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Climat, l’agriculture s’empare du label bas carbone

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Le label bas-carbone est un cadre de certification volontaire, lancé en avril 2019 par le ministère de la Transition écologique pour atteindre la neutralité carbone. Il doit permettre d’atteindre les ambitions de la stratégie nationale bas carbone, adoptée le 23 avril 2020. Les filières agricoles s’en emparent et les projets démarrent tout juste. À la clé : des bénéfices économiques et environnementaux.

Crédit photo : Chambre agriculture de Normandie - © D.R.
Crédit photo : Chambre agriculture de Normandie - © D.R.

Présenté comme « le premier cadre de certification climatique adopté par la France », le label bas-carbone a été lancé par le gouvernement, le 23 avril 2019, un an, jour pour jour, avant la validation la Stratégie nationale bas carbone (SNBC). Le label doit permettre d’atteindre les objectifs de la SNBC, notamment celui du zéro émission nette d’ici à 2050. Construit par l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) et ses partenaires (1), le label s’adresse aux collectivités, citoyens ou entreprises souhaitant soutenir financièrement l’émergence de projets allant dans le sens d’une réduction des émissions, ou de la séquestration du carbone, afin de compenser celles dont ils sont à l’origine.

Un décret et un arrêté du 28 novembre 2018 précisent ses modalités d’application. Depuis leur publication, des « méthodes carbone » ont été travaillées pour être appliquées aux différentes filières. Le secteur agricole est particulièrement concerné car il possède un fort potentiel de stockage du carbone.

Elevage, agroforesterie et grandes cultures

La filière d’élevage de ruminants a été la première à démarrer. La méthodologie Carbon agri, réalisée par l’Institut de l’élevage (Idele), a reçu la reconnaissance officielle par l’État le 30 septembre 2019. Le calcul de réduction des émissions de gaz à effet de serre concerne l’ensemble de l’exploitation, intégrant donc également les cultures associées. En agroforesterie, le projet Carbocage, pour valoriser et rémunérer le carbone stocké dans les haies, a été validé en janvier 2020. Quant aux grandes cultures, les associations de producteurs de maïs (AGPM), blé (AGPB), betterave (CGB) et d’oléoprotéagineux (Fop) se sont engagés au côté de leurs instituts techniques respectifs à rédiger une méthodologie adaptée d’ici à la fin de l’année. Les outils sont encore perfectibles : les travaux en grandes cultures et celui sur l’agroforesterie, vont par exemple servir à améliorer Carbon agri.

Sur le terrain, l’histoire débute tout juste. Parmi les points de vigilance, le coût lié à l’évaluation des réductions d’émissions permises par les projets, qui dépend de la précision des modèles. Plus l’estimation est fine, plus elle nécessite de données, et plus elle est onéreuse ! « Nous devons trouver le bon compromis pour que la méthode soit suffisamment robuste et crédible sans être trop complexe à utiliser », explique Claudine Foucherot, en charge du projet label bas-carbone chez I4CE, Institute for Climate Economics.

L’agriculture a du potentiel

Autre interrogation : les structures qui souhaitent compenser leur empreinte carbone seront-elles attirées par les projets agricoles ? « À nous et aux acteurs agricoles de les faire connaître », insiste Claudine Foucherot.  D’autant que l’agriculture a plus d’un atout en poche. « Une étude de l’Inrae a montré qu’un certain nombre de pratiques d’atténuation sont peu coûteuses voire sont rentables pour l’exploitant, précise Claudine Foucherot. Chaque projet doit définir à partir de quel prix du carbone il devient intéressant. Certains peuvent l’être dès 15 euros la tonne. Généralement, plus les volumes achetés vont être importants et plus les prix vont être bas. Par ailleurs, plus les projets ont des cobénéfices - sur la biodiversité, l’aménagement du paysage, la qualité de l’eau, etc. - et plus les prix seront élevés. »

Sensibiliser les entreprises

Pour l’heure, les entreprises potentiellement intéressées par la compensation de leurs émissions sont insuffisamment sensibilisées. « Il existe des critiques, le label passe parfois pour un « droit à polluer », ce qui peut refroidir des entreprises, qui préfèrent du coup s’atteler à réduire leurs émissions, note Carmen Muñoz-Dormoy, présidente du mouvement Planet A. Mais réduire et compenser sont deux démarches complémentaires ! À nous de montrer que le label est fiable. »

Un travail de communication doit désormais être engagé, notamment au niveau des territoires.

(1)   Le label a été construit par I4CE, en lien avec de nombreux acteurs : ministère de l’Agriculture, l’Ademe, l’accélérateur de projets EIT Climate-KIC, le Groupement d’intérêts publics, le Feder du Massif Central, la Poste, le Centre national de la propriété forestière, l’Idele, le Cniel.