« Afterres 2050 suscite le dialogue », Sylvain Doublet, Solagro
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Trois régions ont participé à la prospective Afterres 2050, un scénario soutenable pour l’agriculture et l’utilisation des terres, réalisée par Solagro : l’Île-de-France, la Picardie et le Centre Val de Loire. Entretien avec Sylvain Doublet de Solagro Référence environnement : Comment les priorités du scénario se déclinent-elles selon les régions ? Sylvain Doublet : Afterres 2050 entend réduire l'artificialisation des sols. Par rapport à un rythme tendanciel de pertes des terres, il diminue l’ampleur du phénomène. 9000 hectares sont sauvés en Ile-de-France, 80 000 ha en Centre Val de Loire et 40 000 ha en Picardie, sur un total d’un million d’hectares en France. Dans les trois régions, nous complexifions l’assolement et allongeons les rotations. Nous implantons des légumineuses, graines ou fourragères, qui apportent de l’azote au sol, à destination de l’alimentation humaine. Le pois, le pois chiche ou la lentille sont parfaits pour répondre au défi alimentaire du scénario. En région Centre Val de Loire, l’assolement est plus diversifié donc l’effort pour atteindre le scénario sera moins grand. Il préconise la couverture des sols en été et en hiver. Toutes les régions sont à un niveau très bas en la matière. En élevage, les troupeaux bovins sont divisés par deux. Le scénario vise l’utilisation de races mixtes, d’énergie et la production d’aliments de qualité à plus forte valeur ajoutée. On estime, enfin, qu’il faudrait 10 000 méthaniseurs, soit la même densité qu’en Allemagne, pour répondre à la demande énergétique. Ces unités collectives se situeraient à l’échelle des territoires. R.E. : Le scénario préconise 45 % des surfaces en agriculture biologique. Pouvez-nous expliquer ce choix ? S.D. : Ce n’est pas un choix a priori. Ce sont les objectifs à atteindre qui passent par une augmentation conséquente des surfaces en bio. Parce que c’est un mode de production plus résiliant face au changement climatique, fondé sur des bases agronomiques solides et qui utilise moins d’intrants. Le problème principal est la baisse de la production, mais qui est compensée en partie par une diminution de la demande alimentaire. R.E. : Le scénario Afterres 2050 semble difficilement réalisable. Lors de vos présentations, qu’est ce qui a le plus suscité le débat ? S.D. : Notre scénario doit permettre de réinterroger les politiques. En agriculture biologique, le ministère de l’Agriculture prônait 20 % de surfaces en bio pour 2020 : nous en sommes loin. Alors que nous montrons que l’agriculture biologique répond aux enjeux du scénario Afterres. Cela peut permettre de crédibiliser des orientations politiques. Quant aux retours, nous avons eu tous les avis, de toutes les sensibilités. Nous l’avons présenté aux politiques, producteurs, associations environnementales et citoyennes, Amap,… Il suscite davantage le dialogue que la polémique, surtout quand nous expliquons nos calculs. R.E. : Quelle est la suite de ce travail ? S.D. : Nous allons publier des synthèses de quatre pages pour les trois régions d’ici le début de l’année 2016. Nous aimerions travailler à d’autres échelles, européennes ou sur une communauté d’agglomération de 100 000 habitants. Parmi les axes d’approfondissement : l’aspect social, les circuits de commercialisation, ou encore la partie aval.