Pesticides, un pas vers des décisions européennes plus transparentes ?
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Pollinis a-t-elle ouvert une brèche dans l’opacité des décisions européennes relatives aux pesticides ? C’est du moins ce que l’ONG espère, après avoir été entendue par le Tribunal de l’Union européenne pour obtenir la divulgation des documents pouvant expliquer les raisons du blocage des « tests abeilles ». La Commission européenne, opposée à cette divulgation, a cependant deux mois pour faire appel.
« Une décision historique de la justice européenne », c’est en ces termes que Pollinis annonce, dans un communiqué daté du 15 septembre, que le Tribunal de l’Union européenne lui a donné raison. L’ONG indépendante, qui agit pour stopper l’extinction des abeilles et autres insectes pollinisateurs, demande depuis 2018 la divulgation des documents pouvant expliquer les raisons du blocage des « tests abeilles ».
Un report plus de trente fois, sans information
Le document d’orientation visant à évaluer les risques des produits phytosanitaires pour les abeilles mellifères, les bourdons et les abeilles solitaires au sein de l’Union européenne n’a pas trouvé de consensus au sein des États membres durant plus de sept ans. L’Efsa, l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’avait présenté en 2013 mais il se retrouvait sans cesse à l’ordre du jour du Scopaff, le comité technique chargé des pesticides, présidé par la Commission européenne, faute d’accord entre les représentants des États membres. « Pendant sept ans, l’adoption de ces protocoles essentiels pour empêcher la commercialisation de substances toxiques pour les pollinisateurs a été reportée plus de trente fois, sans que les citoyens européens n’aient accès à la moindre information sur les raisons de ce blocage qui sert uniquement les intérêts de l’industrie agrochimique », avance Nicolas Laarman, délégué général de l’ONG.
Pollinis mise sur une jurisprudence
Le document d’orientation de 2013 a depuis été refondu et un accord a été trouvé. Le texte est en consultation publique jusqu’au 3 octobre 2022. Mais pour Pollinis, une bataille est gagnée. L’ONG espère qu’avec ce jugement, le Tribunal de l’Union européenne met fin à l’opacité du Scopaff. « Cette décision pourrait faire jurisprudence, souligne Julie Pêcheur, directrice du plaidoyer. Les citoyens ont le droit de connaître les positions de leur État au sein de comités techniques tels que le Scopaff, c’est une question de démocratie. » D’après l’ONG, les juges européens ont estimé que les documents faisant état de la position individuelle des États membres au sein de ce type de comité ne bénéficient d’aucune confidentialité de principe.
Reste que la Commission européenne, qui a toujours refusé l’accès aux documents comprenant les arguments utilisés ainsi que les positions prises par les représentants des États membres, a deux mois pour faire appel.