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Les ambitions hors-norme du nouveau plan pour la haie

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Le ministre de l’Agriculture a dévoilé fin septembre un nouveau plan haie visant une hausse « nette » de 50 000 km de haie d’ici à 2030. Cet objectif, qui supposera de tripler les plantations et d’arrêter tout arrachage, pourrait se révéler très ambitieux par rapport à l’enveloppe annoncée de 110 M€.

Crédit : FranceAgriTwittos / bubu1664 - © D.R.
Crédit : FranceAgriTwittos / bubu1664 - © D.R.

Tous les acteurs s’accordent : le signal politique est positif. Symbole d’une « réconciliation entre nature et agriculture » pour la LPO, voire « chance historique » pour l’association Afac-Agroforesterie : le nouveau pacte pour la haie, dévoilé le 29 septembre par Marc Fesneau, est salué par la plupart des associations comme un pas dans la bonne direction. Alors que près de 20 000 km disparaîtraient chaque année selon le ministère, ce plan destiné à prendre la suite de celui de Stéphane Le Foll vise à atteindre « un gain net de 50 000 km de linéaire de haies d’ici 2030 ». En plus des 45 millions d’euros accordés au travers du plan de relance pour des plantations entre 2021 et 2022, de nouveaux financements seront inscrits au prochain projet de loi de finance : 110 M€ pour la seule année 2024.

« Il faut encourager ceux qui ont des haies à les entretenir (…), et ceux qui n’en ont pas à en avoir », a résumé le ministre de l’Agriculture à l’occasion d’un déplacement en Bretagne, le 29 septembre. Connaissance de la haie, révision des labels de valorisation du bois énergie, développement de l’approvisionnement en graines et plants : au travers de vingt-cinq actions, Marc Fesneau espère s’attaquer à l’ensemble des enjeux pour reconstruire une véritable filière. Le calendrier est tout aussi ambitieux : les actions seront détaillées dans des feuilles de route d’ici novembre, pour une application dès janvier 2024.

Tirer les leçons du passé

Le ministère a par ailleurs tiré les leçons de ses erreurs. Dans un rapport publié en mai dernier, le CGAAER avait souligné que les arrachages, interdits par la refonte de la Pac de 2013, n’avaient été contrôlés qu’à partir de 2015. Sans pouvoir objectiver le phénomène, les inspecteurs du ministère rappelaient que « de nombreux exploitants agricoles auraient supprimé des haies avant ou au cours de l’année 2015, de crainte de les voir sanctuarisées ».

Afin d’éviter toute anticipation sur le terrain, le ministère prévient donc que les règles issues du nouveau pacte « seront applicables aux opérations mises en œuvre à compter du 29 septembre 2023 de manière à éviter et prévenir la destruction d’une partie du linéaire en amont de l’entrée en vigueur ».

Plus de 8000 km à planter chaque année

Par rapport aux ambitions, l’enveloppe annoncée semble en revanche déjà trop faible. Le calcul est simple : pour atteindre 50 000 km de linéaire supplémentaires d’ici à 2030, plus de 8000 km de haie devront être plantés chaque année à partir de 2024. Un effort au moins deux fois plus important que celui du plan de relance, qui a financé 7000 km sur la période 2021-2022. Mais le Gouvernement semble encore plus ambitieux en termes de rythme, puisque l’objectif est exprimé en « gain net  », et prend donc en compte en théorie la perte des haies liées aux arrachages, estimés à environ 20 000 km chaque année.

Dans un communiqué publié le jour même des annonces du ministre, l’Afac-agroforesterie résume : si la disparition des haies n’est pas immédiatement enrayée, « il faudra replanter non pas 50 000 km de haie, mais deux, trois ou quatre fois plus ». Dans son appel de la haie, publié à la veille du salon de l’agriculture en février 2023, l’association avait d’ailleurs déjà encouragé les décideurs à réaffirmer le zéro disparition nette de haie.

Signe que le ministère a bien compris les termes de l’équation, le nouveau plan prévoit dans son action n° 21 de mieux contrôler et sanctionner les arrachages et destructions de haies. Un contrôle des arrachages, détaille le document transmis à la presse, « sera mis en œuvre chez les demandeurs d’aides par contrôle administratif d’ici fin 2024 ». Le gouvernement lancera par ailleurs un référentiel cartographique unique permettant de connaître et caractériser les haies sur la France entière, pour mieux surveiller l’évolution du linéaire.