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France Stratégie propose un bonus / malus pour mettre en place une Pac agroécologique

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Dotée d’un budget de 55 milliards d’euros, la Politique agricole commune (Pac) représente 43 % du budget total de l’Union européenne. Le dispositif fait pourtant l’objet de critiques. D’une part, elle n’inclurait pas assez l’enjeu environnemental. D’autre part, les aides versées ne suffisent plus à assurer un revenu décent aux agriculteurs, un quart d’entre eux vivant sous le seuil de pauvreté en 2017. C’est en tout cas le constat dressé par France Stratégie, institution rattachée au Premier ministre, dans un rapport  publié le 23 octobre, alors que les débats sur la future Pac ont été rouverts par la Commission européenne. Objectif du document : lister des moyens d’actions pour faire de la Pac un « levier de la transition agroécologique », mais aussi un moyen d’assurer un revenu décent aux agriculteurs.

Encouragement de la diversification et taxation des produits phytos

Pour cela, plusieurs leviers ont été identifiés, fonctionnant sur le principe du bonus/malus, dans l’hypothèse d’un budget inchangé :

  • Un bonus pour encourager la diversification des cultures, estimé à 2,4 milliards d’euros. Il serait financé par « une montée en charge progressive de la taxe sur les engrais et les pesticides, en partant d’un taux de 20 % du prix, et de la taxe sur les antibiotiques en partant d’un taux de 15 % ». Selon France Stratégie, ces taux correspondent aux seuils minimum pouvant engendrer un changement de pratiques.
  • Un bonus pour le maintien des prairies, conditionné à la présence d’un nombre minimal d’animaux à la pâture. Il est associé à un malus en cas de labourage. Ce bonus serait financé par une taxe sur les gaz à effet de serre, proportionnelle au nombre d’animaux élevés.
  • Un bonus pour l’entretien de surfaces d’intérêt écologique (SIE) et un malus en cas de destruction. Des aides sont également envisagées pour l’entretien de zones Natura 2000 ou de la Trame verte et bleue. Celles-ci seraient financées par une réorientation des aides de la Pac ne relevant ni des droits de paiement de base ni du paiement vert.Ce système de bonus serait financé au niveau national et devrait idéalement venir en complément d’un nouveau système de calcul des aides agricoles, centré sur la notion d’unité de travail.

Lier les aides au travail agricole

Actuellement, le « paiement vert », attribué sous condition de diversification des cultures et préservation de la biodiversité, représente 30 % des aides directes. Celles-ci sont liées à la taille des exploitations. Le rapport préconise de repenser ces aides afin qu’elles soient « proportionnelles au travail agricole », ce qui permettrait « d’assurer à tous les agriculteurs un paiement minimal déconnecté du niveau de la production, et d’autre part, de tenir compte de l’augmentation de la charge de travail lors du passage à des pratiques agroécologiques ». Cette nouvelle base de calcul permettrait de verser 8000 euros/ETP/an, contre 135 euros par hectares aujourd’hui, en moyenne, en métropole. « Ce changement de mode de calcul du paiement de base nécessiterait un accord européen. Il pourrait donc prendre plus de temps à mettre en place que les bonus-malus », mis en place aux niveaux nationaux, souligne néanmoins le rapport.

Les systèmes bio et diversifiées plus favorisés

Le système de bonus présenté n’aurait pas le même impact pour tous les systèmes agricoles. S’il bénéficierait tout particulièrement aux systèmes bio ou très diversifiés, la situation serait moins évidente pour les agriculteurs des filières grandes cultures conventionnelles, qui devraient modifier leurs pratiques pour conserver un même niveau d’aide. Ainsi, les simulations menées par France Stratégie montrent que « les trois cas-types de grandes cultures « à faible ou moyen potentiel agronomique » auraient à réduire leur utilisation d’engrais et de produits phytosanitaires de 20 % », pour ne pas perdre de subvention par rapport à aujourd’hui.