cadre juridique cohérent, lisible et répondant à la fois aux enjeux de la souveraineté alimentaire et énergétique de notre pays ». 

L’élevage, « grande faiblesse du décret »

Dans un communiqué diffusé le jour de la publication du décret, Chambres d’agriculture France « salue [un texte] qui permettra la mise en place d’une régulation effective […] et fera des Chambres d’agricultures, via les CDPENAF, les acteurs clés d’un développement progressif et raisonné de l’agrivoltaïsme, au service de l’agriculture et de l’amélioration des revenus de chaque exploitation ». En outre, l’organisation « se félicite » du maintien d’un minimum de 90 % du rendement des cultures. Seule ombre au tableau, selon Chambres d’agriculture France : « l’absence d’indicateurs quantitatifs à même d’encadrer les projets agrivoltaïques en élevage ».

Le même point est d’ailleurs soulevé par l’association France Agrivoltaïsme, pour laquelle « la question du rendement agricole pour l’élevage […] constitue une grande faiblesse du décret, car celui-ci ne définit ni les objectifs ni la méthodologie de calcul. Ce manque laisse la porte ouverte à des effets d’aubaines avec le développement potentiel de projets basés sur la seule activité énergétique au détriment de l’activité agricole ». Elle attend désormais la parution de l’arrêté relatif aux contrôles, chargé d’apporter des « compléments essentiels […] pour permettre un déploiement vertueux de la filière ». « En particulier, il s’agira de définir des objectifs de rendement pour les installations d’élevage et de mener à bien, par des structures indépendantes, des contrôles permettant de garantir le rendement agricole, et ce y compris pour les exploitations pour lesquelles aucun taux de couverture n’est prescrit et celles sur l’élevage », souligne France Agrivoltaïsme.

Un recours déposé par la Confédération paysanne

Le discours est encore plus critique du côté de la Confédération paysanne. « Par ce texte, le gouvernement fait même tomber les rares garde-fous instaurés par le législateur pour préserver les paysan.nes et le foncier de l’appétit des énergéticiens, pointe-t-elle. Il confirme le fait que l’installation de panneaux photovoltaïques au sol représente une menace pour notre souveraineté alimentaire. » Le syndicat agricole ne se montre guère tendre avec la définition des services apportés par les installations agrivoltaïques : « Pour satisfaire ces critères, il suffira à l’énergéticien de prouver qu’un panneau génère davantage d’ombre que… rien du tout ».

Dans sa conclusion, la Confédération paysanne achève d’exposer sa divergence de philosophie : « Lorsque le texte estime que couvrir plus de 40 % d’une surface agricole avec des panneaux est un avenir désirable, nous affirmons que c’est autant d’autonomie qui est enlevée aux paysannes et paysans et à la production alimentaire de la France ». Le syndicat annonce sa décision de déposer un recours contre le décret, « afin de contraindre le gouvernement à revoir sa copie ».