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« La Reut est coûteuse, d’un point de vue économique et environnemental » prévient un rapport des services de l’Etat

Le | Politique

Alors que 419 projets de réutilisation des eaux usées traitées sont en services ou en préparation en France, et que des textes législatifs sont vivement attendues par le secteur agroalimentaire, un rapport des services de l’Etat, diffusé le 19 octobre 2023, appelle à ne pas considérer cette pratique comme « une solution magique ».

« La Reut est coûteuse, d’un point de vue économique et environnemental » prévient un rapport des services de l’Etat
« La Reut est coûteuse, d’un point de vue économique et environnemental » prévient un rapport des services de l’Etat

Lors de la présentation du Plan eau, en mars dernier, Emmanuel Macron a fixé l’objectif de déployer 1000 projets de réutilisation des eaux usées, d’ici à 2027. Dans un rapport diffusé le 19 octobre 2023, résultant d’une mission conjointe sur le recours aux eaux non conventionnelles, le CGAAER, l’IGEDD et l’IGAS (1), ne mâchent pas leurs mots sur le sujet : « Les eaux non conventionnelles, ENC, ne sont pas une solution magique aux problèmes tendanciels de manque d’eau et doivent trouver leur juste place au sein du bouquet de solutions d’adaptation au changement climatique. » En ce qui concerne plus précisément la réutilisation des eaux usées traitées, les auteurs du rapport formulent plusieurs points de vigilance. « La Reut est coûteuse, d’un point de vue économique, mais également environnemental, car elle nécessite de l’énergie et des additifs chimiques. Ce n’est ni une eau nouvelle, ni gratuite. Sa mobilisation doit répondre à une attente du territoire pour éviter une politique de l’offre déconnectée des besoins et être prise en compte dans l’économie générale des prélèvements. »

Prévoir un cadre juridique pour l’irrigation

Selon le recensement effectué par la mission, 419 projets de Reut ont été comptabilisés, dont 136 mis en service, témoignant d’une dynamique certaine en la matière. « 27 départements sont sans projet existant ou  à l’étude (contre 40 en 2022), seulement six d’entre eux n’ayant fait l’objet d’aucune demande sur la Reut auprès des services instructeurs », précise le document. La majorité des projets portent néanmoins sur des petits volumes (en moyenne 20 000 m3/an/projet) et ont une vocation multi-usages, bien que l’irrigation agricole soit le plus fréquent. Le rapport insiste d’ailleurs sur la nécessité de « prévoir un encadrement réglementaire pour l’utilisation, à des fins d’irrigation agricole, des eaux issues des entreprises du secteur alimentaire », alors que les décrets concernant ces enjeux se font toujours attendre.

« La Reut est coûteuse, d’un point de vue économique et environnemental » prévient un rapport des services de l’Etat - © D.R.
« La Reut est coûteuse, d’un point de vue économique et environnemental » prévient un rapport des services de l’Etat - © D.R.

L’observatoire de la Reut toujours pas constitué

De manière générale, les auteurs du rapport estiment que le recours aux eaux non conventionnelles peut constituer « une solution intéressante », mais soulignent le potentiel « insuffisamment documenté » de ces eaux. Pour y voir plus clair, le rapport recommande d’élargir aux ENC l’observatoire de la Reut, prévu dans le Plan eau, qui n’a cependant à ce jour toujours pas été constitué. Parmi les missions qui pourraient lui être confiées, les auteurs citent notamment l’analyse « de la mise en œuvre en France des projets d’ENC, leurs conditions de réussite et leur effet sur la gestion quantitative de l’eau, ainsi que le potentiel de volume et d’usage, afin d’identifier les volumes à valoriser selon une analyse coût/bénéfice ».


(1) le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux ; l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable ; l’Inspection générale des affaires sociales.